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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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couleur bleue, elle s'agitait, s'enflammait, se blessait de ses propres paroles.
    — Ce mariage, comprenez-le, sera le point d'orgue aux accords entre les deux royaumes. Il est le fruit des ruses, des pressions, de l'habileté du cardinal. Surtout, surtout, il comblera de joie Anne d'Autriche. Elle verra se réaliser ses vœux les plus chers, la paix avec son frère le roi d'Espagne, et l'union ce son fils avec la fille de ce frère. Oh, comprenez mon malheur ! Je ne suis revenue à la cour que pour assister au triomphe d'une rivale.
    — Ce mariage n'est pas pour demain..., répondit Cécile afin de tenter de calmer sa compagne. Mais, j'y songe, ne pouviez-vous pas, Mademoiselle, vous dispenser de ce long voyage puisqu'il vous est si pénible ?
    — Par malheur, non. En l'absence de mon père, la reine et le cardinal exigent ma présence à la cour. Pas par sympathie... Parce qu'ils ont besoin de moi. Je suis face aux Espagnols le gage de la réconciliation de tous les Français, frondeurs ou non, la preuve que le pays est gouverné dans le calme et l'union.
    — Vous êtes aussi la première princesse du royaume. Voyez les honneurs infinis que l'on vous rend.
    Cela n'intéressait plus Anne-Louise. Sa déception était trop vive.
    Elle avait fait préparer, comme les autres dames — plus que les autres puisqu'elle en avait les moyens —, des monceaux de vêtements de taffetas, de satin, de lin brodé, de velours fourré, en prévision du prestigieux caravansérail.
    Perrette était tranquille. Sa maîtresse pouvait affronter le froid, le chaud, l'été, l'hiver, les cérémonies royales comme les promenades au bord de mer ou dans les villes renommées pour leurs trésors artistiques. Les charrettes, innombrables, regorgeaient de lits à dresser, de meubles à déployer, même de lustres en cristal, de coffres contenant onguents, pommades pour guérir ou embellir la princesse. Il fallait être prudent. Bordeaux, Toulouse, la Provence. Des pays barbares, peut-être...
    Partout, Mademoiselle se devait de tenir son rang de cousine germaine de Louis. De remplacer son père. Une fois de plus. Mais elle n'en ressentait que désillusion et chagrin.
    À la première étape, à Chambord, chez son père justement, elle se sentit humiliée de voir l'insolente cour du jeune roi se moquer sans réserve de la cour surannée du vieil oncle. Les serviteurs avaient blanchi sous le harnais en même temps que leur maître, les vêtements des dames étaient démodés, les mets proposés aux repas et les distractions aussi.
    Dans le parc giboyeux du château, Louis, négligeant biches et lapins, s'acharna à chasser les faisans, orgueil de Gaston. Il en tua quatorze. Le duc en fut au désespoir.
    — Il était encore plus déçu, raconta Anne-Louise à Cécile, de constater que sa fille Élisabeth n'épouserait pasLouis. Sans vergogne, il s'en est plaint à moi. Vous vous rendez compte ? À moi que tout le monde avait imaginée sur le trône de France ! Il ne comprend rien à ma propre déception. Mieux, il m'a même recommandé mes sœurs, avouant que leur mère ne leur serait pas d'un grand secours, s'il venait à disparaître.
    — Il n'en est pas là, remarqua Cécile.
    — Je ne sais trop. Et c'est ce qui me tracasse. D'un côté, je ne peux oublier nos brouilles, ses injustices, le mal qu'il m'a fait. De l'autre, je garde de notre rencontre à Chambord l'image douloureuse d'un père épuisé. Il est retourné dans son cher domaine de Blois, mais il souffre, m'a dit son médecin, d'une énorme loupe purulente dans le dos et de fréquents étourdissements.
     
    Les semaines, les mois passaient. Allait-elle devenir l'éternelle suivante d'une famille royale qui ne l'aimait guère ? Qu'en pouvait-elle espérer ? Et quel avenir y avait-il pour elle dans ce monde de l'apparence ?
    Elle, si emportée, si frémissante, n'avait plus personne, dans cette cour de plus en plus guindée, avec qui se laisser aller. Et les règles de l'étiquette, grâce auxquelles elle avait longtemps cru trouver un rempart protecteur pour affermir sa place, lui apparaissaient à présent mécaniques et vaines. Au diable, les révérences, les préséances, les silences mensongers ! Elle aurait voulu réagir sans retenue, s'exclamer, pleurer ou rire, questionner, crier même, si elle en avait envie. Les convenances étouffaient Mademoiselle.
    Plongée dans sa tristesse, elle s'intéressait peu à l'actualité dont Cécile était friande.
    — Les

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