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Le Chevalier d'Eon

Le Chevalier d'Eon

Titel: Le Chevalier d'Eon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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[...]. Pour vous en faire mon hommage, j’ai cru, Mylord, devoir attendre l’époque du 14 juillet, le jour et l’heure que vous présidez à l’honorable association qui célèbre aujourd’hui l’anniversaire de notre glorieuse Révolution par laquelle vingt-quatre millions d’individus sont réintégrés à la primitive possession de leurs droits inaliénables de citoyens   !.... L’homme est rendu à la nature, le citoyen à la patrie, le monarque à ses sujets, les sujets à leur père, et tout un grand peuple aux vertus, aux lois, à l’égalité [...]. Un nouveau Titus paraît pour le rendre libre et pour faire triompher la justice par sa sanction royale à des décrets qui honoreront la sagesse du règne de Salomon {260} ...   »
    Quelque temps plus tard, un dîner fut donné en l’honneur de Thomas Paine, célèbre depuis la publication en 1776 de son  Common Sense, ouvrage révolutionnaire préconisant la reconnaissance de l’indépendance des colonies américaines révoltées, et qui avait contribué à renforcer le parti de l’indépendance en Angleterre. Thomas Paine défendait les idées de la Révolution française et souhaitait l’instauration d’une République. Lors de cette réception, un politicien radical, John Horne Tooke, porta un toast en l’honneur de Paine et aussi de Mlle Déon, déclarant qu’il se trouvait placé entre deux personnes extraordinaires   : à sa gauche se trouvait, disait-il, le plus grand écrivain politique du monde (the greatest political writer in the world) et, à sa droite, une femme qui avait joué un rôle important dans plusieurs cours d’Europe, qui avait obtenu un grade élevé dans l’armée et dont l’épée n’avait pas d’égale. Depuis cinquante ans, habillée en homme ou en femme, elle avait fait l’admiration de toute l’Europe.

Je n’ai que soixante-quatre ans
    Ce furent les derniers succès de Mlle d’Éon. Cette Révolution pour laquelle elle s’enflammait lui causa un tort irréparable   : sa pension, tout d’abord irrégulièrement versée, fut supprimée. On ne sait pour quelle raison, mais la crise financière, les soubresauts subis par le régime agonisant et les déclarations subversives de la chevalière suffisent à expliquer la perte de cette manne qui la faisait vivre. Elle devait faire face aux frais d’avocats dans le procès intenté aux héritiers de lord Ferrers et régler des créanciers qu’elle n’avait pas encore remboursés. Dès son retour à Londres, elle avait tenté d’obtenir que le frère et héritier de lord Ferrers lui remît ce qui lui était dû. Ce lord Robert Ferrers, qui gagnait beaucoup d’argent avec le revenu de sa mine de plomb, véritable mine d’or, n’avait pas l’intention de verser un penny à la chevalière. Elle fut contrainte de lui intenter un procès devant le tribunal des plaidoyers communs de la cour de Westminster (The Court of Common Pleas at Westminster) qu’elle gagna le 6 février 1787. Mais lord Robert mourut le 18 avril suivant. Son fils, au demeurant fort riche, faisait la sourde oreille et les créanciers de Mlle d’Éon se montraient de plus en plus pressants.
    La chevalière essaya de vendre à un éditeur son traité ésotérique. Sans succès. La mort dans l’âme, elle se vit contrainte de vendre sa bibliothèque, ses précieux livres réunis avec passion depuis sa jeunesse. Elle fit appel à l’un de ses amis, l’auctioner Christie, pour la disperser au feu des enchères. Mlle d’Éon passa ses journées à rédiger le catalogue de ses livres et de ses manuscrits dont la vente allait durer plusieurs jours, vu l’importance et la qualité de l’ensemble. Elle faisait emballer ses caisses d’ouvrages au fur et à mesure de l’avancement de son catalogue. Fort méfiante, elle pria Mrs Cole, une vieille amie veuve d’un amiral, de surveiller leur déballage auprès de Mr Christie. Alors qu’elle se livrait à ce travail qui lui arrachait le cœur, la chevalière tenta une nouvelle démarche auprès du ministre des Affaires étrangères de Louis XVI, le comte de Montmorin, pour tenter de lui vendre les manuscrits de Vauban qu’elle possédait ainsi que quelques épaves de la correspondance secrète qu’elle avait gardées. Mais en France, l’heure n’était plus à ce genre de négociations. Personne ne songeait à s’intéresser à de tels documents. Montmorin eut pourtant la courtoisie de lui répondre   : la chevalière perdait son

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