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Le marquis des Éperviers

Le marquis des Éperviers

Titel: Le marquis des Éperviers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Paul Desprat
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présenté lui-même pour ouvrir, ne vous avais-je pas dit de ne jamais reparaître ici ?
    – J’ai bravé votre défense parce que je devais vous confier des choses nouvelles et importantes.
    À ces mots, Brandelis de Grandville, qui n’avait fait jusque-là qu’entrebâiller sa porte, s’écarta pour laisser passer son visiteur. Il se montra alors, le visage couvert d’ecchymoses, un bras en écharpe, la main prisonnière d’une attelle.
    – Que vous est-il arrivé ? demanda le nouveau venu.
    – Je vous l’ai déjà dit, mes malheurs ne regardent que moi !… Venez-en au fait ! Pourquoi m’avoir désobéi ?
    – J’étais à l’Opéra, avoua Victor en ramassant toute son énergie pour soutenir le regard incandescent de son hôte.
    – Vous aussi, vous faites partie des Romains qui s’avilissent aux jeux du cirque ! murmura le vicaire de Saint-André avec un sourire navré, vous avez donc vu comme l’on m’a traité, comment l’on traite ici ceux dont l’opinion dérange.
    Il se reprit, honteux d’avoir pu laisser croire qu’il se plaignait.
    – Alors ?… L’objet de cette visite ?
    – Vous allez être arrêté d’un moment à l’autre, on vous accuse d’être mêlé à un trafic de reliques… Lisez !
    Il lui tendit la copie qu’il avait faite la veille du texte de Grivet.
    – Où avez-vous trouvé ceci ? demanda l’abbé d’une voix changée.
    – Dans les papiers de gens bien informés ! répliqua Victor sur un ton qui suspendait toute nouvelle question.
    – Je n’aurais pas pensé que le dénouement fût si proche, balbutia Brandelis de Grandville en promenant un regard éperdu sur le désordre qui régnait dans son vestibule.
    – Je suis venu vous avertir, reprit Victor, parce que mon ami le marquis des Éperviers m’a révélé votre nom… Je suis persuadé que vous possédez la clef du succès de ses entreprises et de sa sauvegarde…
    – Vous êtes tout à fait obstiné ! s’emporta l’abbé, ne vous avais-je pas déjà répondu que j’ignorais tout de votre marquis et que je ne pouvais rien faire d’autre que lui conseiller de fuir et de se terrer comme je m’apprête à le faire moi-même ?
    – Vous ne m’empêcherez pas de penser que vous en savez plus que vous voulez bien le dire !
    Brandelis de Grandville ne répondit pas ; il s’était précipité sur le rang des patères qui, derrière la porte, supportaient toute sa garde-robe. Il roula en boule quelques habits râpés qu’il jeta dans un bissac.
    Brusquement, il s’arrêta et posa sur Victor un œil plein de mélancolie morne.
    – Puis-je vous demander un service ? s’enquit-il imprévisiblement.
    – Sans hésitation !
    – Il s’agit de ma sœur… Je ne puis plus la conduire moi-même jusqu’à la retraite sûre où elle devra attendre mon retour… Pouvez-vous l’y mener à ma place ?
    C’était une mission inespérée et le visage du futur ange gardien s’inonda aussitôt d’une expression de vrai bonheur.
    – Si je peux ? bredouilla-t-il, mais certainement.
    – Je vous confie ce que j’ai de plus précieux car je n’ai personne d’autre à cette heure sur qui pouvoir m’appuyer… Lorsqu’on vit, comme moi, dans le trouble et la confusion, on n’a pas d’autre ressource souvent que de s’en remettre à des personnes de hasard… C’est simple, vous êtes là ; je me sers de vous…
    – Vous pouvez m’accorder votre confiance, répliqua Victor, tout ce dont je suis persuadé à votre sujet m’engage à mériter votre reconnaissance. Je délierai votre langue par mon zèle à faire le bien pour vous.
    – Deux choses encore, ajouta l’abbé qui parlait d’un ton de plus en plus haché, vous trouverez Clémire demain matin à onze heures devant l’enseigne de la Brioche d’Or, rue Sainte-Opportune. Elle aura à la main un tout petit ballot d’affaires. Elle loge par précaution depuis huit jours chez l’un de mes amis mais il est trop connu de la justice pour qu’elle y soit plus longtemps en sûreté. Elle vous montrera où vous devez la conduire, c’est à Colombes, chez les époux Lheureux, des gens tout à fait sûrs et dévoués qui furent nos parents nourriciers autrefois. Quant à moi, à moins que je sois pris d’ici là, je reparaîtrai dans dix jours, innocenté ou prêt à me livrer à mes juges. Soyez le samedi 27 novembre, à sept heures du soir, dans l’église Saint-Eustache devant le tombeau de Colbert.
    – J’y serai ! promit le visiteur.
    L’abbé

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