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Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Titel: Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Filip Muller
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le monde allait enfin pouvoir apprendre ce qui se passait à Auschwitz dans les usines de la mort.
    J’avais remis à Alfred un plan des crématoires et des chambres à gaz avec une liste des noms des nazis en service dans ces installations. De plus, j’avais donné à nos deux camarades les indications que j’avais recueillies depuis quelque temps sur la presque totalité des convois qui avaient été détruits par les gaz dans les crématoires IV et V. Je leur avais également décrit en détail les méthodes d’anéantissement en masse qui y étaient pratiquées, si bien qu’ils pouvaient rendre compte exactement de la manière dont on dépouillait toutes les victimes de leurs biens, comment on les conduisait dans les chambres à gaz par des manœuvres dolosives, comment, après les gazages, on arrachait les dents en or des victimes et l’on dépouillait les femmes de leur chevelure, comment on recherchait sur les morts les objets de valeur, comment on rassemblait les brillants et les prothèses des gazés, et tout ce qui se passait ensuite. Bref, au cours de fréquents entretiens avec Alfred et Walter, je leur avais dépeint la tragédie monstrueuse qui se déroulait inlassablement derrière les murs des crématoires. Je leur avais aussi remis, avant leur fuite, une preuve d’une importance capitale : il s’agissait de l’une des étiquettes qui étaient collées sur les boîtes métalliques contenant les cristaux de cyclon B. J’avais pendant longtemps tenté de récupérer une de ces boîtes, et ce n’avait pas été chose facile. En effet, après avoir déversé le produit mortel dans les fausses cheminées, l’un des « désinfecteurs » rapportait le plus souvent les boîtes vides dans la prétendue ambulance qui stationnait dans la cour du crématoire, tandis qu’un autre S.S. inspectait le vestiaire en s’assurant qu’il n’y avait plus rien à rafler. J’avais donc longtemps cherché à m’emparer d’une boîte vide, en me faufilant près de l’ambulance. J’eus un jour une idée. Après une opération meurtrière des « désinfecteurs » je m’adressai à Gorges en lui expliquant que nous avions besoin de deux nouvelles boîtes en fer pour recueillir les dentiers, les anciennes boîtes étant inutilisables. Ne se doutant de rien, il se déclara aussitôt d’accord et m’envoya au véhicule de la Croix-Rouge qui stationnait dans la cour. Je dis alors aux deux S.S. qui se tenaient dans le véhicule que je venais chercher sur l’ordre de l ’Unterscharführer Gorges deux boîtes vides. L’un d’eux ouvrit la porte arrière du véhicule et me commanda : «  Los ! prends tes deux boîtes, et maintenant, file ! » À l’abri des regards, j’examinai alors les étiquettes collées sur les boîtes. Elles portaient l’instruction suivante : « Attention ! Gaz toxique cyclon B. Produit à base de cyanure. Poison ! Produit insecticide Tesch und Stabenov GmbH. À n’utiliser que par un personnel compétent ! » Il était difficile cependant de détacher les étiquettes sans les détériorer et je ne pus le faire que pour l’une des deux boîtes seulement. Comme le papier commençait à se déchirer et que le nom de la firme productrice n’apparaissait pas entièrement, je complétai le nom au crayon.
    C’est donc cette étiquette que, deux jours avant leur évasion, j’avais remise à Alfred Wetzler afin qu’il pût fournir une preuve tangible de l’extermination des juifs. S’il pouvait dévoiler avec son compagnon Walter Rosenberg tout ce qui se passait à Auschwitz, on pouvait espérer que le monde mettrait fin au massacre. Je croyais alors qu’on ne pourrait passer sous silence ces atrocités et demeurer inactifs. Je pensais tout spécialement à Jana et à ses compagnes qui un mois plus tôt m’avaient fait sortir de la chambre à gaz en m’exhortant à survivre pour témoigner devant le monde des atrocités perpétrées ici. Si nos deux camarades réussissaient à s’évader, ce qui était jugé impossible deviendrait l’expression de la vérité et le monde serait enfin informé des crimes monstrueux qui se commettaient depuis plus de deux ans. J’imaginais alors les avions alliés venant bombarder les crématoires et les chambres à gaz et les réduire à néant. Il devait d’ailleurs être possible d’empêcher d’autres transports de juifs à Auschwitz en pilonnant sans arrêt les voies ferrées qui y conduisaient. Si nos deux amis

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