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Le glaive de l'archange

Le glaive de l'archange

Titel: Le glaive de l'archange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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sa blessure.
    La chambre sentait toujours les herbes brûlées et le chaudron bouillonnant, mais l’odeur d’infection et de putréfaction avait quasiment disparu. De l’âtre, une voix rauque se mit à bredouiller un mélange de latin et de catalan entremêlé des bribes d’une chanson.
    — Depuis combien de temps la vieille religieuse est-elle ainsi ? demanda-t-il vivement.
    — Depuis des heures et des heures, papa, fit Raquel.
    Il y avait des larmes dans sa voix quand elle lissa le drap de lin.
    — Je crois qu’elle a caché une cruche de vin sous ses jupes, murmura-t-elle.
    — Nous nous occuperons de cela plus tard. Place ma main sur le front de dame Isabel, dit-il doucement.
    Sa main se posa délicatement sur la peau.
    — Le front est humide et un peu plus frais. C’est bien. As-tu changé son pansement ?
    — À deux reprises, papa. Chaque fois j’ai baigné la blessure de vin avant d’y placer un emplâtre.
    — Fais-moi toucher sa peau, dit son père.
    Elle guida sa main et le regarda palper délicatement tout autour de la blessure. Il se redressa, apparemment satisfait de ce qu’il avait constaté.
    — Êtes-vous réveillée, madame ? demanda-t-il.
    — Oui, maître Isaac, fit la jeune fille d’une voix épaissie par le sommeil.
    — Vous reconnaissez votre médecin. C’est bon signe. Comment vous êtes-vous fait cette blessure ? poursuivit-il sur un ton tout aussi léger.
    Isabel cligna plusieurs fois des yeux.
    Raquel se pencha pour approcher un gobelet d’eau des lèvres de dame Isabel.
    — Buvez, madame, avant de chercher à parler.
    Elle but presque tout et laissa retomber sa tête.
    — Merci, Raquel. Vous voyez, je connais aussi votre nom. Quant à ma blessure, comment cela m’est arrivé, c’est vraiment stupide.
    — Parlez-m’en, dit Isaac, dont les doigts fouillaient dans le panier.
    — Nous étions à nos aiguilles. Je cherchais dans ma corbeille une soie de couleur beige afin de broder un cerf en fuite dans une scène de chasse…
    — Oui ?
    — Quelqu’un a lâché sa corbeille sur mon cadre et, quand j’ai voulu la ramasser, on m’est tombé dessus et j’ai été piquée par une aiguille.
    — Qui était-ce ?
    Elle secoua la tête d’un air contrit.
    — Dans la confusion, j’ai cru que c’était ma propre aiguille, dit-elle lentement. Mais maintenant je n’en suis plus certaine. Peut-être était-ce celle de cette personne. Je crois cependant que ce n’est qu’un accident.
    Elle parlait avec beaucoup de dignité.
    — Celle qui m’a blessée a sans aucun doute eu peur d’être châtiée.
    — Espérons, avec l’aide du Seigneur, que les conséquences de cet acte innocent seront bientôt oubliées, dit Isaac. Vous vous êtes assez fatiguée. Reposez-vous et faites comme Raquel vous le dit, madame, et tout ira bien. Votre oncle sera satisfait.
    Un unique coup frappé à la porte mit un terme à cette conversation. Isaac se retourna.
    — Qui est là ?
    — C’est Sor Agnete, maître Isaac. Puis-je vous parler ?
    — Reste ici avec ta patiente, Raquel, dit le médecin. Je vais voir ce que veut Sor Agnete.
     
    Raquel regarda son père quitter la chambre et refermer la porte derrière lui. Elle s’éloigna un peu du lit pour étirer ses bras et ses épaules endoloris. Elle était épuisée. Depuis qu’on l’avait réveillée en pleine nuit pour se rendre au couvent, elle n’avait pas dormi, sauf quelques minutes par-ci par-là auprès de sa patiente. Peint aux couleurs de l’épuisement, le décor qui l’entourait prenait des allures de cauchemar. La lumière du jour qui pénétrait par les fenêtres étroites parvenait mal à éclairer la pièce. Un unique rayon de soleil tombait sur le feu mourant et les braises pour en aspirer les teintes rouge orangé, ne laissant que de pâles langues de feu qui léchaient le mur de pierre. La chaleur avait une intensité étouffante ; sur toute chose la fumée projetait un voile bleuté. Raquel avait l’impression de vivre dans une représentation de l’enfer telle qu’elle en voyait dans les livres de son père. Dans un coin, près du foyer, la vieille religieuse murmurait et ricanait comme un esprit démoniaque. Puis elle versa dans une coupelle de bois le liquide qu’elle dissimulait entre ses jambes et le but.
    — Holà, fille d’Israël ! appela-t-elle. Laisse la bâtarde de l’usurpateur là où elle est et viens boire avec moi. Je sais qui tu es et ce que tu es, je

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