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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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les soldats
jetés dans la mêlée, mais seulement truchement de Louis, et demeurerais à ses
côtés, c’est-à-dire ès endroits non périlleux, la vie du roi devant être avant
tout préservée.
    Et comme Catherine, sourde à ces rassurances, se pâmait à
demi, je la portai jusqu’au lit et tirant les courtines, m’allongeai à ses
côtés. Se pelotonnant alors dans mes bras, ses plaintes prirent une autre
tournure, et comme je lui avais confié, bien sottement à mon avis, qu’aux
étapes les officiers du cantonnement, pour éviter querelles et conflits avec
les maris, nous logeaient de préférence chez des veuves, elle prédit aussitôt
que ces veuves affamées de braguettes se jetteraient sur les officiers qu’elles
logeaient pour en tirer les joies dont elles étaient privées. Et comme je lui
objectais qu’il n’y avait pas d’exemple du forcement d’un homme par une femme,
elle prophétisa aussi, qu’à en juger par l’effet que me faisait le tétin d’une
garce en me frôlant l’épaule, ma défense serait des plus faibles.
    Ce babil des courtines fut interrompu par mon maggiordomo qui toqua à l’huis et à mon entrant me dit qu’un petit vas-y-dire venait
d’apporter une lettre-missive du révérend docteur médecin chanoine Fogacer,
laquelle il désirait me remettre sur l’heure, pensant qu’elle était peut-être
urgente. J’ouvris le pli. Fogacer quérait de moi s’il serait de mon bon plaisir
et celui de Catherine de l’inviter ce jour d’hui à notre repue de midi.
    — Giovanni, dis-je, est-ce le même petit vas-y-dire,
crasseux, pétulant et bien fendu de gueule que la dernière fois ?
    — Celui-là même, Monseigneur, et tout aussi crasseux.
    — Alors, dis-lui que la réponse est oui pour le
chanoine, et donne-lui de ma part un sol et un croûton de pain.
    — Un sol et un croûton de pain ? dit Giovanni,
jugeant sans doute que la générosité était excessive.
    — Tu m’as ouï, Giovanni.
    Là-dessus, il se retira avec une belle révérence, poli, mais
désapprobateur. Très épris de protocole, Giovanni avait des idées précises sur
ce qu’il fallait ou ne fallait pas faire. Par exemple, me voir au lit avec mon
épouse à une heure qui n’était ni le lever, ni la sieste, ni le coucher, le
choquait, et bien entendu sans qu’il en pipât mot. Cependant, je m’en
apercevais au cillement de ses yeux, qui se peut n’était pas involontaire. Car
Giovanni était un excellent commediante pour qui le métier de maggiordomo n’était pas seulement un métier, mais un rôle.
    Bel homme, impeccable dans sa livrée chamarrée, le cheveu
bien testonné, les ongles bien limés, la face rasée de près, il se tenait très
droit, et il ajoutait à sa taille en portant des talons. Il aimait fort le gentil
sesso, mais sur mon expresse défense de toucher à nos chambrières, il
trouva un petit paradis très proche chez notre boulangère, jeune veuve fort
accorte, chez qui il ne se rendait qu’accompagné d’un de nos valets, dont le
seul labeur était de porter les pains qu’elle faisait spécialement pour nous,
lesquels, disait-elle, étaient les meilleurs de Paris. Vous pensez bien,
lecteur, que jamais notre superbe maggiordomo n’aurait accepté de se
montrer en public, portant bassement des pains sous le bras, et d’autant que
servant le seul duc qui habitât notre rue, ma gloire rejaillissait sur lui et
l’entourait de ses rayons.
     
    *
    * *
     
    Fogacer arriva sur le coup de midi, accompagné de son petit clerc
qui, sur sa prière, fut assis à table à son côté, violation du protocole qui
choqua fort Giovanni, mais non Catherine qui s’ébaudissait fort de voir le
révérend docteur chanoine Fogacer veiller maternellement sur son petit clerc,
lui coupant sa viande en petits morceaux, et rajoutant de l’eau à ses vins.
    On se souvient que Fogacer avait été le sage mentor de mon
père alors qu’il étudiait la médecine à Montpellier, et qu’il était devenu, au
cours des ans, mon immutable ami. Il avait dû fuir Montpellier à la fin de ses
études, parce qu’il était soupçonné d’être bougre et athée. Deux bonnes raisons
pour être brûlé vif en notre aimable siècle.
    Il dut départir alors pour Paris, s’y fit prêtre, renonça à
Satan et à ses œuvres, mais sans aller jusqu’à s’éprendre du gentil sesso ,
aimant toutefois les femmes, mais comme des sœurs.
    Physiquement, sa haute taille et sa minceur lui donnaient
une allure

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