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Voyage en Germanie

Voyage en Germanie

Titel: Voyage en Germanie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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renchérit-elle.
    — Tout le monde sait qu’il fait un piètre orateur, mais un homme de son rang doit pouvoir charger un poète salarié de lui pondre quelques hexamètres destinés à saluer une dame… Moi je le ferais.
    — Toi, murmura Helena, si bas que cela me fit froid dans le dos, tu les écrirais toi-même.
    — Pour toi, oui.
    Elle se tenait absolument immobile. Je ne pouvais rien pour elle. Je poursuivis lamentablement mon baratin :
    — Ça me prendrait quelques milliers de vers et tu attendrais sans doute un mois ou deux que j’aie fini de les peaufiner. Si, moi, je te demandais de venir me retrouver, je tiendrais à tout te dire…
    Je me tus. Pour peu que Titus ait offert l’Empire à Helena Justina, elle allait avoir besoin de réfléchir. C’était une fille prudente.
    Je tâchais de me convaincre moi-même que quoi qu’ait pu dire Titus, cela ne devait rien avoir d’officiel, loin de là. S’il faisait la moindre proposition officielle, les deux pères devaient en être aux négociations. Même chez les empereurs — surtout chez eux –, ces choses-là doivent être faites dans les formes.
    — Ne t’inquiète pas.
    Helena releva brusquement la tête. C’était toujours pareil : chaque fois que j’avais des raisons de m’inquiéter pour elle, elle tentait de les enfouir en s’inquiétant à mon sujet.
    — Il ne se passera rien, je te le promets.
    — Le grand homme a-t-il formulé sa question ?
    — Dès que j’aurai répondu, Marcus…
    — Attends, coupai-je.
    — Quoi ?
    — Ne réponds pas tout de suite.
    S’il m’arrivait malheur, au moins Titus César s’occuperait-il d’Helena. Elle ne manquerait jamais de rien. Et le bénéfice pour l’Empire serait immense. Un César régnant en collaboration avec Helena Justina pourrait accomplir des choses insurpassables. Titus le savait. Moi aussi.
    Il fallait que je libère Helena. Certains diraient peut-être qu’une fois arrivé en Germania libera, ce serait véritablement un devoir pour moi que de disparaître dans les bois. Lors des instants loufoques où je me souciais de Rome, j’allais jusqu’à me dire cela moi-même.
    Sa réaction fut étrange. Au lieu de me demander ce que j’entendais par là, elle se leva, s’approcha de moi, puis s’assit sans un mot à côté de moi en me tenant la main. Ses yeux brillaient de larmes qu’elle était trop têtue pour verser.
    Elle savait, bien entendu, que je tenais à elle. Même au beau milieu du Styx, en route pour Hadès, je me battrais avec le passeur pour tenter de sauter du bateau et retourner auprès d’Helena. Je souhaitais seulement sauvegarder son avenir pour le cas où je ne serais plus là.
    Elle savait le reste aussi. Franchir le fleuve serait stupidement dangereux. L’histoire jouait contre moi. Les tribus libres étaient les ennemis implacables de tout ce qui venait de Rome. Et je savais, pour l’avoir appris en Bretagne, comment les Celtes traitaient leurs ennemis. Qu’on me capture, et je pouvais m’attendre à ce qu’on fasse fi de l’immunité diplomatique. Mon crâne serait fiché au bout d’une pique dans une niche, à la porte d’un temple. Ce qu’il adviendrait du reste de ma personne avant qu’on me tranche la tête serait vraisemblablement plus dégradant et plus pénible que je ne supportais de l’envisager. Je ne demandai pas à Helena dans quelle mesure elle savait tout cela, mais elle n’avait rien d’une ignorante.
    En tombant amoureux d’Helena Justina, j’avais fait le vœu de ne plus jamais m’exposer à des risques graves. Nombre d’exploits difficiles émaillaient mon passé, auxquels, pour la plupart, je ne ferais pas même allusion en sa présence. Mais on vieillit. On apprend qu’il y a d’autres choses qui comptent. Helena devait bien savoir que j’avais une carrière infernale derrière moi, mais elle croyait que mes déclarations d’amour à son égard signifiaient que mon époque casse-cou était révolue. Nul ne pouvait lui en vouloir : j’avais moi aussi cru la même chose.
    À présent, j’avais l’air d’un de ces fous pour qui le danger est devenu une drogue. La situation dans laquelle se trouvait Helena semblait aussi sombre que si elle s’était livrée pieds et poings liés à je ne sais quel ivrogne ou fornicateur. Elle avait dû croire que tout allait changer grâce à son influence, et se rendait compte à présent que ça ne changerait jamais… Mais moi je savais que je n’étais plus le même.

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