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L’ESPION DU PAPE

L’ESPION DU PAPE

Titel: L’ESPION DU PAPE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Madral , François Migeat
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cathares pour introniser les leurs dans la nouvelle religion. Il sait qu’elles remplacent le baptême chrétien, mais il n’a encore assisté à aucune.
    L’un des hommes s’agenouille devant une planche sur des tréteaux. Les mains posées à plat sur le drap blanc de la table, il attend. Un de ses comparses vient placer un livre en équilibre sur sa tête. Touvenel reconnaît cette fois nettement une bible. Les femmes relèvent toutes le voile noir qui couvrait leur visage. La cérémonie vient de commencer.
    Celui qui paraît être leur chef s’approche de l’homme à genoux. Il sort son propre livre de son étui en cuir, l’ouvre au-dessus de la tête du communiant et prononce à voix forte, sur un ton magnifié par les phrases qui passent ses lèvres, tandis que tous s’agenouillent autour d’eux :
    —  Benedicite, parcite nobis ! Louis, as-tu la ferme volonté de recevoir le baptême spirituel et de pratiquer toutes les vertus par lesquelles on devient un bon chrétien ?
    — Je m’y engage, répond l’homme.
    — Tu dois avoir dans l’esprit qu’en ce moment tu viens pour la seconde fois devant Dieu et devant le Christ et le Saint-Esprit. Tu es ici pour recevoir le pardon de tes péchés, grâce aux prières des bons chrétiens et par l’imposition des mains, puisque tu es en présence de l’Église de Dieu.
    — Je l’ai dans l’esprit et je le comprends.
    — Il convient que tu observes les commandements de Dieu et que tu haïsses le monde. Si tu agis ainsi jusqu’à la fin, nous avons tous ici l’espérance que ton âme aura la vie éternelle.
    L’officiant fait un signe. Surgissent alors de derrière des buissons où ils attendaient cachés d’autres hommes d’allure modeste, en chausses et tunique de coutil ou de lin, brodequins de cuir ou pieds nus, chapeautés de paille ou de feutre, et d’autres, d’allure plus noble, avec des manteaux de drap brodé, des bottes et des bourses de cuir décorées à la ceinture. Tous s’approchent et forment cercle autour des hommes en noir. « Des paysans et des artisans, pense Touvenel. Mais aussi des petits nobles des campagnes. La nouvelle religion s’est considérablement répandue depuis mon départ. »
    La voix du lecteur poursuit son oraison.
    —  Benedicite, parcite nobis ! Bons chrétiens, nous vous prions pour l’amour de Dieu d’accorder à notre ami, ici présent, quelque peu de ce bien que Dieu vous a donné à tous !
    L’homme à genoux continue :
    —  Parcite nobis ! Pour tous les péchés que j’ai pu faire ou dire, ou penser ou opérer, je demande pardon à Dieu, à l’Église et à vous tous.
    L’assemblée répète après lui :
    — Par Dieu, par nous et par l’Église, que tes péchés te soient pardonnés. Nous prions Dieu pour qu’il te pardonne.
    Les hommes en noir se relèvent et convergent vers l’homme, toujours à genoux, puis posent leurs mains les unes sur les autres au-dessus de sa tête. Touvenel a beau avoir vu des rituels de toutes sortes pour prier Dieu, celui-ci lui paraît particulièrement étrange et émouvant dans sa simplicité et sa communion de tous autour d’un seul.
    L’ordonné reprend :
    —  Benedicite, parcite nobis, amen. Fiat nobis, Domine, secondum verbum tuum. Adoremus Patrem et Filium et Spiritum Sanctum. Père saint, accueille ton serviteur dans ta justice et mets ta Grâce et ton Esprit-Saint sur lui !
    Touvenel voit l’officiant en noir relever le baptisé et l’embrasser en travers de la bouche. Puis l’autre lui rendre son baiser et s’incliner trois fois profondément en disant :
    — « Bons hommes », « bonnes femmes », avec la bénédiction de Dieu, vous m’avez donné le consolamentum d’ordination. Qu’il me conduise à une bonne fin.
    Le maître de cérémonie baise son livre, l’élève vers le ciel, puis le fait passer de main en main afin que les autres le baisent à leur tour. Et les hommes s’embrassent sur la bouche entre eux, et les femmes entre elles les imitent.
     
    Un cri féroce vient soudain perturber l’ordonnance de la cérémonie. D’autres lui répondent, suivis d’un galop de chevaux. Les cavaliers blancs à cagoule sont sortis du couvert et se ruent sur les hommes en noir. Ceux qui assistaient à la cérémonie sans vraiment y participer n’ont que le temps de s’égailler entre les bosquets de genévriers et de dévaler les pentes rocheuses. Les assaillants les délaissent et concentrent leur fureur sur

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