La Révolution et la Guerre d’Espagne
entier s’efforce
de décrire en Espagne les ravages d’une « révolution bolcheviste »,
inspirée par les communistes et « l’or de Moscou », le parti
communiste a pris, dès les premières heures, une position nettement affirmée en
faveur du maintien de l’ordre républicain, pour la défense de la propriété et
de la légalité. Tous les discours de ses dirigeants reprennent le même
thème : il ne s’agit pas, en Espagne, de révolution prolétarienne, mais de
lutte nationale et populaire contre l’Espagne semi-féodale et les fascistes
étrangers, en même temps que d’un épisode de la lutte qui oppose dans le monde
« les démocrates » à l’Allemagne et à l’Italie. Le parti communiste
condamne vigoureusement tout ce qui peut apparaître comme susceptible de briser
« l’unité de front » entre la classe ouvrière et les « autres
couches populaires ». Il se montre particulièrement soucieux de conserver
de bons rapports avec les dirigeants républicains et répète inlassablement ses
mots d’ordre de « respect du paysan, du petit industriel, et du petit
commerçant ». « Nous nous battons », proclame José Diaz,
« pour une république démocratique et parlementaire d’un type nouveau ».
Un tel régime suppose la « destruction des racines matérielles de l’Espagne
semi-féodale », « l’expropriation des grands propriétaires », la
destruction du « pouvoir économique et politique de l’Église », la
« liquidation du militarisme », la « désarticulation des grandes
oligarchies financières ». Or ces résultats, selon lui, sont déjà
atteints. La seule tâche du jour est donc de se battre : « Vaincre
Franco d’abord » est le mot d’ordre central des communistes. Pour y parvenir,
il faut consolider le « bloc national et populaire », renforcer l’autorité
du gouvernement de Front populaire : les communistes soutiennent le
gouvernement Companys contre le Comité central, la Junte de Martinez Barrio
contre le Comité exécutif populaire, les autorités légales contre les
« Comités irresponsables ». Ils défendent, depuis la première heure, la
nécessité de la constitution d’une armée régulière, soutiendront Giral,
précéderont Largo Caballero dans cette voie. José Diaz déclare à plusieurs
reprises que « se lancer dans des essais de socialisation et de
collectivisation... est absurde et équivaut à se faire les complices de l’ennemi
». Aussi, le parti communiste mène-t-il campagne acharnée contre tous ceux qui
parlent de poursuivre la révolution. « Nous ne pourrons faire la
révolution si nous ne gagnons pas la guerre, déclare José Diaz... Ce qu’il
faut, c’est d’abord gagner la guerre.» Aussi, dans le camp républicain,
dirige-t-il tous ses coups à sa gauche, contre les révolutionnaires. « Les
ennemis du peuple sont les fascistes, les trotskystes et les incontrôlables »,
affirme José Diaz, dans le même discours, et les propagandistes du P.C., s’appuyant
sur les procès de Moscou, reprennent inlassablement le thème
anti-trotskyste : « Le trotskysme n’est pas un parti politique, mais
une bande d’éléments contre-révolutionnaires. Le fascisme, le trotskysme et les
incontrôlables sont les trois ennemis du peuple qui doivent être éliminés de la
vie politique, non seulement en Espagne, mais dans tous les pays civilisés.»
Franz Borkenau a montré les conséquences d’une ligne politique qui entraînait
les organisations communistes « staliniennes », au-delà de l’organisation
de la lutte contre Franco, vers une lutte ouvertement dirigée contre la
révolution en Espagne même, au nom de son inopportunité : « Les
communistes ne s’opposèrent pas seulement à la marée des socialisations, ils s’opposèrent
à presque toute forme de socialisation. Ils ne s’opposèrent pas seulement à la
collectivisation des lopins paysans, ils s’opposèrent avec succès à toute
politique déterminée de distribution des terres des grands propriétaires
terriens. Ils ne s’opposèrent pas seulement, et à juste titre, aux idées
puériles de l’abolition locale de l’argent, ils s’opposèrent au contrôle de l’État
sur les marchés... Ils ont non seulement tenté d’organiser une police active,
mais montré une préférence délibérée pour les forces de police de l’ancien
régime tellement haïes par les masses. Ils ont non seulement brisé le pouvoir
des Comités, mais
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