La Révolution et la Guerre d’Espagne
basques résolument
conservateurs. Les capitalistes soutiennent volontiers de leurs subsides un
parti anti-socialiste qui a su organiser, contre l’U.G.T. et les syndicats
acquis à l’idéologie de lutte de classes, des syndicats catholiques «
jaunes », les « Solidarités d’ouvriers basques », et qui leur paraît
un solide rempart défendant à la fois l’Église et les classes possédantes. Le
développement industriel de la Biscaye, toujours soumis pourtant à l’incompétence
et la corruption de l’État oligarchique, a augmenté encore dans les premières
années du siècle l’attrait de l’idéal nationaliste déjà solidement enraciné
dans les traditions séculaires d’un peuple incontestablement original et fier
de l’être.
Sous la République, les nationalistes basques ont, tout
naturellement, fait alliance avec la droite et les partis conservateurs et
réactionnaires. Mais, en novembre 1933, la majorité de droite ayant repoussé le
statut d’autonomie prévu pour le Pays basque, le parti se trouve rejeté dans l’opposition
et dans une alliance de fait avec les républicains de gauche et les
socialistes.
C’est un phénomène semblable qui s’est produit en Catalogne.
Ici aussi, l’autonomisme catalan s’est nourri de la révolution industrielle et
du conflit avec l’oligarchie agrarienne rétrograde. La grande bourgeoisie,
certes, est restée prudente : elle a besoin du marché espagnol et de l’appui du
gouvernement central contre un prolétariat remuant. Ses chefs, Cambo et ses
amis de la Lliga, sont plus oligarques que catalans. Mais la petite
bourgeoisie n’a pas les mêmes raisons de se montrer aussi prudente, à partir du
moment où il est clair que le catalanisme n’a de chances de triompher que s’il
jouit de l’appui des ouvriers et des paysans. Aussi son parti, l’ Esquerra
catalane, est un parti de masses, né en avril 1931 de la fusion de
différents partis et groupements républicains de Catalogne : il s’appuie
sur le puissant mouvement syndical paysan qu’est l’ « Union des
rabassaires ». Son Inspirateur et animateur, Lhuis Companys, lié,
autrefois à Salvador Segui, a été longtemps l’avocat de la C.N.T. avec qui il
conserve des contacts étroits. La République a été proclamée à Barcelone avant
Madrid, en 1931, et, dès le 15 septembre de cette année, a été voté le statut d’autonomie
de la généralité de Catalogne. Mais, en 1934, le statut d’autonomie a été
suspendu, car les autonomistes, inquiets, ont déclenché et manqué un
soulèvement contre la droite. Les autonomistes catalans se retrouvent dans les
prisons avec les militants ouvriers.
Les républicains bourgeois
Dans le reste de l’Espagne, sauf quelques villes et les
riches plaines irriguées du Levante, il n’y a nulle part de base véritable pour
des partis républicains bourgeois. Le Parti radical d’Alejandro Lerroux a
représenté les aspirations de la petite bourgeoisie hostile à l’Armée et à l’Église,
incarné son désir de voir se créer une Espagne nouvelle, libérée des entraves
de l’époque féodale, ouvrant la voie à une expansion capitaliste créatrice. Mais,
effrayés par l’agitation ouvrière et paysanne, les radicaux ont reflué très
vite et choisi, en 1933, par peur de la révolution, l’alliance avec la C.E.D.A ., avec qui ils ont partagé les responsabilités gouvernementales. Le parti de
Lerroux sombre dans le plus total discrédit à la suite d’un scandale financier
en 1935 [26] .
Une partie de son état-major, derrière Martinez Barrio, fils d’ouvrier et
dignitaire de la franc-maçonnerie, rejoint à ce moment-là les « républicains de
gauche » de Manuel Azaña, dont ils ne sont séparés que par des nuances.
Président du Conseil en octobre 31 jusqu’à la victoire de la
droite aux élections de 1933, président de la République en 1936, Azaña, pour l’histoire,
incarne les républicains espagnols. Né à Alcala de Henarès en 1880, d’une
famille aisée, brillant élève du Collège augustinien de l’Escorial, ce qui ne l’empêche
pas, au contraire, d’être très tôt un ardent anticlérical, il a longtemps été
plus attiré par la littérature que par la politique. Président de l’ « Athénée
» de Madrid, il joue un rôle important dans l’opposition républicaine à la fin
de la monarchie et s’impose très vite dans les Cortes, à la tête du groupe des
députés de l’ « Action
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