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Le commandant d'Auschwitz parle

Le commandant d'Auschwitz parle

Titel: Le commandant d'Auschwitz parle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Rudolf Hoess
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de leurs grands-parents étaient tziganes ou métis.
Il se trouvait même parmi eux un membre du Parti, national-socialiste depuis
toujours, dont le grand-père, tzigane, était venu s’installer à Leipzig ;
l’homme était lui-même à la tête d’un important commerce dans cette ville et s’était
distingué pendant la Première Guerre mondiale. Il y avait aussi parmi eux une
étudiante qui exerçait à Berlin les fonctions de Führerin à l’Union des
jeunesses féminines allemandes. On trouvait encore bien des cas analogues que
je ne manquai pas de signaler à l’administration de la police criminelle du
Reich. Sur ces entrefaites on procéda à des vérifications périodiques, et
nombreux furent ceux qui obtinrent leur libération, mais dans la masse ce n’était
guère sensible.
    Je ne saurais dire le nombre exact des Tziganes et des métis
internés à Auschwitz. Je sais seulement qu’ils occupaient entièrement un
secteur prévu pour l’hébergement de dix mille hommes [73] . Or, les conditions
générales de vie à Birkenau ne correspondaient en rien à ce qu’on aurait pu
attendre d’un « camp familial ». Si l’on avait vraiment l’intention
de garder les Tziganes uniquement pendant la durée de la guerre, toutes les
conditions indispensables à la réalisation de ce plan faisaient défaut :
il n’était même pas possible d’assurer aux enfants une nourriture tant soit peu
convenable. Pendant un certain temps, je parvins, en invoquant de prétendus
ordres d’Himmler, à obtenir pour eux quelque ravitaillement, mais il me devint
bientôt impossible de recourir à ce moyen, le ministère du Ravitaillement ayant
interdit toute attribution de vivres aux enfants internés dans des camps de
concentration.
    En juillet 1942, lors d’une nouvelle visite d’Himmler,
je lui fis faire un tour d’inspection détaillé dans le camp des Tziganes. Il put
tout voir ; les baraques remplies à éclater, les conditions sanitaires
insuffisantes, l’infirmerie regorgeant de malades. Il put voir les enfants
atteints de « noma », affreuse épidémie infantile qui me faisait
penser aux lépreux de Palestine [74] .
Il put voir ces petits corps décharnés, ces joues si creuses qu’elles
devenaient translucides, le lent pourrissement de ces corps vivants.
    Il prit connaissance des statistiques de mortalité,
relativement faibles comparées à l’ensemble du camp, mais énormes par rapport
au nombre des enfants. Je ne crois pas que parmi les nouveau-nés, beaucoup
aient survécu au-delà de quelques semaines.
    Ayant pris ainsi une vue d’ensemble complète et précise de
la situation, Himmler donna l’ordre de liquider tous les Tziganes, exception
faite de ceux qui étaient encore capables de travailler. Ainsi faisait-on avec
les Juifs.
    Je lui fis remarquer que les détenus dont il s’agissait ne
correspondaient pas exactement aux catégories qui avaient été prévues pour
Auschwitz. Il prescrivit alors à la direction de la police criminelle du Reich
de procéder, aussi rapidement que possible, à un ratissage méticuleux pour
extraire de la masse des Tziganes internés ceux qui étaient encore bons pour le
travail. Cela n’allait pas demander moins de deux ans. Les hommes reconnus
aptes au travail furent transférés dans d’autres camps. Mais, en août 1944,
il restait encore à Auschwitz environ quatre mille Tziganes destinés à la
chambre à gaz. Ils avaient jusqu’alors tout ignoré du sort qui les attendait.
Ils s’en rendirent compte seulement lorsqu’on les achemina par baraques
entières vers le crématoire I [75] .
Ce n’était pas chose facile que de les faire entrer dans les chambres à gaz. Je
n’ai pas assisté moi-même à l’extermination, mais Schwarzhüber, mon
collaborateur, m’a affirmé qu’aucune exécution de Juifs ne lui avait été aussi
pénible : il connaissait bien toutes les victimes et avait entretenu avec
elles des relations amicales.
    Ces Tziganes étaient confiants comme des enfants. Pour
autant que j’aie pu en juger, ils ne souffraient pas trop, dans l’ensemble, des
conditions si pénibles de leur existence, abstraction faite des entraves
opposées à leurs instincts nomades. Leurs mœurs, peu évoluées, leur
permettaient de s’adapter à la promiscuité de l’habitat, aux mauvaises
conditions d’hygiène et même à la nourriture insuffisante. Ils ne prenaient pas
trop au tragique les maladies et la mort qui les guettaient à chaque pas.

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