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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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déclara :
    — C'est à cause de ma négligence que ton fils est perdu. Je l'ai laissé quelques instants et quand je suis revenue, le fils de Dent Cassée était là sur le toit de l'ulaq à la place de Shuku.
    Tout en parlant, elle avançait à petits pas vers son époux jusqu'au moment où elle eut les jambes contre son dos. Kiin, elle aussi, vint se tenir près de Samig. Trois Poissons, elle, demeura près de la cache de nourriture à trancher de la graisse durcie pour la mélanger à des baies séchées.
    — Nous ne devrions rien prendre, remarqua la femme.
    Mais l'homme Ugyuun objecta prestement :
    — Seulement ce que ta femme a mangé pendant son séjour chez nous.
    — Presque tout le temps elle a été malade. Presque tout le temps elle n'a rien avalé, remarqua la femme. D'ailleurs, elle m'a déjà offert une statuette.
    Sur quoi elle tira sur une lanière pendant à son cou et désigna le guillemot sculpté qui y était suspendu.
    Le visage de l'homme Ugyuun s'assombrit mais, levant les yeux sur Samig, il dit :
    — Je ne demande rien, juste l'hospitalité pour la nuit et de quoi manger, pour ma femme et moi.
    Alors Samig lui aussi crut ce qu'ils avaient dit. Pourquoi un homme qui aurait vendu un bébé n'exigerait rien pour le retour d'une épouse ?
    — Tu auras de l'huile, de la viande et des peaux de phoque pour la fourrure, déclara Samig. Tu auras des couteaux, des paniers et des tapis de sol. Chaque fois que tu passeras par la plage des Commerçants, tu y trouveras un abri pour toi et ceux qui t'accompagneront. En nous rendant Kiin, vous êtes devenus nos frères. Si tu veux bien m'accepter comme frère...
    L'homme Ugyuun sourit, sa femme aussi.
    — Frères, dit-il.
    Il porta alors son bol à ses lèvres et but une longue gorgée.
    Au milieu des bavardages, des rires, de la foule qui emplissait l'ulaq, malgré ce que Samig éprouvait à cause de la perte de Shuku, Kiin emplissait son esprit, son nom résonnait comme un chant dans ses pensées. Kiin dans ses bras, Kiin dans sa chambre.
    Il distinguait les signes de sa maladie. Ses bras étaient maigres, ses traits tirés, ses cheveux ternes. Les cicatrices laissées par sa chute dans la falaise aux œufs étaient rose vif, ses ongles arrachés n'avaient pas encore repoussé, mais il voulait tenir Kiin, laisser sa vigueur se couler en elle. Pourtant, que faire d'autre que de rester avec tous ces gens, à faire semblant d'écouter, de répondre à leurs questions ?
    — Es-tu heureux ?
    C'était Chagak, sa mère, les bras chargés de bols de poisson séché, de poisson fumé, d'oursins fraîchement péchés dont la coquille avait été cassée.
    — Je suis fatigué, répondit Samig qui souriait pour adoucir ses paroles.
    Elle commença à dire quelque chose quand un des hommes réclama à manger. Elle s'éloigna donc et Kayugh parla assez fort pour se faire entendre de tous.
    — Aigle et Petite Plante vont demeurer dans mon ulaq. Je réclame cet honneur parce qu'ils ont ramené ma fille. Tout le monde devrait venir. J'ai beaucoup de nourriture.
    Kayugh invita les deux Ugyuuns à le suivre. Chagak leur emboîta le pas, imitée par tous, même Trois Poissons.
    Pour un temps, Samig s'affaira, ramassant les bols, arrangeant les tapis de sol. Il leva les yeux et vit que Kiin l'observait, souriant comme une mère sourirait à un haut fait de son enfant. Soudain, elle fut dans ses bras. Ses seins, encore lourds du lait de Shuku, s'appuyaient contre sa poitrine, il glissa sa main gauche sous la chaleur de sa longue chevelure et remonta jusqu'à sa nuque.
    — Ma main droite, dit-il en lui montrant ses doigts repliés.
    — Peu m'importe ta main, dit Kiin en pressant son ventre contre la partie d'homme de Samig.
    Elle eut un petit rire doux et tendre. Il la prit dans ses bras et l'emporta dans sa chambre.
    78
    Dans l'ulaq de Kayugh, Trois Poissons alla tranquillement trouver chaque homme et chaque femme et leur demanda d'écouter ce qu'elle avait à leur dire.
    Lorsqu'elle arriva à Chagak, celle-ci la dévisagea, essayant de voir si les yeux de la jeune femme étaient empreints de tristesse ou de colère, mais elle ne vit qu'inquiétude. Aussi attendit-elle que Trois Poissons se soit adressée à chaque habitant du village, un groupe si petit que son cœur se serra d'angoisse. Comment pou-vaient-ils continuer de vivre avec si peu de chasseurs, si peu de femmes ? Mais, se dit-elle, nous avons réussi jusqu'à maintenant, et il n'y a aucun

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