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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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soupirant.
    — Rappelleras-tu les esprits ?
    — Écoute.
    Dyenen porta alors les mains à ses oreilles et hocha la tête. Alors, le Corbeau aussi entendit la voix tranquille d'un enfant qui s'exprimait en langue Rivière.
    — Je suis Shuku.
    Le Corbeau eut la gorge nouée et mal au ventre.
    — Appelle quelqu'un d'autre, dit-il d'une voix affaiblie.
    — Je suis Shuku, répéta la voix. Pourquoi dis-tu que Souriceau est mon frère ?
    — Quel est cet esprit ? demanda le Corbeau après une profonde inspiration, donnant de la force à ses mots comme s'il n'avait pas peur.
    — A ton avis ?
    A quel point Dyenen était-il proche des esprits ? Est-ce qu'ils allaient et venaient à son gré ?
    — Tiens, sens, fit Dyenen.
    Sur quoi il s'empara de la main du Corbeau qu'il posa sur sa gorge. Puis il dit des paroles de politesse comme si les deux hommes se voyaient pour la première fois. Le Corbeau sentit la vibration des mots dans la gorge du vieil homme.
    Puis la voix de Shuku revint. Elle appelait depuis le trou de fumée, comme si l'enfant était agenouillé en haut de la demeure en peau de caribou. Au début, le Corbeau ne pensa qu'aux paroles de Shuku, mais il s'aperçut bientôt que sa main, qui n'avait pas quitté la gorge de Dyenen, sentait toujours les vibrations des mots et que la voix de Shuku émanait de la gorge du vieillard.
    Le soulagement, puis la colère le gagnèrent jusqu'au moment où un petit rire monta en lui pour éclater, dominant tout.
    — C'est une ruse, murmura-t-il.
    — C'est une ruse. Ruse pour ruse.
    Le Corbeau rit tant qu'il en eut mal au ventre et que des larmes jaillirent de ses yeux.
    — Le sac de médecine était le véritable pouvoir, ajouta Dyenen.
    Mais le Corbeau, s'essuyant les yeux, se contenta de répondre :
    — Montre-moi.
    — Il va falloir que tu t'exerces pendant de longues journées, tout seul.
    — Je me suis déjà engagé à jeûner en quête de visions.
    — Ce n'est pas la même chose.
    — C'est plus difficile, répondit le Corbeau.
    — Non. Il est plus difficile de jeûner et de prier. Écoute. Quand un homme parle, il ouvre grand sa gorge pour laisser sortir les mots. Pour faire ce que je fais, tu dois garder la gorge serrée, la pincer pour que les mots s'échappent lentement. La bouche est presque fermée et la langue maintenue en arrière. Elle ne bouge pas, sauf l'extrémité de la pointe. Comme cela — il mit une main autour de son cou — elle est très serrée. Plus tu veux que la voix arrive de loin, plus tu dois serrer la gorge.
    Le vieil homme posa une fois encore la main du Corbeau sur sa gorge et parla d'une voix fine et lointaine.
    — Tu sens ? Essaie, maintenant.
    Le Corbeau posa sa main sur sa gorge, plissa la bouche et rentra sa langue en arrière. Puis il laissa les mots sortir lentement.
    Dyenen pencha la tête sur le côté et écouta.
    — Non, mais tu approches du but. Si tu continues à travailler, tu pourras faire les voix. Aujourd'hui et demain nous nous entraînerons ensemble.
    — Et tu m'apprendras à faire bouger les murs ?
    Dyenen émit un gloussement et souleva le tapis de
    sol sur lequel il était assis. Le Corbeau vit quatre ficelles assemblées comme les rayons d'une toile d'araignée. Dyenen glissa une main sous le nœud et tira. Les murs de la demeure tremblèrent doucement.
    — Les ficelles sont reliées aux pieux à cet endroit où je suis assis.
    Une fois encore, le Corbeau éclata de rire.
    — Encore une ruse. Est-il pouvoir supérieur à celui-là ? De cette façon, un homme voit ce qu'il ne voit pas et croit ce qui n'est pas vrai.
    — C'est parfois nécessaire, remarqua Dyenen.
    — Certains hommes penseraient différemment.
    — Et toi ?
    — Je pense que tout ce qui me donne du pouvoir est nécessaire.
    82
    Premiers Hommes
    Baie de Herendeen, péninsule d'Alaska
    Les commerçants arrivèrent, des villages Premiers Hommes et des demeures des Chasseurs de Morses, des rivages de la Grande Rivière et des tribus intérieures du Peuple des Caribous. Ils vinrent, emplissant la plage de leurs marchandises, constellant le ciel de leurs clameurs.
    Premier Flocon parlait à chaque groupe du Peuple Morse, demandant de quel village ils venaient, quel chaman était le leur. Il finit par trouver des hommes du village du Corbeau. Ils étaient trois, accompagnés d'une femme. Chagak se les rappelait, surtout le plus grand, Chasseur de Glace, qui avait empêché Samig de combattre le Corbeau. Du coup,

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