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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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– enfin – de franchir le Rubicon, et, puisqu’il ne peut pas faire autrement, de le franchir, malgré sa répugnance, en compagnie de Sieyès. Le « chemin civil » pour prendre le pouvoir s’avérant impraticable, il mettra donc l’épée à la main. Napoléon paraît étrangement calme, et l’explique cette même semaine à Roederer :
    — Il n’y a pas un homme plus pusillanime que moi quand je fais un plan militaire ; je me grossis tous les dangers et tous les maux possibles dans les circonstances ; je suis dans une agitation tout à fait pénible. Cela ne m’empêche pas de paraître fort serein devant les personnes qui m’entourent.
    Il précise :
    — Je suis comme une fille qui accouche. Et quand ma résolution est prise, tout est oublié !
    Sa résolution est en effet prise – et bien prise : marcher avec Sieyès « l’étayerait » dans l’opinion qui ne voulait plus de ce corrompu de Barras !
    — Vous croyez la chose possible ? demande-t-il à Roederer.
    — Elle est au trois quarts faite, lui répond celui qui avait passé près de Louis XVI la dernière nuit de son règne.
    Secondé par Roederer, tout animé de ce qu’il appelle une « patriotique conspiration », aidé par Talleyrand, qui commence ainsi une belle série de trahisons dans le sens de ses convictions, Bonaparte voit secrètement Sieyès au Luxembourg. Les choses se passent selon un scénario soigneusement mis au point. Le ministre des Relations extérieures conduit le postulant dictateur au Luxembourg, mais laisse Napoléon dans sa voiture et entre le premier chez Sieyès. Après s’être assuré que ce dernier se trouve seul et n’attend personne, il fait avertir Bonaparte que la voie est libre. Quelques instants plus tard la conférence commence entre les trois hommes.
    Lors de la première entrevue, Bonaparte déclare à Sieyès :
    — Citoyen, nous n’avons pas de constitution, du moins celle qu’il nous faut. C’est à votre génie qu’il appartient de nous en donner une. Dès mon arrivée, vous avez connu mes sentiments. Le moment d’agir est venu. Toutes vos mesures sont-elles arrêtées ?
    L’abbé-Directeur, qui a toujours une constitution traînant dans ses poches, explique que l’on pourrait créer un consulat formé de trois consuls, tandis que Bonaparte assurerait le pouvoir militaire.
    — Je connais tout cela par ce que m’a dit mon frère, interrompt Bonaparte, mais vous ne pensez pas, sans doute, présenter à la France une nouvelle Constitution toute faite, sans qu’elle ait été discutée posément et article par article. Ce n’est pas l’affaire d’un moment et nous n’avons pas de temps à perdre. Il nous faut donc un gouvernement provisoire, qui prenne l’autorité le jour même de la translation, et une Commission législative pour préparer une Constitution raisonnable et la proposer à la votation du peuple ; car je ne voudrai jamais rien qui ne soit librement discuté et approuvé par une votation universelle bien constatée... Occupez-vous de l’établissement d’un gouvernement provisoire. J’approuve que ce gouvernement soit réduit à trois personnes et, puisqu’on le juge nécessaire, je consens à être l’un des trois consuls provisoires, avec vous et votre collègue Roger Ducos.
    Ainsi Bonaparte exigeait la place de consul ! L’abbé fait la grimace mais se résigne et, Bonaparte parti, il confie à Joseph :
    — Le général semble ici sur son terrain comme au champ de bataille. Il faut bien suivre son avis : s’il se retirait, tout serait perdu et son acceptation du consulat provisoire assure le succès.
    Cependant, avant de s’engager définitivement, Bonaparte tente une dernière démarche auprès de Barras qui pourrait peut-être faire partie du triumvirat à la place de Roger Ducos. Il va dîner chez lui le 30 octobre, « en petit particulier ».
    « Nous n’étions que quatre, racontera plus tard Bonaparte à Gourgaud : le duc de Lauraguais, qui était là comme un bouffon, une espèce de préfet du palais, et moi. Au milieu du repas, Barras me dit :
    — La République va mal, je suis vieux, je ne suis plus bon à rien, je veux me retirer des affaires. Vous, général, vous êtes heureux de n’y être pas. Votre lot, c’est le militaire. Vous allez vous mettre à la tête de l’armée d’Italie et réparer nos revers. La République est en si mauvais état qu’il n’y a qu’un président qui puisse la sauver, et je ne vois que le général

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