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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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plus souvent, elle empoignait Alice sous un bras et sortait à la hâte pour rappeler un de ses enfants à l’ordre.
    Ovila était absent pendant toute la journée et ne rentrait que tard le soir. Il avait avoué, en termes à la fois clairs et doux, que la présence des enfants, la promiscuité, la nouveauté de la ville étaient à blâmer pour ses multiples absences. Emilie l’avait écouté et lui avait proposé une solution à son problème. Elle lui offrit de partir pour le lac à la Perchaude avec tous les enfants. Ovila l’avait remerciée, lui disant qu’il ne pourrait se séparer d’eux, Emilie s’était enflammée.
    «Tu dis qu’on prend trop de place! Je t’offre de clairer le plancher pis tu veux rien entendre.
    —        Émilie, j’ai juste dit que j’étais pas capable de toujours être dans la maison. Rien d’autre.
    —        T’es-tu demandé si moi ça me tentait d’être dans la maison toute la journée? J’aimerais mieux être au lac.»
    La Belgo vint au secours d’Émilie. Moyennant une augmentation de salaire et le paiement de l’installation d’un téléphone, on proposa à Ovila de travailler de jour et d’être de garde la nuit. Il s’empressa d’accepter. Grâce à ce nouvel arrangement, Émilie put passer ses soirées avec Ovila, mais les talents de ce dernier venant à être connus, elle commença à dormir seule une grande partie de la nuit. Elle ne comprenait pas qu’une grosse compagnie comme la Belgo ait toujours quelque appareil qui brisait, surtout pendant la nuit.
    Ovila lui proposa enfin de quitter Shawinigan pour le reste de l’été. Elle partit avec armes, bagages et enfants pour cinq semaines. Elle logea au lac avec les plus jeunes, Alice, Jeanne et Clément, pendant que les plus vieux dormaient chez la grand-mère Pronovost et venaient la rejoindre pendant la journée.
    Elle revint à Shawinigan pour le début des classes. La seule bonne nouvelle qui l’accueillit fut que les garçons et les filles fréquenteraient encore la même école. Les religieuses et les frères avaient sous-estimé le nombre de déménagements. Les enfants retournèrent donc tous à la même école. Paul entra en deuxième, mais Rose dut demeurer en quatrième.
    Ovila souligna en grandes pompes leur retour, les invitant tous à manger au restaurant. Il déplia ostensiblement la liasse d’argent qu’il avait apportée pour impressionner Emilie et les enfants certes, mais aussi pour se convaincre qu’il ne rêvait pas, que cet argent était bien à lui et que si tout allait comme il le souhaitait, il serait en mesure d’acheter une maison à Emilie dès l’année suivante.
    Emilie s’apprêtait à passer son premier hiver à Shawinigan. Elle avait confectionné de nouveaux vêtements pour les enfants, l’orgueil lui ayant fait refuser de leur faire porter ceux qui lui avaient paru fort convenables à Saint-Tite. Clément usa le manteau trop grand qui lui avait été refilé par Paul et le manteau de Jeanne fut porté par Alice.
    L’hiver attaqua Émilie par toutes les issues possibles. Il la prit d’assaut en recouvrant Célina, sa mère, de la grande froidure. Émilie ne put même pas assister à ses funérailles, incapable de trouver une gardienne qui aurait pu prendre maison et maisonnée en charge. Elle en voulut à Ovila de n’avoir pas réussi à prendre congé pour les trois jours qu’aurait duré son absence. L’hiver, ensuite, s’infiltra par toutes les portes et les fenêtres de son logement, au point que la plomberie gela et éclata. Emilie et les enfants durent, pendant des semaines, aller emplir des chaudrons de neige pour avoir de l’eau. Émilie s’en plaignit amèrement à Ovila qui, furieux, défît un mur de la chambre d’Alice, pour découvrir que le propriétaire n’avait fait poser aucun isolant. Le propriétaire joua d’innocence, menaçant de poursuivre Ovila d’avoir détruit le logement et le força à réparer tous les dégâts qu’il avait faits. Émilie fut donc prise avec le propriétaire, Ovila ne trouvant jamais le temps de travailler au mur blessé. Émilie, enfin, frissonna son premier hiver à Shawinigan dans la solitude de ses draps, Ovila ayant eu une promotion. Il travaillait maintenant de nuit, dormant le jour, le téléphone sonnant à toute heure pour réclamer ses services. Émilie se précipitait à la première sonnerie, craignant qu’Ovila ne soit réveillé inutilement. Mais l’appel était toujours

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