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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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celui-ci n’était qu’un jeune blanc-bec, au-dessus de
     ses affaires, sans respect, et qui passait son temps à fouiner et à parler à
     travers son chapeau. François-Xavier avait travaillé si fort, ne rechignant
     devant aucune besogne, que ce soit de récurer les équipements ou de laver les
     planchers à quatre pattes. Il croyait au moins gagner en avancement. Il lui
     fallait tout son petit change pour ne pas envoyer paître ce jeune écervelé qui
     le rabrouait devant les autres et le traitait comme du poisson pourri. Il aurait
     eu bien besoin de détente ce soir, du réconfort des bras de sa femme, de sa
     tendresse. Mais Julianna l’avait repoussé. Il soupira. Il entendit sa femme qui
     revenait. Il essaya de faire semblant de dormir. Mais elle ne se recouchait pas
     à ses côtés, ne faisait pas grincer le lit, mais qu’est-ce qu’elle fait ? Elle
     repousse le drap, c’est vrai qu’il fait chaud, mais, elle le caresse, hum… oui,
     il va la prendre dans ses bras, mais…
    — Tu bouges pas, cette nuit, c’est moi qui décide de tout…
    Ah ! Julianna… il devait rêver. Un homme est maître du monde quand une femme,
     sa femme, prend la peine de le conquérir.

    Avec amusement, il suivit la lueur rouge de sa cigarette former des arabesques
     dans la nuit. Il tira une autre bouffée et changea de jeu. La bouche arrondie,
     il souffla de petits cercles blancs qui s’évanouirent l’un après l’autre. Lassé,
     Pierre jeta le mégot par terre. Assis sur le banc d’un parc, non loin de la
     chambre qu’il louait, le jeune homme roux déposa sa tête entre ses mains et
     regarda la cigarette finir de se consumer. Ces heures d’insomnie lui coûteraient
     cher demain quand, à l’aube, il devrait se présenter au travail. Mais à la
     pensée de regagner l’étouffante pièce contenant un lit et une commode, il se
     ralluma une autre cigarette. Plusqu’une et son paquet serait
     vide. La tentation de passer le reste de la nuit sur ce banc fut grande. Il
     imagina un policier, faisant sa ronde, le méprenant pour un voyou ou un pauvre
     bougre. Malgré qu’à Jonquière, il risquait d’être aussi tranquille qu’en pleine
     forêt. Écœuré par le goût du tabac, d’une pichenotte, il envoya virevolter la
     cigarette, à peine entamée, le plus loin possible dans le sentier de terre qui
     serpentait dans le parc. Il s’étendit sur le dos le long du banc. Les lattes de
     bois n’étaient pas très confortables et l’espace était étroit, mais la vue sur
     le ciel étoilé en valait le coup. Tout à coup, une étoile filante passa dans son
     champ de vision. D’un geste enfantin, Pierre ferma les yeux et voulut faire un
     vœu. Il se rassit d’un coup sec, exaspéré. Rien ne lui était venu en tête. Aucun
     désir, le néant total dans sa tête. Ce devait être la canicule de ce début de
     juillet. Bien sûr, il aurait pu souhaiter de trouver un gros montant d’argent ou
     de s’acheter la voiture rêvée, un modèle de 1951, toute neuve et rutilante ;
     mais quant à un vrai vœu, un vrai de vrai, un vœu de vie, rien ne surgissait à
     son esprit. Que se passait-il avec lui ? Comment, à l’âge de vingt-cinq ans
     seulement, ne pas désirer quelque chose de vraiment important ? Après la mort de
     Patrick O’Connor et son retour au Saguenay, il ne s’était pas trop posé de
     questions. Il avait été d’une grande aide lors du déménagement de sa famille.
     Jamais il n’avait vu sa mère si heureuse qu’à cette période. Elle préparait les
     cartons en chantant, avait mille projets et ne cessait de leur répéter combien
     ils seraient heureux à Chicoutimi. Quand Pierre avait visité le supposé
     appartement rêvé de sa mère, il avait été étonné de voir à quel point ce n’était
     pas si grand ni si chic. Sans qu’il comprenne pourquoi, sa mère semblait avoir
     idéalisé sa nouvelle demeure. Quand sa famille fut bien installée, il chercha un
     endroit pour lui.
    — Mais Pierre, il y a trois chambres dans l’appartement, s’était objecté sa
     mère. Tu peux en partager une avec Jean-Baptiste. Deux petits gars par chambre,
     vous allez être bien !
    — Justement maman, je suis plus un p’tit gars. Je suis habitué
     de faire les choses à ma manière. Je vais me trouver un bon boulot pis une
     chambre pas chère.
    — T’as pas idée de t’en retourner à Montréal ou Dieu sait où ?
    Il l’avait rassurée.
    — Non, non,

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