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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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bien qu’il ne faille renoncer à aller faire notre cour aux muses par ce beau clair de lune !
    – Vous pouvez en être certain ; ne voyez-vous pas que nous laissons les toits académiques à notre gauche ? Nos guides prennent la grande route.
    Ils étaient alors sortis des prairies marécageuses, et se dirigeaient du côté d’un chemin qui conduisait dans l’intérieur du pays.
    – Vous feriez bien d’appeler votre valet et de monter à cheval, major Lincoln, dit Polwarth d’un ton douloureux ; il faut faire provision de forces, à ce que je vois.
    – Ce serait une folie à présent ; je suis trempé, et, par prudence, il faut que je continue à marcher.
    La bonne humeur de Polwarth était passée ; la conversation commença à languir un peu. Ils ne s’adressaient plus que quelques mots par moments sur les incidents que pouvait offrir le voyage. Il n’y eut bientôt plus lieu de douter, par la direction donnée aux colonnes, ainsi que par les pas précipités de leur guide, que la marche ne dût être forcée et de quelque longueur. Mais, comme l’air commençait à se rafraîchir, Polwarth lui-même ne fut pas très-fâché de réchauffer ses membres engourdis par un exercice plus qu’ordinaire. Les colonnes s’élargirent pour donner plus d’aisance aux soldats, quoiqu’ils continuassent à garder leurs rangs et à marcher au pas avec leurs camarades. De cette manière le détachement s’avançait rapidement et en silence, comme si chacun eût senti l’importance de l’entreprise qui lui était confiée.
    D’abord tout le pays semblait plongé dans un profond sommeil ; mais, à mesure que les troupes allèrent en avant, les aboiements des chiens et le bruit des pas des soldats attirèrent à leurs fenêtres les habitants des fermes, qui, dans un muet étonnement, regardèrent défiler les troupes sur lesquelles la lune jetait une vive clarté. Lionel tournait la tête pour observer la surprise peinte sur les traits des membres d’une de ces familles qui avaient été troublées dans leur sommeil, lorsque le bruit sourd et lointain d’une cloche d’église vint frapper son oreille ; elle sonnait coup sur coup, évidemment pour donner le signal d’alarme. Ce bruit retentissait avec une sorte de majesté le long de la vallée dans laquelle ils venaient d’entrer.
    Tous les soldats penchèrent aussitôt la tête pour écouter avec attention, et bientôt des décharges d’armes à feu se firent entendre au milieu des collines ; les cloches commencèrent à se répondre dans toutes les directions, et les sons, répétés par les échos d’alentour, allèrent se perdre dans l’éloignement. On n’entendit alors de tous côtés que les instruments et les carillons de toute espèce que le peuple avait à sa disposition, ou qu’il sut inventer pour appeler la population aux armes. Des feux furent allumés sur toutes les hauteurs. Le bruit des cornemuses et des trompettes marines se mêlait à celui des décharges de mousqueterie et aux sons variés des cloches, tandis qu’on entendait retentir des pas de chevaux, comme si ceux qui les montaient passaient au grand galop le long des flancs du bataillon.
    – En avant ! Messieurs, en avant ! s’écria le vétéran de marine au milieu de ce tintamarre ; les Yankies sont réveillés, et ils se remuent ; nous avons encore une longue route à faire. En avant ! l’infanterie légère ; les grenadiers sont sur vos talons !
    L’avant-garde doubla le pas, et tout le détachement s’avança avec autant de vitesse que la nécessité d’observer les rangs pouvait le permettre. Ils continuèrent à marcher pendant plusieurs heures sans s’arrêter, et Lionel calcula qu’ils avaient dû faire plusieurs lieues dans l’intérieur du pays. Ces sons d’alarme avaient alors cessé ; ils s’étaient perdus dans les terres, et se répétaient sans doute à une trop grande distance pour qu’ils pussent parvenir jusqu’à eux ; mais le bruit des chevaux qui se précipitaient le long des bas-côtés de la route annonçait que des hommes continuaient à les dépasser pour courir les premiers au lieu où ils s’attendaient qu’il y aurait un engagement. Au moment où la clarté vacillante de la lune s’affaiblissait de plus en plus devant les premiers feux du jour, le cri de halte  ! parti de l’arrière-garde, retentit jusqu’à la tête de la colonne de l’infanterie légère.
    – Halte ! répéta Polwarth avec la

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