La Révolution et la Guerre d’Espagne
charitables,
utilisant les bonnes volontés et les fonds privés. Le fonds de protection benefico-social est alimenté par les bénéfices réalisés au cours de la journée du plat
unique, le produit des quêtes publiques autorisées par l’État et enfin, mais en
dernier lieu, par des fonds accordés par l’État.
Pour ce qui est de la justice sociale, de la participation
aux bénéfices et des autres promesses du Fllero dei Trabajo, elles n’ont
pas encore reçu, en 1939, le moindre début d’application. Le seul effort
sérieux qui ait été fait consiste dans la création du subsidio familiar, allocation
familiale versée au chef de famille sur les fonds d’une caisse alimentée par
des cotisations ouvrières et patronales. Il s’agit bien, certes, d’une de ces
mesures « sociales » prônées par la Phalange, mais cette aide
apportée à la famille traduit surtout l’influence considérable de l’Église
catholique.
L’Église et l’État nouveau
« La seule chose qui soit peut-être certaine dans l’état
actuel des choses, dit Stöhrer en mai 38, c’est que sous le présent régime, l’influence
de l’Église catholique s’est fortement accrue en Espagne nationaliste. »
Nous avons déjà souligné qu’une grande partie des prêtres
espagnols a approuvé et soutenu la rébellion depuis le début. Le cardinal
Segura, dont les démêlés avec la Phalange prendront ultérieurement un cours
très violent – il sera même amené à quitter pour un temps le territoire
espagnol -, avait combattu le Front populaire. Le cardinal Goma y Tomas tente
de convaincre l’épiscopat français de la sainteté de la « Croisade ».
Dès le 15 août 36, le cardinal Ilundain préside, aux côtés de Queipo, une
cérémonie officielle. De moindres personnalités religieuses prennent, dans
leurs prêches, des positions très violentes. Bahamonde cite le sermon d’un
prêtre de Rota : « Il faut balayer toute cette pourriture… Je vous
avertis : Tout le monde à la messe ! Je n’admets pas d’excuse ! ».
Georges Bernanos a témoigné que l’obligation d’assister à la messe est appuyée,
du moins dans les premiers mois de la guerre, par de sérieuses menaces. Il faut
toutefois signaler que certains prêtres ont eu le courage de protester contre
les exécutions massives, au risque d’être à leur tour victimes de paseos : Bahamonde cite le cas d’un prêtre de Carmona, tué pour avoir protesté
contre les crimes de la Phalange.
L’influence de l’Église, en tout cas, ne cessera de croître.
Une des raisons qui ont incité plusieurs chefs monarchistes à se rallier au
nouveau régime – entre autres Rodezno, qui devient ministre de la Justice – est
à coup sûr l’alliance du gouvernement nationaliste avec le Vatican, qu’accompagne
l’abolition des mesures laïques prises par les républicains : c’est ainsi
que la législation sur le divorce est supprimée, le décret du 2 mars 38 n’autorisent
que l’examen « des demandes concernant les dispositions préventives de séparation
des conjoints ».
La mesure qui, à cet égard, a produit le plus d’effet est le
décret du 3 mai 38 autorisant le retour des Jésuites en Espagne. Ce geste n’est
pas présenté comme un geste de faveur vis-à-vis de l’Église catholique, mais
comme une réparation. Pour le gouvernement, deux motifs le justifient : d’abord,
c’est un ordre « éminemment espagnol » et il est normal au moment où
se retrouve l’« Hispanité », que la Compagnie de Jésus recouvre ses
droits et ses biens. Cela fait partie du retour à la tradition. L’autre raison
est « l’énorme apport culturel » des Jésuites au pays. Au moment où
il faut briser l’influence des intellectuels marxistes les Jésuites
contribueront naturellement à refaire de l’Espagne un pays uni dans la
catholicité. Leur rôle, en tout cas, sera discuté : Bahamonde en fait
« les plus violents instigateurs de la répression ».
L’Église est partout présente dans l’État nouveau dans l’armée,
d’abord où les aumôneries militaires sont rétablies dès la fin de 36 ; un
décret de mai 37 achèvera l’organisation de l’« assistance spirituelle
catholique dans les unités de guerre », sous la direction du
cardinal-archevêque de Tolède, délégué pontifical. Le personnel en sera recruté
parmi les prêtres mobilisés.
L’Église et l’Enseignement
Mais c’est dans le domaine de
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