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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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tuberculose. »
    Il leva les yeux et regarda son père. Dosithée répéta silencieusement le diagnostic à deux ou trois reprises. Il se retourna enfin pour dire à ses frères qu’il allait chercher son bagage et qu’il rentrait à Saint-Tite. Ses frères l’accompagnèrent jusqu’au campement. Dosithée lança tout en vrac dans le sac de farine qui lui servait de valise.
    «Claïre, je te confie ma hache. Veille à ce qu’elle rouille pas, pis rapporte-moi-la au printemps. Salue bien tout le monde. Moi, je file.»
    Dosithée et Edmond firent le trajet en silence. Si le trajet n’était pas long, il n’en était pas moins épuisant, les chemins étant à peine existants. N’eussent été les traces qu’Edmond avait creusées à son arrivée, ils auraient mis encore plus de temps à sortir du bois touffu et étouffant. Dosithée regardait devant lui un point qui semblait toujours s’appuyer sur un horizon inaccessible.
    Ils arrivèrent au Bourdais à la nuit tombée. Dosithée sauta du traîneau, laissant à son fils le soin de la bête et de l’attelage. Il se précipita dans la maison et se dirigea vers sa femme. Cette dernière lui tendit une joue qu’il s’empressa de caresser.
    «Ovide est où?
    —        Dans la chambre des filles. Il empire depuis à matin. Le docteur est venu pis il nous a dit qu’Ovide faisait en plus une p’tite bronchite. On sait pas ce qui va arriver.»
    Félicité se voulait rassurante, mais elle-même n’était pas tranquillisée. Elle savait que la nuit serait longue. Dosithée enleva manteau, bottes et tuque, puis monta l’escalier sur la pointe des pieds. Il s’assit au chevet de son fils qui se débattait contre une fièvre de plus en plus accablante.  «Salut mon gars... Comment ça va?»
    Ovide ouvrit les yeux et commença à trembler. Il parvint à dire à son père de s’éloigner de lui. Dosithée recula. Puis Ovide, que la fièvre réussissait presque à vaincre, recommença à s’agiter. Dosithée lui posa un linge humide et frais sur le front. Ovide l’arracha. Désemparé, Dosithée sortit de la chambre à reculons. Il revint dans la cuisine.
    «As-tu l’impression qu’il faudrait faire venir le curé? demanda-t-il à sa femme en essayant de camoufler les vacillements de sa voix.
    —        Pas d’après le docteur. Si la fièvre peut tomber, il va être correct. »
    Dosithée alla à sa chambre. Il décrocha le crucifix qui était suspendu à la tête du lit, le serra contre sa poitrine et le raccrocha au mur. Il revint dans la cuisine. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’il se rendit compte que tous les enfants étaient assis autour de la table. Il les regarda, un peu étonné de ne pas avoir remarqué leur présence. Tous leurs regards étaient inquiets. Il leur sourit, puis leur demanda s’ils voulaient faire une prière. Télesphore répondit qu’ils venaient de terminer un chapelet. Rosée fusilla ce dernier du regard et proposa à son père de réciter un rosaire. Dosithée, conscient tout à coup de l’heure tardive, lui répondit qu’ils seraient probablement mieux de tous aller dormir. Tous les enfants montèrent, à l’exception de Rosée, Edmond et Ovila. Éva se dirigea vers le salon. C’est là que Félicité avait installé ses filles afin de libérer leur chambre pour Ovide.
    «Comment est-ce qu’il est, Lazare, depuis les Fêtes? demanda Dosithée.
    —        Seulement deux crises», répondit Rosée.
    Dosithée se retourna vers Ovila.
    «Ovila, ton frère Ovide est trop malade pour qu’on puisse compter sur lui. Lazare, tu le sais, est pas capable de travailler régulièrement. Ça fait que c’est à ton tour de laisser l’école pis de prendre la relève. »
    Ovila ne dit pas un mot. Il enfila son manteau et sortit prendre l’air. Quelque chose en lui venait de se rompre. Il ne voulait pas vraiment de la vie de la ferme. Dans quelques jours, il aurait dix-sept ans. Les études l’intéressaient plus ou moins mais elles lui évitaient de se fondre dans la routine des saisons.
    Il marcha jusqu’à l’école. Une lumière luisait au second étage. Il se demanda s’il devait lui-même aviser Emilie qu’il ne viendrait plus ou s’il devait attendre que son père le fasse. Alors même qu’il débattait la question, il frappa à la porte. Émilie vint lui ouvrir. Elle était en robe de nuit, ses cheveux dénoués. Ovila, intimidé, lui demanda s’il la dérangeait. Elle lui dit qu’il la

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