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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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donc pas à l’enterrement, pensant qu’il aurait lieu le lundi.
    Elle était au village à faire ses courses quand elle vit le corbillard revenir du cimetière. Elle vit ensuite la famille Pronovost retourner au Bourdais. Elle demeura figée à la fenêtre de la vitrine du magasin général, d’abord étonnée en comprenant la situation, puis chagrinée qu’Ovila n’ait pas eu besoin de sa présence, aussi discrète fût-elle.
     
    17.
    Un mois de novembre rempli de froidure avait succédé à un trompeur octobre qui avait fait croire que l’été pouvait ne pas avoir de fin. Madame Pronovost s’était remise de ses pénibles couches à la surprise non avouée du médecin et de la sage-femme. Elle avait accompagné son mari au cimetière visiter cet enfant qu’elle n’avait jamais vu. Marie- Anne dormait paisiblement à côté de ses trois frères. Félicité avait serré le bras de son mari en lui disant combien elle regrettait qu’ils aient eu à enterrer les trois premiers et le dernier de leurs enfants. Dosithée avait répondu qu’il n’avait jamais compris les intentions du Créateur, mais qu’il Lui était reconnaissant de lui avoir permis, à elle, de demeurer parmi eux. Il n’avait jamais raconté à Félicité tous les détails de l’accouchement, se contentant de lui expliquer que le médecin avait utilisé des pinces pour aller chercher le bébé et que le bébé, s’il avait pu, aurait survécu sans problèmes. Le médecin lui avait certifié que le bébé était mort de ne jamais avoir su respirer seul. Ce n’étaient pas les forceps qui l’avaient tué.
    Dosithée avait voulu effacer de sa mémoire le dilemme posé par le médecin. Il ne l’avait jamais avoué à sa femme.
    Il avait tenté de chasser, à grands coups de pipées et de réflexions, le son des gargouillis de l’enfant cherchant son souffle. Il avait essayé d’oublier qu’il ne s’était pas levé pour aller- le voir, croyant l'enfant en vie et en forme. Lui non plus n’avait jamais vu l’enfant de son vivant. Il le regrettait amèrement, troublé à l’idée qu’il aurait peut-être pu faire quelque chose, ne fût-ce que lui donner la bénédiction paternelle comme il l’avait fait pour ses trois premiers fils.
    Félicité et lui avaient quitté le cimetière, chacun s’appuyant sur le bras de l’autre, jetant un dernier coup d’œil au minuscule renflement de terre qui protégeait Marie-Anne du froid et de la vie. En revenant à la maison, Dosithée s’était enfin décidé à parler de l’achat de la terre du père Mercure. Depuis l’accouchement, il n’avait pas voulu ajouter un seul clou à la structure de la nouvelle maison. Il avait conduit sa femme devant l’ossature décharnée et elle était demeurée impassible. Dosithée lui dit qu’il la terminerait dès qu’il le pourrait. Félicité s’était contentée de hocher la tête. Elle n’en croyait pas un mot. Dosithée non plus. Il avait fait son deuil de cette maison. La charpente tenait, solidement arrimée à la terre. Les murs du premier étage étaient complètement montés. Félicité pouvait deviner la porte principale, la porte latérale et les fenêtres. Tout s’était arrêté au plancher de l’étage, que le vent et la pluie avaient à plusieurs reprises balayé et nettoyé de toute sciure. Félicité, suivie de Dosithée, avait quand même fait le tour de la maison. Elle lui avait finalement souri et l’avait remercié d’avoir pensé à elle. Dosithée s’était contenté d’émettre un grognement.
    Félicité n’avait plus reparlé de la maison, si ce n’est pour taquiner ses fils d’avoir si bien gardé le secret. Ces derniers, encore ébranlés par la peur qu’ils avaient eue de perdre leur mère et l’émoi qu’ils avaient ressenti d’enterrer une sœur, n’avaient pas commenté.
    Le mois de décembre, malgré les réjouissances promises, n’avait pas réussi à faire pénétrer de rires dans les maisons du Bourdais. Emilie, assise dans sa chambre, surveillait, la cuisson