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L'abandon de la mésange

L'abandon de la mésange

Titel: L'abandon de la mésange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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et son courage, puis entra dans l’établissement.
    – Hé ! C’est une taverne, icite. Pas
de femmes !
    Elle ignora le propriétaire, tout comme les
clients qui la sommaient de partir.
    – Hé ! le Français, sors ta femme d’ icite.
    Côme leva la tête et vit qu’Élise se tenait
devant lui.
    – Je te jure, Élise, que mon père est
tombé sur la tête. Il est maladivement jaloux de ma réussite.
    Il avait un air si misérable qu’Élise lui posa
une main sur l’épaule.
    – Raconte-moi ce qui est arrivé à maman.
    Élise allait s’asseoir lorsque le propriétaire
lui enjoignit de ne pas le faire. Côme haussa le ton à son tour.
    – Ma femme est ici pour me raconter la
mort de ma mère. Est-ce que vous le saviez, que ma mère est morte ?
    – Pour le savoir, on le sait, rétorqua un
client. Tu le sais b’en que mon père c’est l’entrepreneur qui la garde au frais
pour l’empêcher d’empester.
    En moins de deux, Côme se jeta sur le client
pour le tabasser. Élise et le propriétaire les séparèrent. Elle prit alors son
mari par la main, puis le laissa aussitôt et sortit à toute vitesse. Lorsque
Côme rentra chez lui, sa valise avait été déplacée et posée au pied de
l’escalier.
    Il erra toute la soirée et toute la nuit avant
de se résigner à rentrer sous le toit paternel. Son père était assis sur les
marches extérieures, regardant le lever du soleil.
    – C’est presque une torture de voir que
la vie continue, indifférente au départ de ta mère.
    – De quoi est-elle morte ?
    – Probablement d’une thrombose. En tout
cas, le docteur dit qu’elle n’a pas souffert. J’ai pris ça sur mes épaules, la
souffrance.
    – J’ai pensé venir te tenir compagnie. Je
ne voudrais pas que tu sois seul.
    – Tu peux t’installer ici jusqu’à
l’enterrement. Après ça, on verra.
    – Après, je rentre à la maison, papa. Les
visiteurs seront partis. Je ne sais ce qu’Élise s’invente.
    – Tu le fais exprès, Côme, ou t’es un
parfait innocent ?
    Ne sachant comment interpréter le mot
« innocent », Côme préféra ne pas répondre. Il porta sa valise dans
sa chambre, puis entra dans celle de ses parents. La présence et le parfum de
sa mère flottaient encore dans l’air et il se permit de pleurer, silencieusement.
     
    * * *
     
    Jamais Élise n’avait pensé qu’elle pourrait
vivre une pareille situation. Un mari qui lui mentait alors qu’il disait
l’aimer. Heureusement, personne ne l’accabla. Le temps pressant, le corps
d’Amélie Vandersmissen ne fut exposé qu’un seul jour et les funérailles furent
chantées par la chorale du village, qui avait plus de cœur au ventre que de
cordes dans le larynx. Élise s’était assise entre son beau-père et sa mère,
laissant Côme de l’autre côté de la nef, avec Paul et Micheline. Après
l’enterrement, M. Vandersmissen, l’air toujours aussi lugubre, invita une
trentaine de personnes à prendre une bouchée à la maison.
    – Amélie nous a fait de la bonne
ratatouille la semaine dernière et j’ai décidé de sortir ses derniers pâtés du
congélateur pour les partager avec vous.
    Personne n’osant refuser, ils se dirigèrent
tous vers la ferme, Élise et sa mère dans la voiture du veuf, Paul et Micheline
dans celle de Côme. À la surprise générale, Côme repartit aussitôt après les
avoir déposés, ce qui eut l’effet d’un vent glacial. Élise rejoignit
Jacqueline.
    – Mon pardon vient de se noyer. Je le
quitte, Jacqueline.
    – On ne quitte pas un homme parce qu’il a
fait une erreur.
    – Non… mais je le quitte parce que moi,
j’ai fait une erreur.
    – Quelle erreur ? C’est un homme extraordinaire :
travailleur, fiable, généreux… Qu’est-ce que tu voudrais de plus ?
    Dans la maison, la famille combla le vide par
d’innombrables attentions et les invités mirent l’absence des jeunes sur le
compte du chagrin.
    – Tu vas pas partir comme ça, Élise ?
    – Pourquoi pas ? S’il y en a une qui
devrait me comprendre, c’est bien toi…
    – C’est certain, mais laisse-lui le temps
de s’expliquer.
    Élise lui jeta un regard plus froid qu’elle
n’aurait voulu.
    – Mais, Jacqueline, il y a rien à
expliquer. C’est moi qui ai les cornes, pas mon mari…
    En disant cela, elle fut prise d’un fou rire
nerveux.
    – Ça m’apprendra, aussi, à vivre à la
campagne…
    Elle continua de rire jusqu’à ce que son rire
se change en pleurs. Un

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