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Raimond le Cathare

Raimond le Cathare

Titel: Raimond le Cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Baudis
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vient me déchirer le cœur.
Ils s’acharnent sur Toulouse. Ils la martyrisent. Les villes ne meurent pas,
mais elles peuvent souffrir interminablement.
     
    Toulouse, 1215
     
    Simon de Montfort vient se présenter
en vainqueur devant sa victime. Il est accompagné du fils du roi de France, le
prince Louis, et suivi d’une troupe commandée par les plus grands seigneurs du
royaume. Beaucoup sont des vétérans de la croisade. Le comte de Saint-Pol,
Gaucher de Chatillon, le comte de Ponthieu, Guichard de Beaujeu étaient aux
sièges de Béziers et de Carcassonne. Aujourd’hui ils sont auréolés de la gloire
de Bouvines, où le roi France a vaincu le roi d’Angleterre. Ayant gagné la
guerre, Philippe Auguste a désormais les mains et l’esprit libres pour
s’occuper du comté de Toulouse.
    Parce que je me suis rangé sous la
bannière de Pierre d’Aragon et que j’ai confié la sauvegarde de mon fils à Jean
Sans Terre, Philippe Auguste me considère comme un vassal infidèle. Nos liens
de parenté ne font qu’aggraver la sévérité de son jugement.
    Son fils, le prince Louis, vient
recueillir le serment de Simon de Montfort En échange de son allégeance à la
couronne, le conquérant obtient la protection royale et la reconnaissance des
titres qu’il s’est arrogés sur les terres et les villes de mon pays. Avec
l’assentiment du roi, l’heure est venue pour lui de prendre possession de
Toulouse, qu’il convoite depuis plus de cinq ans. Pour préparer la cité à
l’entrée de son nouveau maître, Foulques et Guy de Montfort sont à l’œuvre
depuis plusieurs semaines. Ils mettent la ville à genoux.
    Décimée et endeuillée par le
massacre de Muret, la population est à bout de forces, physiques et morales.
Elle ne peut opposer aucune résistance à la rage qui s’abat sur elle. Les
sergents d’armes brisent les portes des maisons et s’emparent d’une centaine
d’otages. Ils les choisissent parmi les familles les plus influentes. Plusieurs
capitouls sont arrêtés. Les prisonniers sont emmenés loin de la ville,
dispersés dans différents châteaux et jetés au cachot sous la garde de routiers
qui les maltraitent jour et nuit. Les envahisseurs ne tolèrent pas que survive
l’institution municipale. Ils décapitent le consulat et les libertés communales
en supprimant les hommes qui l’incarnent. Ils ne supportent pas davantage la
liberté de conscience qui régissait nos relations avec Dieu. Foulques oblige la
population tout entière à venir prêter serment devant lui. L’évêque savoure sa
revanche sur la ville qui l’avait chassé trois ans plus tôt.
    L’occupant s’établit dans les
fortifications du château Narbonnais, à l’abri d’un sursaut de colère. Le soir,
les portes closes de la cité sont gardées par des chevaliers français. À
quelques pas de là, celles du château sont verrouillées par les hommes d’armes
les plus fidèles à Simon de Montfort. La garde de l’évêque campe dans la cour.
    Aujourd’hui, dans la grande salle,
se joue le sort de la ville.
    — Écrasons-la !
    L’évêque Foulques laisse libre cours
à sa vindicte. Il arpente le dallage et frappe de son poing le linteau de la
cheminée.
    — Prenons tout ce que nous
pouvons emporter. Ensuite, infligeons à Toulouse le sort de Béziers.
Brûlons-la ! Sinon, nous n’en finirons jamais. Elle est brisée,
dites-vous, mais sachez que demain elle se relèvera. Si vous ne m’écoutez pas,
vous le regretterez un jour. Je les connais.
    Le prince Louis approuve le projet.
Désir morbide d’assister à un massacre ou, plus simplement, impatience d’en
finir au plus vite pour rentrer chez lui ?
    — Suivons le conseil de
l’évêque. Il connaît la ville, suggère-t-il à Montfort.
    Puis, se tournant vers
Foulques :
    — On m’a dit que vous avez été
troubadour ici même, dans ce château, au service des comtes hérétiques. Faut-il
le croire, monseigneur ?
    — C’était il y a si longtemps,
Sire. Et j’ai expié, croyez-moi !
    Une bonne part de la haine que
Foulques porte à ma ville et à ma famille tient à cette honte que lui inspire
son ancienne vocation. Il n’ignore pas que chacun se moque sur son passage.
Dans son dos, il entend chantonner les airs qu’il composait, jadis, pour louer
un sein ou glorifier une bouche. Bien qu’il fut médiocre poète, je le préférais
pourtant ainsi…
    — Je ne suivrai pas le conseil
de l’évêque. Sire, je refuse d’anéantir la

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