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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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coucha sur son estomac.
    Césarisme !
    C’était aussi sale que tout ce qu’on pouvait imaginer.
    Et il en jouissait. Après l’embuscade, après l’excitation unique – ou l’extase unique – d’avoir ramené ses hommes en lieu sûr, il avait revécu en imagination ces quelques instants, encore et encore, souhaitant qu’ils n’eussent jamais pris fin. Tout au fond de son être, dépassant désormais Cummings, il y avait son désir de mener la section. Cela avait grandi, cela s’était allumé tout d’un coup, pour devenir une des expériences les plus exaltantes de sa vie. Il comprenait Croft qui regardait la montagne à travers les jumelles, Croft qui tuait l’oiseau. S’il s’interrogeait, il était tout juste un autre Croft.
    C’était bien cela. Toute sa vie il avait flirté avec des situations où il aurait pu manier les hommes, et toujours, comme s’il avait deviné l’étendue de ses impulsions, il s’était retiré du jeu, abandonnant les choses dès lors qu’elles commençaient de fructifier, laissant tomber les femmes, parce que, tout au fond de lui-même, il avait besoin de dominer et non de s’unir.
    Cummings avait dit une fois : « Vous savez, Robert, en réalité il n’y a que deux genres de libéraux et de révolutionnaires. Ceux qui ont peur du monde et qui veulent le changer pour leur propre bénéfice – le libéralisme à la manière juive ; et, d’autre part, les jeunes qui ne comprennent pas leurs propres désirs. Eux aussi entendent refaire le monde, mais ils n’admettent jamais qu’ils veulent le refaire à leur propre image. »
    Il l’avait toujours su, en partie consciemment, toujours inconsciemment. Il connaissait ce son de cloche.
    Non un fumiste, mais un Faust.
    Soit, mais qu’allait-il faire ? Sachant ceci, il n’avait pas le droit de continuer la patrouille ; objectivement parlant, il jouait avec la vie des huit hommes qui lui restaient, et il ne méritait pas cette responsabilité. S’il gardait une trace d’honnêteté, il ferait demi-tour le matin venu.
    La grimace intérieure. Il devrait, mais il ne le ferait pas.
    Le choc, le dégoût de lui-même qu’il ressentit à cette découverte, furent surprenants, presque agréables dans leur intensité. Il fut à demi horrifié de se voir si bien en transparence.
    Il devait revenir sur ses pas.
    Il quitta de nouveau sa couverture et se dirigea vers l’endroit où reposait Croft. Il s’agenouilla, sur le point de le secouer, quand Croft se retourna. « Qu’est-ce qu’il y a, mon lieutenant ?
    – Vous êtes réveillé ?
    – Oui.
    – J’ai décidé de rentrer dès le matin. » Ceci dit à Croft, il ne pouvait plus se rétracter.
    La lune faisait ressortir le profil immobile de Croft. Seul le muscle de sa mâchoire frémissait peut-être. Il garda le silence pendant plusieurs secondes, puis il répéta « Rentrer dès le matin ? » Il avait dégagé ses jambes de sous la couverture.
    « Oui.
    – Vous croyez pas qu’on devra explorer un peu plus le terrain ? » Il cherchait à gagner du temps. Il sommeillait quand Hearn vint le surprendre, et la nouvelle l’étourdit comme un coup d’assommoir. Il se sentait la poitrine vide.
    « A quoi bon explorer le terrain ? » demanda Hearn.
    Croft secoua la tête. L’embryon d’une idée lui apparut, mais il ne réussit pas à s’en saisir. Son esprit, ses muscles mêmes, étaient tendus en quête d’un appui, d’un avantage, Si, dans cet instant, Hearn l’avait touché, il se serait mis à trembler. « On devrait pas abandonner tout de suite, mon lieutenant. » Sa voix était enrouée. Peu à peu, à mesure qu’il se rendait compte de la situation, sa haine pour Hearn s’éveillait en lui. Il était en proie à la même frustration qui s’était emparée de lui quand Hearn lui avait commandé de s’excuser auprès de Roth, ou quand, après avoir retrouvé Wilson, il avait compris que l’entrée du col n’était pas gardée.
    L’embryon de son idée lui retraversa l’esprit. Il s’entendit parler avec une sorte de surprise. « Mon lieutenant, après l’embuscade ces Japonais se sont débinés.
    – Comment savez-vous ça ? »
    Croft lui raconta la découverte qu’il fit. « On pourrait passer maintenant. »
    Hearn secoua la tète. « J’en doute.
    – Vous n’allez même pas tenter le coup ? » Tout en essayant de comprendre les raisons de Hearn, il se rendait vaguement compte que Hearn n’agissait pas sous

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