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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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réalité,
pourtant, les militants montrent beaucoup d’attachement à ces organismes qu’ils
ont eux-mêmes bâtis et se regimberont, pour les défendre, contre les consignes
mêmes de leurs propres dirigeants. Aussi la dissolution des Comités ne se
fera-t-elle jamais brutalement. Partis et syndicats multiplient les
arguments : il s’agit de faire admettre aux militants que les Comités,
utiles dans la période révolutionnaire, sont désormais dépassés. Claridad ,par exemple, écrit : « Nous pouvons affirmer que tous ces organes
ont fini d’accomplir la mission pour laquelle ils avaient été créés. Ils ne
peuvent plus être, désormais, que des obstacles à un travail qui revient
uniquement et exclusivement au gouvernement de Front populaire auquel
participent, en pleine responsabilité, toutes les organisations politiques et
syndicales du pays. »
    En Catalogne, Comorera, leader du P.S.U.C., a fait de leur
dissolution la tâche première de la coalition antifasciste : « L’autorité
légitime, affirme-t-il, doit pouvoir s’imposer à l’encontre de la dictature
irresponsable des Comités.» Leur disparition, nous l’avons vu, a été rendue
possible par la bonne volonté de la C.N.T. et du P.O.U.M., après la dissolution
du Comité central. A Valence, le Comité exécutif populaire résistera plus
longtemps, soutenu par le P.O.U.M. et une fraction de la C.N.T. Juan Peiro se
fait chahuter le 27 novembre au théâtre Apollo quand il affirme :
« A Valence, le gouvernement donne un ordre et alors les consignes des
Comités se mettent en travers. Ou c’est le gouvernement, ou ce sont les Comités
qui gouvernent ! » En dépit des interruptions, il martèle : « Ce ne
sont pas les Comités. Ce qu’il faut, c’est qu’ils soient les auxiliaires du
gouvernement » [183] .
    Caballero saura éviter les heurts : il nomme gouverneurs ou
maires les dirigeants mêmes des Comités-gouvernement, substitue aux organismes
révolutionnaires des organismes réguliers, composés parfois des mêmes hommes,
peu différents en apparence, mais, en réalité, moins soumis à l’influence de la
base et plus aisément contrôlables par lui. Il laisse subsister certains
organismes après les avoir « doublés » et dépouillés de leurs
attributions. A Valence, après le départ du colonel Arin et de Juan Lopez, le
Comité exécutif populaire n’est plus qu’une simple façade, le jour où le
populaire député socialiste et dirigeant de l’U.G.T. Ricardo Zabalza est nommé
gouverneur. A Santander, Juan Ruiz, à Gijon, Belarmino Tomas et, en Aragon,
Joaquin Ascaso deviennent « délégués du gouvernement ». Pour réduire le Comité
de salut public de Malaga, il suffira de muter à Guadalajara le gouverneur
Rodriguez, son ancien président, et de le remplacer par un nouveau, moins lié
aux organismes révolutionnaires.
    Sur le plan local, les Comités-gouvernement s’effacent
devant les Ayuntamientos, conseils municipaux composés, eux aussi, de
représentants des différents partis et syndicats, et mis en place après un
décret du 31 décembre sur la réforme municipale. La différence, minime en
apparence, est en réalité considérable. D’une part, le système paritaire de
représentation avantage les communistes officiels représentés par le canal de
plusieurs organisations : P.C.E. ou P.S.U.C., U.G.T., surtout en Catalogne,
J.S.U. partout [184] .
Surtout l’initiative ne vient plus d’en bas : même là où, parmi les
travailleurs, ils détiennent la majorité, les anarchistes, sans la masse armée
qui leur permettait toutes les pressions au temps des Comités, se retrouvent en
minorité dans les conseils municipaux. Enfin le maire, l’
« alcalde », est choisi par le gouverneur civil : le
gouvernement dispose en lui d’un agent direct qu’il n’avait pas au sein des
Comités. D’ailleurs, le souci de ménager les susceptibilités, un adroit dosage
des nominations, apaisent bien des récriminations [185] . Valence n’a
plus son Comité exécutif populaire, mais un gouverneur socialiste de gauche et
un maire de la C.N.T. Peu de militants, à la C.N.T. comme à l’U.G.T., semblent
avoir pris conscience de l’arme que constituerait contre eux, éventuellement,
une telle organisation municipale entre les mains d’un gouvernement qui ne
serait pas présidé par Largo Caballero. Rares sont ceux, aussi, qui ont perçu
le paradoxe qu’il y avait à promulguer une réforme municipale

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