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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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de saillir de sa geôle déshonorante, n’aurait pas
assisté, dans les armées du roi, au siège de Saint-Jean-d’Angély et n’y aurait
pas contracté, comme bon nombre des nôtres, les fièvres dont il mourut le
vingt-trois juin, par un soleil radieux, avant même que Louis n’emportât
Saint-Jean-d’Angély.
     
    *
    * *
     
    — Comte, un mot de grâce !
    — Belle lectrice, je vous ois.
    — Je désire vous poser questions, étant travaillée de
doutes sur cette guerre civile où je vois Louis se jeter.
    — Madame, il ne s’y jette pas. On l’y contraint. Si
Louis ne prenait pas les armes, nous aurions bientôt pas une, mais deux
Frances : une France du Nord qui serait catholique et une France du Midi
qui, dans une large mesure, serait protestante.
    — Mais n’est-ce pas trahir l’édit de Nantes que de
lancer une croisade contre les protestants ?
    — Nenni, Madame, ce n’est pas une croisade. Bien loin
de là. Louis, tout pieux qu’il soit, n’a jamais marqué la moindre hostilité à
l’égard des huguenots, tout le rebours. Il a toujours nommé aux grandes charges
de l’État, sans consulter le moindre les croyances des candidats. En ses
maillots et enfances, il aimait fort le jeune Montpouillan – fils du duc
de La Force – et s’indignait qu’un prédicateur osât, en sa présence, s’en
prendre à la religion de son père. Mieux même, marchant contre les huguenots
rebelles à ses lois, il apprend qu’à Tours, quelque populace, excitée par les
prêtres, s’est attaquée à un mort protestant qu’on menait en terre, a brûlé le
corps, brûlé le temple et profané le cimetière. Il dépêche aussitôt sur place
des gardes et des juges, lesquels, après enquête, se saisissent des meneurs et
les pendent.
    « L’année suivante, il ne craint pas de blâmer
publiquement le prince de Condé, parce qu’il a participé à Toulouse aux
processions des Pénitents Bleus qui, se croyant revenus au temps de la Ligue,
réclamaient l’éradication de la religion réformée. En fait, Madame, ce n’est
pas Louis, mais, comme je pense vous l’avoir dit, les protestants eux-mêmes qui
ont violé l’édit de Nantes, tant dans l’esprit que dans la lettre.
    — Vous l’avez dit, en effet, ajoutant qu’ils en
acceptaient les avantages tout en en refusant les obligations. Mais, en
pouvez-vous apporter les preuves ?
    — Ah Madame ! Il y en a plus qu’il n’en
faut ! Pas davantage que les ligueux, les huguenots n’avaient la plus
petite idée de la tolérance. Dès lors qu’on leur avait donné la liberté de
conscience et la liberté du culte, ils la voulaient pour eux seuls ; cela
impliquait un pouvoir sans partage et, le cas échéant, ils s’en saisissaient
par la force. En 1621, ils s’emparèrent par surprise de Privas. Ils se
rendirent maîtres de Nègrepelisse après avoir massacré la nuit la garnison
royale de cinq cents hommes. Pendant ce temps, ils tenaient à La Rochelle une
assemblée, dressaient des statuts, levaient des impôts, interceptaient ceux du
roi, constituaient des milices, élevaient des fortifications. Bref, ils
tâchaient d’établir une république dans le royaume, laquelle n’eût obéi qu’à
leurs propres lois. Et comme on s’efforçait de venir à composition avec eux,
ils poussèrent l’arrogance jusqu’à réclamer la restauration du statu quo
ante dans le Béarn. Ce qui voulait dire en clair qu’il fallait en chasser
les prêtres catholiques, fermer les églises et rendre les biens du clergé aux
pasteurs. Comme si cela ne suffisait pas encore, ils demandaient que le roi
rappelât ses troupes du Béarn, du Poitou et de Guyenne, bref qu’il laissât le
champ libre à leurs empiétements. Autant dire qu’ils demandaient à leur
souverain qu’il capitulât devant eux.
    — Je gage néanmoins, Monsieur, que vous trouverez
quelques excuses à vos chers huguenots…
    — Ils en ont, en effet, ayant été pendant un
demi-siècle si honnis, haïs et persécutés qu’ils sont devenus d’une méfiance
extrême et prennent de tout des soupçons et des ombrages. Par exemple, ils
gardaient une fort mauvaise dent au roi de France pour son intervention armée
dans le Béarn. C’est à Jeanne d’Albret, la grand-mère de Louis, qu’ils devaient
la radicale décatholisation du pays. À Henri IV, il savait gré d’avoir
doucement cligné les yeux sur la violation de ledit de Nantes qui avait permis
à ce sanctuaire de s’être

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