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Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Titel: Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Claude Pomonti
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d’urgence, d’accueillir des hélicoptères réservés aux deux chefs adjoints de la CIA qui occupaient deux appartements situés juste en dessous. » Le diplomate américain donne à Pham Xuân Ân les numéros de code pour y accéder.
    Mais, quand les deux hommes arrivent sur place, les gardes – recrutés parmi les Nùng, minorité ethnique du nord du Viêt Nam – refusent de les laisser entrer. Ils se rendent alors au QG de la CIA , dans une autre rue du centre, où Pham Xuân Ân demande à rencontrer le patron local de l’agence, qui le connaît bien. Nouveau refus du garde, qui ne le croit pas.
    « À ce moment-là, la femme du garde est arrivée et le garde a ouvert la porte pour la laisser passer », racontera-t-il par la suite. En bloquant la porte, Pham Xuân Ân réussit à introduire le D r  Trân Kim Tuyên à l’intérieur. C’est ainsi que – dernier passager à bord du dernier hélicoptère de la CIA  – l’ancien chef de la police secrète du régime a pu quitter Sài Gòn grâce à l’aide opiniâtre d’un colonel des services de sécurité de Hà Nôi.
    Lorsqu’il apprendra plus tard que Pham Xuân Ân était un agent communiste, Trân Kim Tuyên déclarera qu’il ne l’avait « jamais soupçonné ». Il ajoutera que, si tel était le cas, il s’agissait d’« un désastre car il savait tout ce que je savais ». Pham Xuân Ân est resté en contact avec la famille du D r  Trân Kim Tuyên, installée à Londres, où l’ancien chef des services secrets sud-vietnamiens est décédé en 1995, deux semaines avant la normalisation des relations diplomatiques entre Hà Nôi et Washington.
    Entre-temps, Pham Xuân Ân est pressé par le bureau de Time, qui a prévu un transport aérien pour son personnel, de quitter le Viêt Nam en compagnie de sa femme et de ses quatre enfants. La situation est difficile à gérer : ses collègues américains ne comprendraient pas qu’il hésite à partir, sauf en cas de force majeure. « Après avoir demandé son opinion à Robert Shaplen », Pham Xuân Ân décide de proposer que sa femme et ses enfants partent d’abord. Ils embarquent le 23 avril tandis que Nguyên Hung Vuong, son épouse et leur fils les suivent trois jours plus tard.
    Pham Xuân Ân dit qu’il ne peut pas abandonner sa mère âgée et mal en point. « Même si j’avais voulu partir, il y avait ma mère, elle était trop âgée et trop malade pour voyager », a-t-il dit, en 1989, à Morley Safer, avant d’ajouter : « Au début (après la victoire), j’ai pensé que je trouverais quelqu’un pour s’occuper d’elle et que je rejoindrais ma famille en France ou aux États-Unis, mais ils (le Parti) m’ont clairement indiqué qu’ils ne me laisseraient pas partir. » Une autre fois, il a déclaré qu’il ne pouvait pas s’en aller parce qu’il y avait tant à faire après la Libération.
    La veille de la prise de Sài Gòn, Pham Xuân Ân a d’autres raisons de s’inquiéter sérieusement. La grande métropole est en proie au chaos. Des soldats abandonnent leurs uniformes. Des règlements de compte ont lieu. Les agents viêt côngs susceptibles de l’identifier, physiquement, se comptent sur les doigts d’une main. Il ne peut pas exclure la possibilité d’une dénonciation, par un voisin quelconque, comme collaborateur des Américains. En cas d’arrestation par les nouvelles autorités, il n’aurait aucun moyen de prouver son identité. Il est sans nouvelles de la résistance.
    N’importe quel « bô doï » – soldat de l’Armée populaire – aurait pu, dit-il, « me tuer et faire griller mes chiens », une allusion à la prédilection des gens du Nord pour la viande de chien.
    Finalement, il accepte l’offre de Robert Shaplen, lequel est évacué le 29 avril, d’installer sa mère dans la chambre de son ami américain. Le Continental est connu des Viêt Côngs pour accueillir de nombreux journalistes étrangers. Le mot d’ordre des communistes est d’épargner l’hôtel, ainsi que l’ambassade de France, envahie par les ressortissants français, et l’hôpital Grall. Le Continental est donc probablement, en ces jours d’anarchie, l’un des endroits les plus sûrs à Sài Gòn. « J’y suis resté une bonne semaine », dit Pham Xuân Ân. Il fait la navette entre le bureau de Time, déserté par les journalistes américains, et la chambre de Robert Shaplen, à l’étage au-dessus, où sa mère se repose.

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