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Les cochons d'argent

Les cochons d'argent

Titel: Les cochons d'argent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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heureux d’apprécier le père d’Helena, et d’autant plus que le sentiment m’était venu dès notre première rencontre.
    — La barre très haut… répéta Decimus Camillus en me regardant avec insistance. (Il soupira, presque imperceptiblement.) Oui, elle sait ce qu’elle veut.
    Il était inquiet pour sa fille ; sans doute aussi pour moi.
    Il est des choses qu’un citoyen de base ne saurait dire aux parents d’une jeune fille de bonne famille. J’aurais pu lui déclarer combien je vénérais le sol foulé par sa fille, mais je n’avais pas l’impression qu’il s’en trouverait rassuré…
    L’homme de Tarse arriva à point nommé, une serviette sur le bras. Je laissai Decimus se faire masser le premier, espérant que son pourboire généreux laisserait le colosse dans de meilleures dispositions. J’en fus pour mes frais : il redoubla d’énergie.

51
    Ma mère repassa dans l’après-midi pour me demander de présider la grosse réunion familiale qu’elle organisait le lendemain, à l’occasion du Triomphe de Vespasien. Une bonne insolation, mes sœurs se crêpant le chignon, les gamins fatigués pleurant sans savoir pourquoi : une journée comme je les adorais… Quant à maman, elle nous faisait faux bond pour aller se poster sur un balcon bien au calme, en compagnie de trois vieilles copines. Pour faire passer la pilule, elle m’avait apporté une superbe brème impériale à tête d’or.
    — Je vois que tu as rangé ta chambre, fit-elle avec un air pincé. Tu t’es enfin décidé à mûrir un peu…
    — Je pourrais bien avoir de la visite, je veux faire bonne impression.
    En passant derrière moi, maman m’ébouriffa tendrement les cheveux, puis fit mine de les recoiffer. Je n’y pouvais pas grand-chose si je la désespérais ; j’éprouvais moi-même un sacré désespoir.
     
    J’allais m’asseoir sur le balcon, m’efforçant de ne pas me livrer à de futiles spéculations, quand j’entendis frapper à la porte. On entra sans attendre. Débordant d’expectative, je bondis sur mes pieds. Par la porte à battants, je pus observer ma merveille de mère en train d’alpaguer une jeune fille dans mon appartement.
    Ma mère était habituée à un autre genre de confrontation. Elle savait y faire avec les jeunettes rougissantes, portant aux chevilles des bracelets en imitation corail… mais cette fine étoffe aux plis subtils et cet air sérieux…
    — Bonjour, madame, je m’appelle Helena Justina.
    Helena ne perdait jamais son sang-froid, même face à une mère tenant dans une main un bol de farce aux amandes et un couteau de boucher avec une lame de trente centimètres dans l’autre.
    — Mon père est le sénateur Camillus Verus. Naturellement, ma servante m’attend devant la porte. J’aurais souhaité un rendez-vous avec Didius Falco ; je suis une cliente.
    — Je suis sa mère, affirma distinctement maman, telle Vénus aux pieds d’écume défendant son petit Énée.
    Entre nous, je doute que sa déesse de mère ait jamais farci le moindre poisson pour son cul-béni d’Énée, ce petit con prétentieux.
    — Je m’en doutais, répondit Helena d’une voix douce et agréable. (Elle regarda mon dîner avec envie, comme si elle n’attendait qu’une chose : être invitée.) Je sais que vous vous êtes occupée de ma cousine Sosia. Je suis ravie que l’occasion me soit donnée de vous en remercier.
    Après quoi elle se figea dans un silence tout humble, rajustant son voile, comme devait le faire une jeune femme bien élevée face à une dame plus âgée – c’était bien la première fois qu’une de mes amies traitait maman avec de tels égards…
    — Marcus ! cria maman, désemparée par tant de politesse. Une cliente !
    Affectant un air nonchalant, j’entrai dans la pièce. Ma mère attrapa le plat de poisson et trouva refuge sur le balcon, pour ménager la confidentialité de l’entretien. Elle ne se sacrifiait qu’à moitié – de dehors, elle entendrait tout. Je fis asseoir Helena dans la chaise-client et m’installai de l’autre côté de la table, avec mon air le plus professionnel. Nos regards se croisèrent et je perdis tous mes talents d’acteur. Elle se demandait si j’étais content de la voir ; je scrutai moi-même ses traits avec précaution. Soudain, nos deux regards soulagés trahirent le même sentiment d’auto-dérision. Nous demeurâmes plongés dans un silence éloquent, à échanger de tendres sourires.
    — Didius

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