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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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    — Peut-être un veau marin, ou n'importe quel animal prenant en pitié les hommes qui ont besoin de viande.
    9
    Samig resta éveillé tard dans la nuit. La joie qu'il avait éprouvée dans la journée quand Trois Poissons lui avait annoncé qu'elle portait un enfant semblait liée à la lumière. Quand le soleil se coucha et que la nuit se referma sur les ulas, les craintes que Samig avait repoussées envahirent ses pensées et il vit Trois Poissons, Takha et le nouveau bébé malades et mourant de faim.
    « Tu es le chef de ce village, murmura un esprit dans l'obscurité de sa chambre. Tu es responsable des besoins de ton peuple. »
    Samig tenta d'élaborer des plans pour la chasse et la pêche, mais les idées lui échappèrent comme des rêves dont on ne se souvient qu'à moitié.
    — Au matin, murmura-t-il à voix haute afin que les esprits tracassiers l'entendent et le laissent dormir, je sortirai avec mon ikyak et je laisserai le vent et la mer me dire ce que je dois faire.
    Malgré cela, il ne dormit pas et avant l'aube, il se leva enfin, enfila ses jambières, son parka et son chigadax et sortit. Le soleil était tout neuf, doré et orangé dans un ciel presque sans nuages. Samig sentit son esprit s'alléger tandis qu'il guidait son ikyak dans la baie jusqu'à l'embouchure. Là, il distinguait les laisses en direction de la mer du Nord, où l'eau se couvrait d'écume quand chaque vague franchissait les barres de bas-fonds.
    Les alques se rassemblaient, troupeaux chevauchant les vents, éclairs noirs virant soudain au blanc comme ils tournaient leur poitrine vers le soleil. Au début de l'hiver, toute la tribu d'alques se rassemblait, puis s'envolait pour ne revenir qu'au printemps, à la fonte des neiges. Samig se demanda où ils allaient. Possédaient-ils des villages d'hiver sur d'autres plages ?
    Il ferma les yeux et imagina la joie que ce serait d'avoir des ailes.
    Comme un ikyak quand un chasseur pagaie avec le vent, se dit-il. Samig rouvrit les yeux pour voir les alques prendre à nouveau leur essor, voler tout près de lui pour virer juste avant de l'atteindre. Samig leva sa pagaie dans leur direction puis tendit sa main gauche ouverte et vide.
    — Frères ! Je suis un ami. Je n'ai pas de couteau.
    Puis, tandis que le vent et le soleil lui éclaircissaient
    l'esprit, les peurs de la nuit s'estompèrent et il sut ce qu'il devait faire.
    Samig alla d'abord trouver Kayugh et lui demanda si tout le monde — hommes, femmes et enfants — pouvait manger ensemble ce soir dans l'ulaq de Kayugh. Kayugh observa Samig derrière ses yeux mi-clos. Cela rappela à Samig son enfance, car ce regard-là posait une question mais n'exigeait pas de réponse.
    — Après le repas, nous dresserons des plans pour l'hiver, lui dit Samig.
    — Chacun prendra-t-il sa nourriture dans ma réserve ?
    — Non, non, ils apporteront à manger, répondit Samig avant d'ajouter en hâte : J'ai une bonne raison.
    — Une bonne raison pour se réunir dans mon ulaq ?
    — Oui.
    — Economiser ton huile de lampe ? Éloigner Waxtal de ta cache de nourriture ?
    Samig ouvrit la bouche pour expliquer que son ulaq était trop petit, qu'il tenait à la présence des femmes autant qu'à celle des hommes, mais il s'aperçut que son père le taquinait car le ventre de Kayugh était secoué d'un rire muet. Samig sourit alors.
    Kayugh rit franchement, donna une bourrade à son fils et lui tendit un bol de bon ragoût préparé par Chagak.
    Cette nuit-là, quand chacun se fut restauré, les hommes s'installèrent en cercle près de la plus grosse lampe, les femmes derrière eux. Samig avait prévu d'interroger les femmes — ce qu'il restait dans chaque cache de nourriture, combien de temps dureraient les réserves. Ses questions les mettraient peut-être mal à l'aise — d'ordinaire, aux réunions du village, seuls les hommes parlaient. Mais comment organiser des expéditions de chasse sans connaître la quantité de viande nécessaire ?
    Samig prit la parole.
    — Les Chasseurs de Baleines ont des coutumes qui ne sont pas les nôtres. Parfois, pendant l'année que j'ai passée chez eux, je les trouvais stupides. Parfois, je les trouvais sages. Quoi qu'il en soit, j'ai beaucoup appris. Au cours des réunions des Chasseurs de Baleines, lorsque des plans étaient dressés pour la chasse et les réserves d'hiver, leurs femmes parlaient.
    Samig regarda les femmes par-dessus les têtes des hommes.
    — Nous, les hommes, poursuivit-il,

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