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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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comme une illusion et une duperie. La
révolution russe fascinait les militants. Finalement, après deux décisions
contradictoires prises par deux Congrès extraordinaires et l’envoi à Moscou de
deux délégués dont les opinions divergèrent, un troisième Congrès
extraordinaire décida, par 8 880 voix contre 6 025, de repousser les 21
conditions d’adhésion à la III e Internationale. Mora et Garcia
Quejido, les fondateurs de l’U.G.T., et Daniel Anguiano, retour de Moscou,
rompirent alors avec l’organisation et entraînèrent presque la moitié des
militants pour former, avec Andrès Nin, Maurin et les autres éléments de la
C.N.T. convertis au communisme, le parti communiste espagnol.

Du réformisme à la
révolution ?
    Une nouvelle crise secoue le parti socialiste sous la
dictature de Primo de Rivera. Le général, qui cherche un appui dans le
mouvement ouvrier, offre aux socialistes de collaborer avec lui. Ce sera l’occasion
du premier conflit important entre les dirigeants de la nouvelle génération
socialiste. Largo Caballero, secrétaire de l’U.G.T., Madrilène de tempérament
et de formation « autoritaire », l’emporte sur le libéral Prieto, dirigeant
socialiste de Bilbao, plus lié aux milieux républicains. La
« collaboration » est décidée : Largo Caballero devient
conseiller d’État et s’efforce, par le canal des commissions paritaires d’arbitrage,
d’élargir l’influence et les bases de l’U.G.T. au détriment de la C.N.T.
durement persécutée.
    Pendant les deux premières années de la République, à l’exemple
des partis socialistes occidentaux, les socialistes espagnols collaborent au
gouvernement avec les républicains. Largo Caballero est ministre du Travail
dans un gouvernement Azaña qui n’hésite pas à poursuivre les militants de la
C.N.T. Pourtant, pendant cette période, profitant de la plus grande liberté de
propagande et d’organisation syndicales, bénéficiant de l’éveil à la vie
politique et syndicale de nouvelles couches de travailleurs, l’U . G.T. se
renforce considérablement. En 1934, elle compte un peu plus de 1 250 000
adhérents, dont 300 000 ouvriers d’usine, des mines, des chemins de fer.
    Après la victoire de la droite aux élections de 1933, les
socialistes semblent tourner le dos à leur attitude réformiste traditionnelle
de sociaux-démocrates: l’insurrection d’octobre 1934 souligne ce tournant radical
vers des positions nettement révolutionnaires.

Largo Caballero et l’alliance
ouvrière
    Par un curieux retournement, l’inspirateur de la tendance «
gauche » du parti socialiste, l’un des responsables de son évolution, est
le secrétaire de l’U.G.T., Largo Caballero, jusque-là pilier du réformisme.
    Né dans une famille ouvrière misérable, en 1869, à Madrid,
Francisco Largo Caballero a dû gagner sa vie dès l’âge de 8 ans : il n’apprendra
à lire qu’à 24 ans passés. Ouvrier plâtrier, il adhère à l’U.G.T. en 1890, au
parti socialiste en 1894 et occupe vite d’importantes responsabilités dans les
deux organisations. Condamné à mort, puis au bagne à vie après la grève de
1917, il est amnistié en 1918 après son élection aux Cortes comme député :
Adversaire résolu de l’adhésion à la III e Internationale et
violemment hostile au communisme, c’est lui qui entraînera l’adhésion du parti
socialiste espagnol à la II e Internationale reconstituée. Conseiller
d’État sous Primo de Rivera, ministre du Travail dans le gouvernement
républicain d’Azaña, il a été le champion de la collaboration des syndicalistes
et des socialistes avec l’État, le chef de file du réformisme le plus ouvert.
Pourtant, en février 1934, il n’hésite pas à affirmer : « Le seul espoir
des masses est aujourd’hui une révolution sociale. »
    C’est que son expérience ministérielle l’a profondément
déçu. Le premier des socialistes, il s’est heurté à Azaña : le personnel du
ministère, les hauts fonctionnaires ont ouvertement saboté ses directives,
tournant en dérision ses projets de réformes. Il en conclut que le réformisme
mène le mouvement ouvrier dans une impasse. « Il est impossible, dit-il, de
réaliser une parcelle de socialisme dans le cadre de la démocratie bourgeoise.
» Il ne lui reste plus, dès lors, qu’à chercher une autre voie [42] .
    Le premier résultat pratique de cette nouvelle orientation
est, dès 1934, l’organisation, sous son impulsion,

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