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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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jamais eu de lait. Mais elle posa un de ses mamelons séchés sur la bouche morte de son bébé. Pleurant à chaudes larmes, des pleurs venus de profondeurs jamais explorées, elle continuait à encourager Louisa à boire. Ovila s’approcha d’elle et elle lui rugit de s’éloigner. Il recula, terrifié, puis entendant Rose et Marie-Ange pleurer, il alla les trouver et les mena toutes les deux dans la chambre de Rose. Essayant de sourire, il demanda à Rose de bien protéger Marie-Ange. Rose et Marie-Ange se collèrent l’une contre l’autre et se turent. Ovila les laissa et revint vers Émilie. Elle avait enfoui Louisa sous sa robe de nuit et lui disait qu’elle allait la réchauffer. Ovila s’approcha d’elle encore une fois. Elle lui ordonna de se tenir éloigné. Il ne voulut rien entendre et continua d’avancer.
    Elle recula, marchant sur les genoux, trébuchant chaque fois qu’elle piétinait sa robe. Dans sa hâte à vouloir s’éloigner de lui, elle échappa Louisa qui tomba sur le plancher en faisant un son mat. Ovila pleurait à chaudes larmes.
    «Émilie...Émilie, donne-moi Louisa... Lève-toi, Émilie...
    —        Va-t-en! Maudit toi! Va-t-en!»
    Ovila recula à son tour, sortit de la chambre et ferma la porte. Il alla voir Rose et Marie-Ange qui ne dormaient pas. Il les leva et entreprit de les vêtir malgré ses mains nerveuses et fébriles. Il y réussit, en même temps qu’il reprit un peu de son sang-froid. Il leur mit un gilet de laine et, tenant chacune de ses filles par la main, il sortit dans la nuit encore noire et se dirigea vers la maison de son père. Ses sanglots l’avaient rejoint à mi-chemin.
    Il essaya de parler doucement pour effacer la terreur du visage de ses filles. Il fut enfin rendu chez ses parents. Il entra dans la cuisine et appela sa mère à son secours. Félicité arriva, aussitôt talonnée par son mari. Éva était descendue, suivie de tous ses frères. Elle prit ses nièces et commença à les dévêtir. Ovila hoquetait et pleurait tant que personne ne comprit ce qu’il racontait. Ils ne reconnaissaient que les mots Émilie, Louisa et folie. Puis Ovila sortit précipitamment de la maison et courut en direction de chez lui. Félicité ne prit pas le temps de se vêtir et partit à sa poursuite, imitée par son mari et Edmond. Éva retint les autres.
    Ovila ouvrit la porte prudemment, inquiet de ce qui pouvait l’attendre. Émilie était là, dans la cuisine. Elle avait déposé Louisa au milieu de la table et, assise à côté d’elle, elle lui jouait un air d’accordéon.
    «Te voilà, Ovila! J’essayais d’endormir Louisa en t’attendant. Je voudrais pas qu’on fasse patienter le docteur.»
    Elle avait la voix haut perchée et traînante. Ovila la regarda, incrédule. Elle venait d’effacer les heures qui s’étaient écoulées depuis la veille. Elle l’attendait pour aller chez le médecin avec Rose et Louisa. Elle l’avait attendu pendant que lui...
    Félicité le poussa légèrement. En un instant elle avait compris la scène. Elle s’approcha d’Emilie et lui parla doucement.
    «Dosithée pis Edmond vont amener Louisa chez le docteur, Emilie.
    —        Non, c’est moi qui y vas. J’ai demandé à Ovila d’être ici pour garder Marie-Ange. Rose aussi est prête.
    —        Rose est déjà chez nous, avec Eva. Astheure, faut que Dosithée emmène Louisa.»
    Elle s’approcha du bébé et le prit dans ses bras. Émilie se précipita vers sa chambre et revint avec du linge pour Louisa.
    «Pensez-vous que j’vas la laisser partir de même? Voyons donc, madame Pronovost, on sort pas un bébé en couche pis en camisole.»
    Devant le regard ahuri d’Ovila, Émilie langea Louisa, la vêtit, en ne négligeant même pas de lui mettre ses souliers. Elle lui parlait sans arrêt.
    «Moman va te mettre la belle p’tite robe de dentelle anglaise qu’elle avait cousue pour Rose. Tu vas être belle comme un p’tit ange. C’est bien raisonnable de pas bouger. Rose, elle, bougeait tout le temps quand je lui mettais ses p’tits bas.»
    Au grand émoi de tous, elle mouilla une débarbouillette et lava la figure et les mains de Louisa, doucement, comme si elle eût joué avec une poupée de porcelaine. Elle prit enfin Louisa dans ses bras et la remit à Félicité.
    «C’est gentil à vous de vous en occuper. Oubliez pas de dire au docteur que Rose sait compter jusqu’à cinquante. C’est pas mal pour une enfant retardée.

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