Amours Celtes sexe et magie
retourna pour savoir qui jouait ainsi mais, dès qu’il se fut retourné, le même chant retentit encore derrière lui. Cela dura un certain temps, mais il finit par s’allonger sur l’herbe et s’endormit, tant la mélodie était douce et harmonieuse. » Ces détails font évidemment penser au « Chant des fées » dont est très riche la tradition musicale irlandaise, mais qui ne sont guère éloignés de ce qu’on raconte au sujet des ondines qui hantent les eaux du Rhin.
« Quand il émergea de son sommeil, il aperçut près de lui une branche de pommier avec des fleurs blanches qu’il n’était pas facile de distinguer de la branche elle-même. Il l’emporta dans la forteresse. Quand les fils de Milé (= les Gaëls) furent dans la salle pour le festin, on vit pénétrer une femme vêtue d’un costume étranger. Elle s’avança vers Bran et se mit à chanter. » Suit alors une description enthousiaste du pays merveilleux qui est celui de la femme inconnue, une terre bienheureuse où l’on ne connaît « ni la faiblesse, ni le chagrin, ni la maladie, ni la mort ». Une fois son chant terminé, la femme disparaît sans qu’on puisse savoir où elle est allée. Mais Bran, très impressionné par cette « apparition », ne peut trouver le sommeil. Il est hanté par l’image de cette femme éblouissante de lumière et de beauté. Il faut reconnaître que le charme, au sens fort du mot, a agi sur l’esprit de Bran. Il se décide alors à aller consulter un druide, renommé pour sa science et sa sagesse, afin de lui demander des explications sur ce qui lui est arrivé.
Le druide lui répond : « Ce n’est pas difficile. Cette femme venait d’Émain, c’est-à-dire de l’île des Pommiers. Et, en te présentant une branche de pommier d’Émain, elle t’a invité à aller la rejoindre là-bas. »Très étonné, Bran demande au druide où est située cette île bienheureuse. « Elle se trouve quelque part sur le grand océan, vers l’endroit où le soleil s’enfonce dans les flots. On n’en connaît pas le chemin et personne ne peut y aborder sans guide. » On est ici en plein mythe de l’île qui échappe au temps et à l’espace, mais qui ne peut se situer que quelque part à l’ouest du monde. Le druide demande alors à Bran : « Désires-tu vraiment rejoindre cette femme dans l’île d’Émain ? » Bran répond : « Assurément, car je ne retrouverai jamais le sommeil maintenant qu’elle m’a visité si je ne peux la revoir (33) . »
La provocation a donc réussi et Bran est littéralement envoûté par cette femme mystérieuse. C’est pourquoi il va se lancer dans une expédition maritime périlleuse et, après des aventures fantastiques, parviendra à cette « Île des femmes », où il connaîtra le parfait amour avec celle qui règne sur ce paradis aux caractéristiques on ne peut plus païennes. Certes, la femme use ici d’une sorte de procédé magique pour entraîner l’homme qu’elle a choisi, en l’occurrence un chant et une branche de pommier, mais tous les moyens sont bons pour une femme – qu’elle soit déesse, fée ou simple mortelle – pour arriver à ses fins. C’est la même technique qu’emploie une autre femme féerique pour attirer à elle Oisin (Ossian), le fils de Finn mac Cool, roi des Fiana, cette troupe itinérante de chasseurs guerriers qui parcourent l’Irlande pendant l’été.
Oisin, son père et leurs compagnons se reposent, après une chasse mouvementée, à l’ombre d’un bosquet. Tout à coup, « ils virent venir vers eux une femme d’une beauté merveilleuse et qui, montée sur un magnifique cheval blanc dont la longue crinière flottait au vent, avait tout d’une reine. Elle était revêtue d’un manteau de soie brun parsemé d’étoiles d’or, et une couronne d’argent incrustée de pierres précieuses ceignait l’opulente chevelure blonde qui retombait sur ses épaules. » Et la femme de se présenter au roi Finn : « Mon nom est Niam aux Cheveux d’Or. Je suis la fille d’un roi du pays que vous appelez la Terre de Jeunesse (34) . Et ce qui m’amène auprès de toi, c’est l’amour que je porte à ton fils Oisin (35) . »
Et la femme se tourne vers Oisin : « M’accompagneras-tu dans le pays de mon père ? » demande-t-elle. Mais la provocation a déjà parfaitement réussie : « Le timbre de Niam exerçait en effet sur lui un charme si puissant qu’il en perdait toute
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