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Le glaive de l'archange

Le glaive de l'archange

Titel: Le glaive de l'archange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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d’été. Isaac se pencha pour permettre à Yusuf de placer la bourse autour de son propre cou ; puis le garçon retourna vers Johan.
    — Reste ici pendant que je t’ôte cette boue, dit le surveillant. Ensuite, je t’étrillerai pour te faire tout propre.
    Il versa sur Yusuf de l’eau tiède prise dans le bain avant d’aller chercher deux grosses aiguières posées sur le feu. Il les plaça près d’une fontaine d’où sortait le flot régulier d’une eau fraîche et pure. Il releva sa tunique et s’assit sur le rebord du petit bain.
    Yusuf descendit dans le bain et se planta, frissonnant, devant le gros Johan. L’odeur et le contact de l’eau déclenchèrent une autre vague de souvenirs estivaux : bruit de l’eau qui éclaboussait et rire des femmes ; le chaud soleil qui caressait sa peau, les hauts palmiers qui s’agitaient au vent et le couvraient de leur ombre. Des larmes lui vinrent aux yeux, et il s’empressa de chasser ses souvenirs.
    Johan frotta Yusuf avec une éponge et du savon doux jusqu’à ce que sa peau reluise et que ses cheveux soient couverts de mousse.
    — Attends-moi ici, dit-il en allant chercher les aiguières.
    Il prit une louche et versa dedans un peu d’eau froide.
    L’eau chaude sur sa tête fit à Yusuf l’effet d’un four qui explose. Crasse et savon s’en allèrent en même temps. Il regarda sa peau nue, débarrassée de tout ce gris, et vit ses membres maigres aux os saillants, couverts de coupures et d’égratignures mais aussi de taches brunes et claires alternées provoquées par l’action du soleil sur ses haillons. Jamais, même au plus sombre de son voyage, il ne s’était senti plus sale, plus humilié.
    — Voilà, mon gars, dit Johan. Fais-moi confiance. Propre des pieds à la tête. Je te mettrais bien dans l’eau froide pour te rafraîchir, mais petit comme tu l’es, je crains que ce ne soit trop pour toi. Maintenant, je vais te sécher et voir comment te vont tes habits.
    Johan l’enveloppa dans une grande pièce de lin et se pencha pour ramasser un paquet posé à terre.
    — Vos habits, mon jeune sieur.
    La main de Yusuf effleura son cou nu et le lin retomba.
    — Ma… ma bourse ! s’écria-t-il d’une voix où perçait la panique. Seigneur, est-ce que vous avez toujours ma bourse de cuir ?
    Isaac s’avança et tendit la main jusqu’à ce qu’elle touchât les cheveux mouillés du garçon. Gravement, il ôta la bourse de son cou et la passa sur la tête de Yusuf.
    — Tu vois, fit-il, je tiens ma promesse. Maintenant, habille-toi avant de prendre froid.
    Yusuf prit une chemise de lin et l’enfila. Les chausses étaient un peu trop longues et il noua autour un ruban avant de passer une tunique de belle étoffe brune. Il mit les pieds dans les souliers, tira les cordelettes pour les adapter à sa taille, et secoua la tête. Cette maîtresse était une étrange femme, pour vêtir si bien quelqu’un qu’elle détestait tant.
     
    — C’est un endroit aussi frais qu’agréable, dit Isaac. L’évêque m’a assuré que tu l’entretenais à merveille.
    — L’évêque est un homme bon et généreux, répondit Johan, pour dire cela. C’est pour ça que j’ai eu grande honte de trouver une nonne morte dans mon bain.
    — Elles ne viennent pas ici, habituellement ? Les sœurs ?
    — Jamais, s’empressa de répondre le gros Johan.
    Isaac l’entendait presque transpirer.
    — Quand tu l’as sortie de l’eau, c’était juste après prime, n’est-ce pas ?
    — Un peu plus tard que ça, maître.
    — Une heure, peut-être ?
    — Le soleil était haut et clair.
    — Était-elle déjà raide ?
    Le gros Johan se détendit. Il ne bougea ni ne parla, mais son soulagement était si palpable qu’Isaac le perçut.
    — Oui. Au niveau de la tête. C’est par là que ça commence. J’ai aidé à charrier les morts, je sais ce que c’est.
    — Donc, une heure environ après prime, la rigidité faisait déjà son œuvre. Elle est morte après laudes, depuis une heure ou deux peut-être.
    À ce moment, songea-t-il, le tumulte redoublait en ville. Et l’évêque avait vu le gros Johan trop saoul pour se rappeler son nom.
    Des pas légers retentirent sur le sol.
    — Mes nouveaux habits sont très jolis, seigneur, dit Yusuf. J’aimerais que vous puissiez les voir.
    — Tiens, donne-moi tes hardes, lança le gros Johan. Je vais les mettre au feu.
    — Je crois que je vais les conserver, dit Yusuf. J’en aurai

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