La Révolution et la Guerre d’Espagne
par les gardes, sont déjà
prisonniers quand arrivent les Navarrais [405] .
Après la chute de Gijón, le front Nord n’existe plus. Toute
résistance n’a cependant pas cessé [406] .
Les opérations de nettoyage dureront ici beaucoup plus longtemps qu’en Biscaye
ou dans la province de Santander, et Franco ne pourra, par conséquent, déplacer
tout de suite la totalité des troupes engagées ici vers le front central. La
conquête du Nord n’a été en définitive qu’une étape dans la guerre.
Belchite
Cependant, elle représente pour les rebelles leur première
grande victoire depuis que la bataille a changé d’aspect devant Madrid. Elle
est doublement importante. Economiquement, elle livre à Franco des provinces
espagnoles parmi les plus importantes, les seules en tout cas où les
républicains auraient pu installer une industrie de guerre ; elle procure
ce produit d’échange essentiel qu’est le minerai de fer. Militairement, elle n’a
pas seulement montré la supériorité de l’armée nationaliste sur des combattants
basques et asturiens divisés et mal armés, elle a prouvé qu’à ce moment au
moins, l’armée de Valence et de Madrid est incapable d’interrompre efficacement
une offensive nationaliste. Brunete n’a été qu’un demi-succès ; la
deuxième tentative importante, celle de Belchite, est un échec total.
Le choix de Belchite se justifie par des considérations
exactement opposées à celles de Brunete. Le front n’y a subi aucune réorganisation.
Les soldats, dit Rojo, « sont plus chasseurs que combattants », ce
qui signifie qu’ils agissent par petits groupes isolés ou reliés au reste du
front par des observatoires. Mais les combattants adverses ne sont pas mieux
lotis. Il apparaît donc facile de rompre la ligne an front. D’autre part, la
manœuvre peut prendre plus d’ampleur avec des effectifs relativement
restreints. Les objectifs sont les suivants : prendre Saragosse par une
triple attaque sur Zuera, au nord de l’Ebre, directement sur Saragosse, et au
sud pour réduire la poche dessinée par le front entre Quinto et Belchite. En
même temps, le commandement républicain espère évidemment obliger les
nationalistes a suspendre leur offensive dans le Nord.
Mais l’offensive commencera très tard, le 29 août, plusieurs
jours après la prise de Santander. Il a fallu transporter la plupart des
troupes engagées jusqu’au secteur d’attaque, ce qui s’est fait par de mauvaises
routes, au milieu de la plus vaste confusion [407] .
Enfin l’incapacité manœuvrière des troupes républicaines est amplement
démontrée une nouvelle fois. Un seul succès : la prise de Qumto et de
Belchite ; encore faut-il douze jours pour faire tomber Belchite. Les
grandes ambitions de l’offensive sur Saragosse sont abandonnées après une tentative
infructueuse au nord de l’Ebre. Belchite est un échec, parce qu’aucun des
objectifs essentiels n’a été atteint. La conquête du Nord par les nationalistes
n’en a pas été retardée d’une journée.
Désormais deux Espagnes s’opposent nettement sur la carte.
Les franquistes dominent toute la partie ouest et nord-ouest du pays ;
leurs territoires ne forment plus qu’un seul bloc, de la Galice à l’Aragon, de
Gibraltar au golfe de Gascogne.
L’évolution politique en Espagne nationaliste
La conquête du Nord ne donne pas seulement aux nationalistes
des avantages économiques et stratégiques. Elle est une assurance pour les
États étrangers que le Movimiento ne peut être vaincu par les armes.
Elle affirme la supériorité militaire de Franco au moment où il devient, aux
yeux de tous, dans l’Espagne rebelle, le chef incontesté de la
« Croisade ».
La domination de l’armée a immédiatement imposé l’« ordre »
par la crainte. Néanmoins, la situation politique est restée singulièrement
confuse en zone nationaliste pendant les premiers mois. Pendant cette période,
en effet, et jusqu’en octobre 36, les chefs de la rébellion n’ont pas estimé qu’une
organisation politique était nécessaire dans cette zone. Ils consacrent tous
leurs efforts à la poursuite d’une guerre dont ils pensent qu’elle sera brève.
Ils se contentent d’assurer leurs arrières par des mesures énergiques.
Ainsi ils ne peuvent laisser et ne laissent plus subsister
aucun parti d’opposition. La proclamation de l’état de siège a mis entre les
mains des autorités militaires les moyens de briser
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