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Le Cercle du Phénix

Le Cercle du Phénix

Titel: Le Cercle du Phénix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Carolyn Grey
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songea que ce spectacle bruyant et coloré aurait enchanté Laura. La vie
qu’il faisait égoïstement mener à la pauvre petite était en effet loin d’être
gaie. Privée de la compagnie d’enfants de son âge et de la présence d’une mère
qu’elle n’avait de toute façon jamais connue, elle était encore trop jeune pour
véritablement s’ennuyer, mais cela n’aurait su tarder.
    La façade du Tom’s cojfee house, ornée de lions d’or, l’emblème de la compagnie, et de
deux figures chinoises représentant les origines du thé, apparut sur sa droite.
Il faudrait qu’il envoie un domestique s’y approvisionner en thés fins avant de
retourner dans le Devon. Lui-même devait aller acheter des cadeaux à sa fille.
Peut-être ferait-il un saut chez Harrod’s, sur Brompton Road, à moins qu’il ne
décidât de se rendre à Lowther Arcade, le paradis des enfants avec sa profusion
de magasins de jouets.
    Julian essaya d’imaginer ce que Laura pouvait faire à
cet instant. Il n’aimait pas être séparé longtemps de sa fille, mais ses
parents (sa mère surtout), qui passaient la fin de l’année en France près de
Nice, avaient insisté pour emmener la petite quelques semaines avec eux. Julian
avait acquiescé de mauvaise grâce, d’autant que les relations tendues qu’il
entretenait avec son père depuis « l’affaire Aerith » l’empêchaient
de les accompagner.
    La voiture avait remonté Fleet Street puis Ludgate Hill,
et le lord fut ramené à la réalité par la vue du portique élancé de la
cathédrale Saint-Paul. Il se trouvait près de l’endroit où il avait rencontré
pour la première fois le garçon aux cheveux blancs. Malgré tous ses efforts
pour le chasser de son esprit, Julian avait souvent pensé à lui depuis leur dernière
rencontre, au point qu’il en arrivait à se demander s’il ne souhaitait pas
inconsciemment le revoir. Idée absurde, bien entendu.
    Le cœur de Julian battit plus vite. Une adresse venait
de s’imposer à son esprit, une adresse qu’il s’efforçait d’oublier depuis qu’il
en avait pris connaissance le soir où il avait recueilli le jeune homme blessé.
Dans la poche de son manteau, celui-ci conservait un bout de papier froissé.
Julian n’avait pu éviter d’en lire le contenu – une adresse dans la Cité,
le « 7, Bread Street » – lorsqu’il l’avait retiré du vêtement
taché de sang pour le ranger dans la bourse du garçon. Curieusement, et pour
une raison qui échappait à Julian lui-même, il n’avait parlé de ce détail à
personne. C’était un secret qu’il ne voulait pas partager.
    Il avait souvent songé à se rendre à cette adresse, mais
n’avait jamais osé aller au bout de son intention. Et voici qu’aujourd’hui sa
voiture passait précisément devant Bread Street. Et si le garçon habitait
là… ? À cette idée, son cerveau se troublait. Mû par une impulsion
irrésistible, il donna l’ordre au cocher d’arrêter la voiture, sauta à terre et
gagna en quelques enjambées le numéro 7. Une femme replète entre deux âges, un
panier au bras, sortait à ce moment, et il se précipita pour s’introduire dans
la maison avant que la porte ne se referme. Il se retrouva alors dans un
couloir lambrissé de panneaux de bois et orné de gravures bon marché. Avec la
désagréable impression d’être un voleur, il gravit discrètement les escaliers
où flottait une odeur de cire. « Dernier étage, première porte à
droite », il se rappelait chaque détail de l’adresse. Le souffle court,
Julian s’immobilisa sur le dernier palier, devant la porte fatidique. Là, le
courage lui manqua, et il faillit faire demi-tour.
    Au bout d’une minute qui lui parut un siècle, il se
décida à frapper, mais à peine son poing eut-il heurté le bois qu’il réalisa
l’absurdité de son geste. Fallait-il qu’il ait perdu l’esprit pour frapper
ainsi courtoisement à une porte qui était peut-être celle d’un assassin !
À croire qu’il l’avait convié à prendre le thé !
    Il recula d’un pas et observa la porte avec
appréhension. Nul bruit ne se fit entendre, nulle présence ne semblait habiter
les lieux.
    Julian prit une brusque inspiration et saisit la poignée
de la porte. À sa grande surprise, elle n’était pas fermée à clé et il put
l’ouvrir sans difficulté. La pièce aux murs blancs dans laquelle il pénétra le
glaça par la froideur de son atmosphère. Tout y était triste et impersonnel,

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