Londres, 1200
l’affirmative, aussi le comte lui remit-il une lettre pour son
cousin et suzerain, le roi de France. La réponse au courrier que Philippe
Auguste avait fait porter par Guilhem.
Chapitre 15
R evenant
à Lamaguère le jour de la Saint-Benoît [37] ,
Guilhem aperçut Robert de Locksley venant à sa rencontre, prévenu de son
arrivée par le guetteur dans la tour.
— Nous avons de la visite, lui dit son ami,
et il fallait que je te parle avant.
— La visite de qui ?
— Anna Maria m’a dit que vous vous
connaissiez. Il se nomme Gautier le Normand.
— Gautier est ici ? s’étonna Guilhem.
Gautier le Normand était le chevalier d’Aliénor
qui avait conduit Anna Maria à Saint-Gilles l’année précédente, quand elle
était venue chercher l’aide de Guilhem. Ils avaient fait ensemble une partie du
voyage jusqu’à Paris.
— Que vient-il faire ?
— Il est arrivé avant-hier, venant de
Castille, avec une troupe d’escorte. C’est Aliénor qui l’envoie. Comme nous l’a
dit Châteauneuf, le fils de Philippe de France s’apprête à épouser Blanche et
sa grand-mère est allée la chercher. En ce moment, elles sont en route pour
Bordeaux où elles s’arrêteront pour les fêtes de Pâques. À cette occasion, la
duchesse me fait quérir.
— Que te veut-elle ?
— Je l’ignore, mais je suppose que c’est en
rapport avec la vente de mes terres dont a dû s’occuper l’abbé du Pin.
La présence simultanée d’envoyés de Philippe
Auguste et d’Aliénor au château était fâcheuse, songea Guilhem. Heureusement
qu’ils n’avaient parlé à personne des véritables raisons de la venue d’Amiel de
Châteauneuf.
— Il ne faut pas que Gautier se doute de
l’affaire du testament, remarqua Guilhem, tandis qu’ils s’approchaient de la
barbacane.
— Ne t’inquiète pas. Châteauneuf, qui était
là lors de l’arrivée de Gautier le Normand, lui ajuste dit qu’il venait te
porter une invitation du roi pour assister au mariage de son fils.
— La demande d’Aliénor change quand même nos
projets, fit Guilhem, soucieux.
— Non, j’ai dit à Gautier que j’avais prévu
de marier Regun et Mathilde en Angleterre et, à cette occasion, de
t’accompagner à Paris avant de m’embarquer à Boulogne. Mais puisque Aliénor
veut que je la rejoigne, il sera plus simple que je parte de Bordeaux. Tu
n’auras qu’à dire à Gautier que tu m’accompagnes et que tu demanderas au
capitaine de la nef de te laisser en chemin, dans un port breton d’où il est
facile de gagner Paris.
Guilhem resta silencieux un moment, évaluant les
avantages et les inconvénients d’un tel voyage en nef avant de conclure que son
ami avait eu une bonne idée. De plus, un voyage par la mer serait moins dangereux
que sur les routes. Encore faudrait-il qu’ils trouvent un bateau…
— Sera-t-il si facile d’embarquer à
Bordeaux ?
— Tu t’en souviens, quand j’ai rejoint
Richard, il y a deux ans, je ne suis pas resté avec lui tant j’avais hâte de
faire connaître l’Angleterre à Anna Maria. Une nef m’a mené en trois semaines
dans un nouveau port construit par un marchand français, Jean de Gisors, sur la
côte sud de l’Angleterre. L’endroit s’appelle Portsmouth. Il est si bien abrité
que presque toutes les nefs de Bordeaux y font escale pour débarquer du vin et
du pastel. De là, il suffit de deux jours pour se rendre à Huntington… ou à
Londres.
— Tu as raconté cela à Gautier ?
— Je lui ai dit que j’allais t’en
parler !
Guilhem confirma donc à Gautier son départ pour
Paris et le changement de leur itinéraire. C’était décidé, lui et Robert de
Locksley feraient route ensemble jusqu’à Bordeaux, puis embarqueraient pour
l’Angleterre avec une escale en Bretagne.
Gautier le Normand leur proposa alors de se
joindre à lui. Il leur suffirait de quatre ou cinq jours pour traverser la
Gascogne.
— Vous oubliez Mercadier et ses
Brabançons ! remarqua Guilhem.
— Mercadier sait qui je suis, répondit
dédaigneusement Gautier le Normand, et il est aux ordres d’Aliénor. De plus,
j’ai un sauf-conduit de la duchesse.
— Mercadier me connaît aussi, plaisanta
Guilhem, et si je tombe entre ses mains, sauf-conduit ou pas, je doute qu’il me
laisse repartir vivant.
— Il en sera de même pour moi, approuva
Robert de Locksley.
— Mercadier m’obéira ! protesta Gautier.
— Croyez-vous ? Mercadier est l’ennemi
du genre
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