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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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Berthier : la tête du parc des boeufs est arrivée à Lausanne... J’ai requis, il y a quatre jours, trois cents mulets et cent voitures... J’ai requis huit cents mulets dans le haut Valais. »
    Au Conseiller d’État, Petiet, il ordonne : « Faites filer les deux cent mille premières rations de biscuits que vous aurez confectionnées, soit à Chambéry, soit à Genève, sur Aoste, en passant par le Petit-Saint-Bernard... Il faut également faire filer par la même voie deux cent mille cartouches... »
    Il n’en peut plus d’attendre dans cette triste vallée où les rayons de soleil pénètrent avec une désolante discrétion. De l’autre côté des monts, le fort tient toujours, et rien n’annonce sa prochaine reddition :
    — Je m’ennuie dans ce couvent, ces imbéciles-là ne me prendront jamais le fort de Bard, je veux aller voir par moi-même ; ils me forcent à m’occuper d’une pareille misère !
    Et il écrit au général Dupont : « Faites sentir au général Lannes que le sort de l’Italie et peut-être de la République, tient à la prise du château de Bard. » Demain, il partira !
    Le 20 mai, à huit heures du matin, revêtu de sa redingote grise, il quitte la maison des Bernardins et s’engage sur la route qui, dès la sortie de la petite ville, commence à monter. Alpiniste et savant botaniste, le chanoine Murith – futur prévôt, mais alors chanoine de l’hospice – descendu la veille du col, suit en char à bancs avec le R.P. Terretaz. On longe la Dranse coupée de cascades, et, lorsque la gorge se resserre, la route, par de petits ponts de bois ou de pierre, passe et repasse de la rive droite à la rive gauche du torrent. Après La Garde, on commence à monter. Orsières, ses vieilles maisons grises et son clocher quadrangulaire, voient passer le Premier consul à dix heures. À onze heures, il déjeune chez le curé de Liddes – bourg accroché, lui aussi, au flanc de la montagne.
    À Saint-Pierre, on semble entrer dans un autre monde : celui des cimes. En face du chevet de la petite église, se trouve l’Auberge de la colonne milliaire, la vingt-quatrième jalonnant la route romaine du col et qui existe encore {24} . Par le perron de six ou sept marches Bonaparte entre dans la salle de l’auberge – devenue aujourd’hui le café Napoléon – une salle commune basse de plafond et percée de petites fenêtres. C’est la dernière halte avant l’ultime montée. Il s’assied devant une table que l’on montre toujours aujourd’hui, ainsi que le fauteuil à oreillettes dont il s’est servi {25} .
    Bonaparte donne ses ordres à son état-major et boit ensuite du vin que lui apporte l’aubergiste, Mme Maret. Un grenadier lui offre un bouquet de roses des Alpes :
    — J’ai cueilli ça pour toi, là-haut dans la montagne, lui dit-il. Tu verras la 59 e se distinguer en Italie. Seulement, on nous esquinte à traîner un tas de choses. Et tu sais, citoyen, pas vu un morceau de viande depuis une grande semaine ! Et l’on peut tout te dire à toi : il y a des lieutenants qui cognent sur les pauvres bougres, des volées de bois vert. M’est avis que tu ne sais pas et qu’on oublie la fraternité.
    Bonaparte l’apaise puis rejoint à la porte de l’auberge le guide Pierre Nicolas Dorsaz, qui l’attend auprès de sa mule et qui le prend pour un simple officier.
    En route pour l’hospice !
    La neige, de plus en plus épaisse, recouvre le sol. À un moment, impatient et ayant un peu pressé sa mule sur le chemin de Cherreyre – ou de Saraire – il manque glisser avec sa monture dans l’abîme de la Dranse et vide l’étrier. Fort heureusement, le guide le retient à temps et le remet en selle d’une poigne solide :
    — N’ayez pas peur, capitaine, je suis là. Un bien mauvais endroit... Allez, ceux qui descendent au fond n’en reviennent pas. Dieu vous garde d’y aller, capitaine !
    Il commence à faire froid et Bonaparte boutonne haut sa redingote. Le vent se lève. La montée est rude et les dragons de l’escorte mettent pied à terre pour tenir leurs chevaux par la bride. Le chemin, maintenant couvert de neige, devient de plus en plus étroit.
    — Eh bien, mon garçon, dit Bonaparte à Dorsaz, c’est là un chemin difficile. Je te félicite de la présence d’esprit que tu as eue à Cherreyre.
    — Capitaine, ce n’est rien que cela. D’habitude, cette sacrée mule ne glisse jamais.
    — Elle est à toi ?
    — Mais oui. C’est mon meilleur bien avec quatre

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