La naissance du roi Arthur
de
soif. Ils n’ont plus le choix, et plus tu te montreras intraitable avec eux,
plus rapidement ils quitteront ce royaume. »
Dès le lendemain matin, Emrys, suivant les conseils de
Merlin, envoya d’autres messagers. Après de longues discussions, les Saxons
finirent par accepter d’évacuer la forteresse et de gagner le rivage. Là, on
leur fournit autant de navires qu’il en fallait, et bientôt ils prirent la mer.
C’est ainsi que le roi Emrys et son frère Uther, grâce aux sages
recommandations de Merlin, libérèrent le royaume de Bretagne de l’oppression
saxonne. Et Merlin, après avoir pris congé du roi, s’en retourna dans la forêt
de Kelyddon, auprès de l’ermite Blaise à qui il dicta le récit des événements
qu’il venait de vivre. Quant à Emrys, il gouverna le royaume avec beaucoup
d’habileté, rétablissant partout les habitants dans leurs droits et leurs
biens, et faisant respecter la justice.
Cependant, après de longs mois d’absence, Merlin revint à la
cour du roi et demanda à lui parler. « Te souviens-tu, dit-il, des Saxons
que tu as chassés de cette île ? En revenant dans leur pays, ils ont
appris à leurs compatriotes la mort de Hengist. Or Hengist appartenait à une
famille très noble et très puissante. Lorsque ses parents ont su ce qui lui
était arrivé et comment les Saxons avaient été obligés de s’enfuir, ils se sont
concertés et ont juré de venger la mort de Hengist et l’affront que tu as
infligé aux leurs. Et, ce faisant, ils espèrent également s’emparer de ton
royaume et réussir là où les autres ont échoué. » Le roi fut fort surpris
de cette nouvelle. « Je trouve qu’ils sont bien audacieux. Nous sommes sur
nos gardes et nos forteresses peuvent résister à tous les assauts. D’ailleurs,
je doute que les Saxons aient de nombreuses troupes à nous opposer. »
Merlin répondit gravement : « Ne crois pas cela, roi Emrys. Pour un
combattant de cette île, ils sont capables d’en opposer deux, et si tu ne fais
pas preuve de grande sagesse, ils te tueront et s’empareront de ta
terre. » Le roi se plongea dans une longue méditation, puis il demanda à
Merlin s’il savait quand et comment les Saxons viendraient les attaquer.
« Oui, dit Merlin, je le sais. Ce sera le onzième jour
du mois de juillet, mais personne, dans ton royaume, ne le saura, sauf toi. Je
te demande en effet de garder le secret. Mais, en attendant, fais convoquer
tous tes hommes, riches et pauvres. Réserve-leur le meilleur accueil possible
et garde-les près de toi : ainsi seront-ils tous rassemblés et, le moment
venu, pourront-ils s’opposer à tes ennemis. Puis, vers la fin du mois de juin,
emmène-les tous, sous un prétexte quelconque, à l’entrée de la plaine de
Salisbury, sur les rives de la rivière. Car c’est par cette direction que les
Saxons voudront pénétrer au centre de cette île. » Emrys interrompit
Merlin : « Comment ? Nous laisserions les Saxons parcourir le
pays ? Je crois qu’il serait préférable de les attendre sur le rivage et
de les empêcher de débarquer. » Merlin reprit : « C’est pourtant
ainsi qu’il faut agir. Fais venir ton frère Uther, et je vous dirai comment
vous agirez tous les deux. »
Une fois Uther présent et mis dans le secret, Merlin parla
ainsi : « Lorsque les Saxons apparaîtront sur les côtes, vous vous
garderez bien de les empêcher de débarquer, et vous les laisserez pénétrer à
l’intérieur de l’île. Ils ne sauront pas que vos forces seront réunies en un
lieu précis et facile à défendre. Mais lorsqu’ils se seront engagés très avant
dans les terres, vous enverrez des troupes vers leurs navires afin de leur
couper toute retraite. Lorsqu’ils s’en apercevront, ils seront très effrayés,
car il sera trop tard pour qu’ils puissent redresser la situation. L’un de vous
deux ira alors avec ses troupes les harceler de si près qu’ils se verront
obligés de camper loin de la rivière. L’eau leur fera défaut, et même les plus
hardis craindront pour leur vie. Vous les tiendrez ainsi en respect pendant
deux jours et deux nuits, sans rien entreprendre contre eux. Le troisième jour,
ils seront très démoralisés, et c’est alors que vous livrerez bataille. Je peux
vous assurer que si vous agissez ainsi, vous obtiendrez la victoire. »
Les deux frères approuvèrent le plan proposé par Merlin.
« Mais, dirent-ils, peux-tu nous dire encore si nous mourrons dans
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