Constantin le Grand
avoir désigné comme césars leurs propres fils : Constantin, pour l’Occident, Crispus et Constantin le Jeune ; Licinius, pour l’Orient, Licinius le Jeune.
Le soir, après que Licinius et Constantia eurent quitté le palais de Sardique, et alors qu’on entendait les chants des soldats qui célébraient la paix victorieuse, Constantin a répété qu’un jour Licinius sortirait de sa tanière pour se venger, tenter de s’imposer dans l’Empire, et qu’il rassemblerait pour cela, autour de lui, tous les païens, qu’il deviendrait à son tour persécuteur comme l’avaient été Dioclétien, Galère et Maximin Daia.
— Il sera l’empereur des païens. Je serai celui des chrétiens, et mes fils après moi.
J’entendais enfin énoncer par l’empereur le dessein de Dieu.
— Il y a le Père et le Fils, Dieu et Christos, et l’Esprit saint, a ajouté Constantin. Il doit en aller de même à la tête de l’Empire. Moi et mes fils, la chair et le sang. Célèbre ton culte, Denys, pour que l’Esprit m’habite !
Il m’a semblé que plus rien ne pouvait désormais empêcher la victoire des chrétiens, donc celle voulue par Dieu.
Chaque jour, Constantin donnait la preuve qu’il était désormais l’empereur chrétien, même si, alors que je le lui avais proposé, il refusait le baptême, disant qu’il était le Pontifex Maximus et que lui, et lui seul, sur un signe de Dieu, en choisirait le moment.
Mais qu’avais-je à redire, puisqu’il ordonnait que partout on construisît des églises, et qu’à Rome la basilique était presque achevée ? Il en avait payé les travaux sur son trésor personnel. Il avait accordé aux évêques le droit de juger, et leurs propriétés et celles des églises étaient exemptées d’impôts. Les chrétiens obtenaient, pour célébrer leur culte, un jour férié par semaine, et ce fut le dies Dominici , le jour du Seigneur, qui avait été jusque-là le dies Solis , le jour du Soleil.
Mais il n’existait plus qu’un seul Dieu, et en Christos tous les autres se rejoignaient.
Constantin, Pontifex Maximus , allait être lui aussi empereur unique, tout comme il n’y avait plus qu’un Dieu.
Lorsque j’ai appris par les messagers des communautés des provinces d’Orient que Licinius avait donné l’ordre à ses gouverneurs et à ses légats d’exiger de tous les habitants qu’ils sacrifient aux dieux traditionnels de Rome, lorsque j’ai su que ses soldats avaient commencé à détruire les églises, à flageller, décapiter, crucifier les chrétiens, et que, partout, il appelait les païens à rejoindre son armée afin d’en finir avec Constantin, l’usurpateur, l’esclave des chrétiens, j’ai compris que la dernière épreuve avait débuté.
J’ai chevauché aux côtés de Constantin le Grand à la tête d’une armée de plus de cent mille hommes.
Devant nous, monté sur un cheval blanc, un porte-enseigne brandissait haut et droit le labarum , une croix gainée d’or, sertie de diamants, portant les premières lettres du nom de Christos. Du bras horizontal de la croix pendait un tissu de soie auquel étaient accrochées des pierres précieuses et sur lequel étaient brodés les visages de Constantin et de ses fils.
Ainsi, l’armée de Constantin marchait sous le signe de Dieu. On était dans la trois cent vingt-quatrième année après la naissance de Christos.
Nous avons pénétré en Thrace, la dernière province que possédait Licinius. La chaleur tombait du ciel et montait de la terre sèche, nous enserrant dans ses mâchoires brûlantes.
Constantin s’est élancé, entraînant ses cavaliers gaulois et germains, et l’armée de Licinius, incertaine, apeurée, n’osant regarder le labarum , craignant du fond de son âme le jugement de Dieu, s’est débandée.
Quelques milliers d’hommes, avec Licinius, ont réussi à rejoindre Byzance et à s’y enfermer dans l’illusion que la flotte de Licinius, comptant plus de deux cents trirèmes tassées dans le port, pouvait à tout instant les transporter en Asie.
Mais Crispus avait pris le commandement de la flotte de Constantin qui s’est enfoncée comme un coin dans le port de Byzance, détruisant celle de Licinius.
Celui-ci a réussi à passer les détroits et la dernière bataille s’est livrée sur le sol d’Asie, non loin de Nicomédie, à Chrysopolis, le 18 septembre 324.
L’armée de Constantin l’a une nouvelle fois vaincu et Licinius s’est
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