Les refuges de pierre
flamber en elle. C’était cela, le cadeau
qu’elles voulaient lui offrir ? Pour lui souhaiter la bienvenue ?
Elles voulaient qu’on se moque d’elle ? Elle comprit que de tous les
vêtements qu’elles avaient préparés, aucun ne convenait à une femme. Mais en
plus des vêtements d’homme, elles avaient voulu lui faire une coiffure
affreuse, pour achever de la rendre ridicule.
Ayla avait toujours aimé rire. Quand elle vivait avec le Clan,
elle avait été la seule à rire jusqu’à la naissance de son fils. Lorsque ceux
du Clan faisaient une grimace évoquant vaguement un sourire, ce n’était pas un
signe de bonheur. C’était l’expression de leur nervosité ou de leur peur. Son
fils était le seul bébé qui souriait et riait comme elle et, bien que cela mît
les autres mal à l’aise, elle adorait les gloussements joyeux de Durc.
Quand elle vivait seule dans sa vallée, elle riait de plaisir
devant les cabrioles de Whinney et de Bébé. Puis le sourire facile de Jondalar
et son rire rarement contenu lui avaient fait comprendre qu’elle avait
rencontré quelqu’un de semblable à elle. C’étaient de même le sourire
chaleureux de Talut et ses rires qui l’avaient encouragée à se rendre au Camp
du Lion à leur première rencontre. Elle avait noué de nombreuses amitiés
pendant leur Voyage, elle avait souvent ri, mais jamais on n’avait ri d’elle.
Elle ne savait pas qu’on pouvait se servir du rire pour faire mal. C’était la
première fois que le rire lui apportait de la peine et non de la joie.
Marthona n’était pas contente, elle non plus, de la vilaine
farce.
— Viens avec moi, Ayla, dit-elle. Je vais te donner une
tenue plus appropriée. Je suis sûre que nous trouverons parmi mes vêtements
quelque chose que tu pourras porter.
— Ou parmi les miens, proposa Folara, qui avait assisté à l’incident
et était venue réconforter la compagne de son frère. Ayla fit quelques pas vers
la demeure de Marthona, puis s’arrêta.
— Non, décida-t-elle.
Ces femmes lui avaient offert des vêtements d’homme comme « cadeau
de bienvenue » pour qu’elle parût étrangère, différente, pour montrer qu’elle
n’avait pas sa place chez les Zelandonii. Elle les avait remerciées de leur « cadeau »...
et elle le porterait ! Ce n’était pas la première fois qu’elle était la
cible de regards ébahis. Elle avait toujours été le phénomène, le laideron, la
fille étrange pour ceux du Clan. Ils n’avaient pas ri d’elle – puisqu’ils
ne savaient pas rire – mais ils l’avaient tous dévisagée avec
curiosité quand elle était arrivée au Rassemblement.
Si elle avait été capable de supporter d’être la seule qui fût
différente, la seule qui n’appartînt pas au Clan pendant tout le Rassemblement,
elle pouvait à coup sûr affronter les Zelandonii. Au moins, elle avait le même
aspect qu’eux. Cambrant le dos, elle serra les mâchoires et affronta du regard
la foule hilare.
— Merci, Marthona. Merci à toi aussi, Folara. Mais cette
tenue fera l’affaire. Elle m’a été remise en cadeau de bienvenue. Il serait
discourtois de la rejeter.
Un coup d’œil derrière elle lui apprit que les quatre amies n’étaient
plus là. Elles avaient dû retourner chez le frère de Marona. Ayla se tourna de
nouveau vers la foule nombreuse qui s’était massée sur la terrasse et avança.
Médusées, Marthona et Folara regardèrent Jondalar quand Ayla passa devant
elles, mais il ne put que hausser les épaules et secouer la tête.
Du coin de l’œil, Ayla saisit un mouvement familier : Loup
était apparu en haut du sentier et courait vers elle. Quand il la rejoignit,
elle se tapota les clavicules et il posa ses pattes de devant sur les épaules
de la jeune femme, lui lécha le cou, le prit délicatement entre ses mâchoires.
Un murmure monta de la foule. Ayla fit signe au loup de descendre et de la
suivre de près, comme elle lui avait appris à le faire à la Réunion d’Été des
Mamutoï.
Elle se fraya un chemin parmi les Zelandonii avec une
détermination, un air de défi qui les réduisirent au silence. Bientôt, plus
personne n’eut envie de rire.
Ayla marcha vers un groupe de gens qu’elle avait déjà
rencontrés. Willamar, Joharran, Zelandoni la saluèrent. Se retournant, elle
découvrit que Jondalar lui emboîtait le pas, suivi de Marthona et de Folara.
— Il y a encore ici des personnes que je ne connais pas. Tu
veux bien me
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