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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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l’insurrection.
C’est Enrique Castro Delgado, délégué par le bureau politique, et secondé par
le commandant Carlos, qui est chargé de sa mise sur pied. Ils constituent, dans
chaque bataillon, les « Compagnies d’acier » formées en majorité de
militants communistes, font appel systématiquement aux officiers et
sous-officiers de réserve ou de carrière. Avec l’aide russe, le 5 ème régiment se développe avec une rapidité foudroyante. Il est équipé, entraîné,
encadré. Le gouvernement le favorise parce qu’il est un modèle de discipline :
il a remis en vigueur toutes les pratiques des unités régulières, le salut, les
galons, les grades.
    Des officiers de carrière engagés dans d’autres colonnes
demandent à rejoindre cette unité où ils retrouvent les conditions de service
qui sont, à leurs yeux, normales. Le 5 ème régiment a un orchestre,
une chorale, un quotidien, Milicia popular. Il a bientôt sa légende. A
la fin de septembre, il groupe 30 000 hommes. Il va devenir le 5 ème corps, comptant plus de 100 000 hommes, et encadrera finalement la plus
grande partie de l’armée du Centre.
    C’est dans le 5 ème régiment qu’apparaît pour la
première fois le vocable de « commissaire » : en effet, son
développement, aux yeux des dirigeants du P.C., ne doit pas échapper à l’appareil
du Parti. Le commissaire maintient dans ces unités régulières la discipline
politique d’un parti, le contrôle sur les techniciens, l’animation du moral des
hommes. Et le parti communiste saura utiliser son expérience du commissariat
pour étendre son influence dans l’armée. Il est la seule organisation à avoir
véritablement compris les possibilités qu’offre le corps des commissaires à un
parti actif. Grâce à la protection du commissaire général, Alvarez del Vayo,
ils arrivent littéralement à coloniser le commissariat pendant sa première
année d’existence [208] .
Grâce à lui, ils peuvent diffuser leurs mots d’ordre parmi les troupes et les
principaux thèmes de leur propagande : démocratie, patriotisme,
discipline. Alors que les commissaires politiques de l’armée rouge avaient été
les propagandistes de la révolution et du socialisme, ces deux mots seront
bannis du vocabulaire des commissaires espagnols dont, par la volonté du P.C.,
l’une des raisons d’être sera précisément de lutter dans l’armée contre tous
ceux pour qui la révolution immédiate est encore une tâche aussi importante que
la guerre.
    Les communistes staliniens, devenus intouchables depuis la
livraison des armes russes, défenseurs conséquents du programme antifasciste de
restauration de l’État, organisateurs de l’Armée, deviennent ainsi les éléments
les plus dynamiques de la coalition gouvernementale. Azaña, Companys, Prieto,
Largo Caballero lui-même, leur montrent la même confiance, leur accordent l’appui
qu’ils reprocheront plus tard à un Del Vayo de leur avoir accordé. Leur
position se renforce tous les jours, non seulement dans l’opinion publique,
mais peut-être plus encore dans l’appareil d’État. Nous venons de voir la place
qu’ils occupent dans les cadres politiques et militaires de l’armée populaire.
Ce sont également des communistes qui contrôlent les services de la censure et
du chiffre. Leurs hommes, Burillo à Madrid, Rodriguez Salas à Barcelone,
détiennent les postes-clés de la nouvelle police. Leur cohésion et leur
discipline posent désormais un problème : ne constituent-ils pas, déjà, un État
dans l’État ?
    Quelques incidents sérieux montrent qu’ils sont décidés à utiliser
leurs positions à des fins que ne justifie pas le souci, si souvent affirmé, de
l’unité de front et de l’intérêt général et – ce qui est plus grave encore – qu’ils
entrent dans cette voie sur les indications du gouvernement russe. Lorsque se
constitue à Madrid la Junte de défense, malgré la décision prise d’y
représenter tous les partis, le parti communiste oppose un veto absolu à la
présence du P.O.U.M. qualifié de « trotskyste » et d’ « ennemi de l’Union
soviétique » [209] . La Batalla proteste et porte le conflit au grand jour : « Ce qui
intéresse réellement Staline, écrit-elle le 15 novembre, ce n’est pas le sort
du prolétariat espagnol et international, mais la défense du gouvernement
soviétique suivant la politique des pactes établis par certains États contre d’autres. »
Le 28

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