Le Troisième Reich, T2
Schuschnigg, Léon Blum, Schlabrendorff, et le
général von Falkenhausen, furent libérés par les troupes américaines le 4 mai
1945, à Niederdorf, dans le sud du Tyrol, juste au moment où les hommes de la
Gestapo qui les gardaient s’apprêtaient à les exécuter. Falkenhausen devait
être par la suite jugé par les Belges comme criminel de guerre et condamné le 9 mars
1951 à douze ans d’emprisonnement. Il y avait quatre ans qu’il attendait son
jugement en prison. Il fut, toutefois, libéré quinze jours plus tard et
retourna en Allemagne.
Bon nombre d’officiers impliqués dans le complot préférèrent se
suicider plutôt que de s’en remettre à la douce mansuétude de la Volksgericht .
Le matin du 21 juillet, le général Henning von Tresckow, qui avait été de
cœur et d’esprit avec la conspiration fomentée parmi les officiers du front de
l’est, prit congé de son ami et adjoint, Schlabrendorff, qui a rapporté ses
dernières paroles :
« Maintenant, tous vont se retourner contre nous et
nous couvrir d’insultes. Mais ma conviction demeure inébranlable : nous
avons fait ce que nous devions. Non seulement Hitler est le pire ennemi de l’Allemagne,
mais il est aussi le pire ennemi du Monde. Dans quelques heures, je me
présenterai devant Dieu, je lui répondrai de mes actions et de mes omissions. Je
crois que je pourrai justifier avec une conscience claire tout ce que j’ai fait
dans la lutte menée contre Hitler…
« Quiconque se joint au mouvement de résistance revêt
la tunique de Nessus. La valeur d’un homme n’est certaine que s’il est préparé
à sacrifier sa vie pour ses convictions (39). »
Ce matin-là, Tresckow se rendit en voiture à la 28e division d’infanterie,
se glissa dans le no man’s land et dégoupilla une grenade à main. Elle lui fit
sauter la tête.
Cinq jours plus tard, le général Wagner se suicidait.
Parmi les officiers supérieurs de l’armée de l’Ouest, deux
maréchaux et un général se suicidèrent. Ainsi que nous l’avons vu, à Paris, le
soulèvement avait pris un bon départ quand le général Heinrich von Stuelpnagel,
gouverneur militaire de France, avait arrêté tous les S. S. et S. D. Tout
dépendait ensuite de l’attitude du maréchal von Kluge, le nouveau commandant en
chef de l’Ouest, que Tresckow avait travaillé pendant deux ans sur le front
russe dans l’espoir d’en faire un conspirateur actif. Tout en se montrant tour
à tour enthousiaste et très froid, Kluge avait finalement accepté – du moins c’est
ce que les conspirateurs avaient compris – de soutenir la révolte une fois
Hitler mort.
Le soir du 20 juillet, un dîner avait eu lieu à La
Roche-Guyon, quartier général du groupe d’armées B, dont Kluge assurait
également le commandement depuis l’accident de Rommel. Kluge voulait discuter
les rapports contradictoires (annonçant les uns qu’Hitler était mort, les
autres qu’il était vivant) avec ses principaux conseillers, le général Guenther
Blumentritt, son chef d’état-major, le général Speidel, chef d’état-major du
groupe d’armées B, le général von Stuelpnagel et le colonel von Hofacker, auquel
Stauffenberg avait téléphoné plus tôt dans l’après-midi pour l’informer de l’attentat
et du putsch de Berlin.
Lorsque les officiers se réunirent pour dîner, il sembla, à
certains d’entre eux du moins, que le prudent maréchal avait à peu près décidé
d’unir son sort à celui des conspirateurs. Beck lui avait parlé au téléphone
peu avant le dîner et avait insisté pour qu’il soutînt le mouvement – qu’Hitler
fût mort ou vivant. Puis le premier ordre signé par le maréchal von Witzleben
était arrivé. Kluge était impressionné.
Cependant, il voulait avoir des informations plus précises sur ?
La situation et, malheureusement pour les rebelles, il en reçut du général
Stieff, qui avait fait le matin même le trajet jusqu’à Rastenburg avec
Stauffenberg, lui avait souhaité bonne chance, avait vu l’explosion, avait
constaté qu’elle n’avait pas tué Hitler et cherchait maintenant à se couvrir. Blumentritt
lui téléphona et Stieff lui dit franchement ce qui s’était passé.
« C’est manqué », dit Kluge à Blumentritt.
Il avait l’air vraiment déçu, et il ajouta que, si l’attentat
avait réussi, il n’aurait pas tardé à entrer en contact avec Eisenhower pour
demander un armistice.
Au dîner – une réunion lugubre, devait
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