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Qui étaient nos ancêtres ?

Qui étaient nos ancêtres ?

Titel: Qui étaient nos ancêtres ? Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Louis Beaucarnot
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à corps nu » se ponctue d’étapes au cours desquelles les femmes arrêtent le mari trompé pour le fouetter sans ménagement.
    Mais le scénario peut être encore beaucoup plus violent et impitoyable. Souvent, c’est l’ azouade, la « promenade sur l’âne », où l’on oblige l’homme à chevaucher un âne à rebours, c’est-à-dire la tête tournée vers sa queue, pour le promener en cortège infamant par les rues du village. En 1661, à La Couronne, en Charente, un ouvrier papetier battu par sa femme devra, deux jours durant, subir cette farce cruelle. À Verteuil, dans le même département, les femmes aspergent en outre le malheureux avec des seaux d’eau bouillante.
    C’est alors l’escalade de la violence. D’aucuns, bien sûr, essaient de s’y soustraire en tentant de se rebiffer. On échange des coups. On s’envoie des objets à la tête, à commencer par les chaudrons que l’on a à la main, et si le groupe, excité, arrive à pénétrer dans la maison du couple chahuté, c’est souvent le pillage, la mise à sac, les bouteilles de vin vidées, et la violence pure.
    En 1708, à Ruffec, en Charente, un charivari donné à l’encontre de Jacques Charpentier, un commerçant veuf qui s’est remarié, se terminera mal. Commencé avec le classique tintamarre des chaudrons et poêlons, le groupe s’énerve du fait que le marié se terre et ne réagit pas. Pour l’obliger à se montrer, on envoie des pierres contre sa boutique et ses fenêtres. Charpentier, pour faire peur, sort un pistolet qu’il ignore, dira-t-il, être chargé. Il tire et tue sur le coup un des meneurs, qui se trouve être le fils du cousin germain de sa première épouse. Dans ce cas précis, le commerçant bénificiera cependant de lettres de grâces…
    « Aveugle et sans oreilles  » : la mort est familière
    Nos ancêtres ne sont pas tendres : qui effraie ou dérange est montré du doigt, sanctionné et éventuellement brutalisé, au physique comme au moral, qu’il s’agisse du chemineau « estranger » ou du bâtard né hors mariage, fruit du péché de chair et de la faiblesse humaine. Mieux vaudrait pour lui ne pas avoir été conçu et ne pas être né. La société le rejette, comme elle rejette les suicidés. Honte à qui se donne soi-même cette mort, qui frappe d’autres si brutalement. C’est à tout instant un homme ou un adolescent qui se tue en tombant de l’arbre où il était monté cueillir des pommes, en tombant dans une mare ou un lavoir alors qu’il ne sait pas nager, un autre qui succombe encorné par un animal ou écrasé sous une roue de char. C’est ce sonneur de Vacqueyras, dans le Vaucluse, foudroyé en août 1778 alors qu’il agite frénétiquement la cloche de l’église pour éloigner l’orage. C’est Cécile Talion, âgée de vingt-deux ans, retrouvée sous les ruines de la maison de son beau-père détruite par un incendie, en 1788. Les registres paroissiaux de Carrières-sur-Seine sont pleins d’actes de sépulture de malheureux carriers, qui périssent régulièrement, comme Pierre Marque en 1756, écrasés par la chute d’un bloc rocheux…
    Précédée ou non de la maladie contre laquelle on est totalement démuni, au point de ne plus savoir « à quel saint se vouer » ni à quel sorcier s’adresser, la mort est omniprésente. « Il n’y a point de préservatifs, ni de provisions contre la mort, lit-on sous la plume du père Yvan, célèbre prédicateur du XVII e siècle. Elle a des ailes qui la portent partout et une faux qui tranche tout. Elle est aveugle et n’a point d’égard à âge, condition, qualité, et état des personnes. Elle est sans oreilles, elle n’écoute ni les prières, ni les plaintes d’aucun pour avancer et reculer. »
    Le deuil, au cours d’une année, n’épargne par conséquent guère de famille ni de foyer, et cela d’autant plus que l’on vit nombreux sous le même toit, et que la promiscuité et le manque d’hygiène offrent des terrains de prédilection à la contagion. Il n’est pas rare, dans les archives paroissiales, de voir, au cours d’un même mois, les mêmes personnes porter au cimetière les corps de plusieurs de leurs parents défunts : un grand-père et plusieurs de ses petits-enfants.
    C’est aussi, très souvent, le bébé dont on vient de lire l’acte de baptême, suivi parfois dès le lendemain par sa pauvre mère.
    La mortalité infantile est terrifiante. Elle fauche 25 % des enfants avant leur

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