La Révolution et la Guerre d’Espagne
l’enseignement que l’action du
clergé se fait le plus sentir, surtout après 38, lorsque Franco fait appel à
Sainz Rodriguez comme ministre de l’Education nationale. Suñer, pourtant
fervent catholique, dit que le nouveau ministre a été « le législateur le
plus vaticaniste que l’Espagne ait connu ». Le personnel enseignant laïque
a été généralement fidèle à la République : à plusieurs reprises, le
gouvernement de Franco a dû fermer, faute de personnel, des Instituts
secondaires ; ainsi, en 37, sont fermés à titre provisoire les Instituts
nationaux de Santander, Merida et Talavera : les locaux sont généralement
occupés ensuite par l’armée. Quand le personnel existe, il ne saurait être
intégré qu’avec de grandes précautions. Les professeurs qui ont été maintenus
dans leur poste par les commissions d’épuration sont considérés comme ayant
néanmoins besoin d’une direction et d’une formation nouvelles. Aussi
organise-t-on pendant l’été des cours spéciaux à leur usage dans toutes les
capitales de province. La première semaine, ils écouteront des conférences sur
la religion, la patrie, l’homme et le maître : au cours de la deuxième
semaine les thèses traités sont classés dans les rubriques :
« Pédagogie de la religion », « Histoire de la Patrie »
« l’Enfant », « l’Ecole ». Les conférenciers chargés des
cours sur la religion sont désignés par l’évêque. Les titres des leçons sont
significatifs : la première sera consacrée à démontrer « la
supériorité de la religion chrétienne sur les religions de type
oriental ». Une autre leçon portera sur « la conception catholique du
maître, sel on l’encyclique de Pie XI ». Les concessions au modernisme qui
permettent de parler de « psychologie » et de
« psychopathologie » ne doivent pas faire oublier l’intervention
constante et essentielle de l’Église dans la formation scalaire.
L’instruction religieuse est rendue obligatoire dans l’enseignement
primaire comme dans le secondaire. Seuls en sont dispensés les « indigènes
du protectorat du Maroc et des colonies africaines » qu’il convient de ne
pas choquer par un prosélytisme maladroit. Partout ailleurs et pour tous les
autres, l’instruction religieuse va de simples notions de catéchisme et d’histoire
sainte dans les premières années à des leçons plus compliquées d’explication
« large » du dogme catholique. On termine, dans la 5 e année
d’études secondaires, par des « notions d’apologétique ».
En dehors même de ces leçons, la religion est toujours
présente. Ainsi on exige, dans les écoles, le respect des « règles de dévotion
à la Vierge Marie » : un décret d’avril 37 oblige les maîtres à
placer dans leur salle de classe une image de la Vierge, « de préférence
sous l’invocation très espagnole de l’Immaculée Conception », de telle
manière que les élèves, à l’entrée et à la sortie, puissent la voir en
échangeant avec leur maître les phrases rituelles : « Ave Maria
purissima, sin pecado concebida… » De plus, une invocation
particulière est renouvelée chaque jour, pendant la durée de la guerre. Bien
entendu, il s’agit, selon le législateur, d’un retour aux traditions d’« esprit
populaire ». Mais en réalité, c’est une orientation bien définie de l’enseignement,
destiné à former un citoyen qui soit en même temps un catholique pratiquant.
Dès l’école primaire, il faut, selon les instructions
officielles, « que toute l’ambiance scolaire subisse l’influence de la
doctrine catholique ». Les manifestations purement religieuses s’y
multiplient : une ordonnance de février 38 donne congé pour la fête de
saint Thomas d’Aquin, organise une cérémonie commémorative « pour
perpétuer dans l’esprit des générations d’élèves ce modèle de sainteté ».
Toutes les autorités académiques y assistent, et les étudiants sont représentés
par le S. E. U. De même, obligation est faite de placer le « saint Crucifix »
dans les Instituts d’enseignement moyen et les Universités. Tout doit proclamer
la transformation radicale : l’Ecole laïque est celle d’un « régime
soviétique », l’enseignement « national » doit être chrétien et
c’est l’enseignement de la « fraternité sociale » telle que la
proclame l’Église qui doit faire disparaître
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