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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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continent. Après une
guerre d’environ quarante ans [17] ,
entreprise par le plus stupide, continuée par le plus débauché, terminée par le
plus lâche des empereurs, plus grande partie de l’île subit le joug des Romains [18] . De la valeur
sans conduite, l’amour de la liberté sans aucun esprit d’union, c’est là ce
qu’on trouvait dans les différentes tribus qui composaient le peuple breton.
Elles coururent d’abord aux armes avec un ardent courage, puis les déposèrent
ou se tournèrent les unes contre les autres avec la plus bizarre inconstance,
combattirent séparément, et furent subjuguées l’une après l’autre : ni la
bravoure de Caractacus, ni le désespoir de Boadicée, ni le fanatisme des
druides, ne purent soustraire leur patrie à l’esclavage ni résister aux progrès
constants des généraux de l’empire qui soutenaient la gloire nationale, tandis
que la majesté du trône était avilie par l’excès du vice ou celui de la
faiblesse. Pendant que le farouche Domitien, renfermé dans son palais,
ressentait lui-même la terreur qu’il inspirait, ses légions, sous le
commandement du vertueux Agricola, dissipaient au pied des monts Grampiens les
forces réunies des Calédoniens, et ses flottes, bravant les dangers d’une
navigation inconnue, portaient sur tous les points de l’île les armes romaines.
Déjà la Bretagne pouvait être regardée comme soumise ; Agricola se
proposait d’en achever la conquête, et d’assurer ses succès par la réduction de
l’Irlande ; une seule légion et quelques troupes auxiliaires lui
paraissaient suffisantes pour l’exécution de son dessein [19] . Il pensait que
la possession de cette île occidentale pourrait devenir très avantageuse, et
que les Bretons porteraient leurs chaînes avec moins de répugnance, lorsque la
vue et l’exemple de la liberté seraient entièrement éloignés de leurs regards.
    Mais le mérite supérieur d’Agricola le fit bientôt, rappeler
de son gouvernement de Bretagne, et ce plan de conquête, si raisonnable malgré
son étendue, fut alors manqué pour jamais. Avant son départ, ce prudent général
avait songé à assurer ces nouvelles possessions. Il avait observé que l’île est
presque divisée en deux parties inégales par les deux golfes opposés, formant
ce qu’on appelle maintenant le passage d’Écosse [20] . A travers
l’étroit intervalle, d’environ quarante milles, qui les sépare l’un de l’autre
il établit une ligne de postes militaires qui ensuite, sous le règne d’Antonin
le Pieux, fut fortifiée d’un rempart de gazon, dont les fondations étaient en
pierres [21] .
Cette muraille, bâtie un lieu au-delà d’Édimbourg et de Glasgow, devint la
limite de la province romaine [22] .
Les Calédoniens conservèrent, dans la partie septentrionale de l’île, une
indépendance qu’ils durent à leur pauvreté autant qu’à leur valeur. Ils
faisaient souvent des incursions mais ils étaient aussitôt repoussés et punis.
Cependant leur pays ne fut point subjugué [23] ; les souverains des climats les plus riants et les plus fertiles du globe
détournaient leurs regards méprisants de ces montagnes exposées aux fureurs des
tempêtes, de ces lacs couverts de brouillards épais, et de ces vallées
incultes, où l’on voyait le cerf timide fuir à l’approche d’une troupe de
Barbares à peine vêtus [24] .
    Les successeurs d’Auguste étaient restés constamment
attachés à ses maximes politiques : tel était, depuis sa mort, l’état des
frontières de l’empire, lorsque Trajan monta sur le trône. Ce prince vertueux
et rempli d’activité avait reçu l’éducation d’un soldat et possédait les
talents d’un général [25] .
Le système pacifique de ses prédécesseurs fut tout à coup interrompu par des
guerres et par des conquêtes. Après un long intervalle ; les légions
virent enfin paraître à leur tête un empereur capable de les commander, Trajan
se signala d’abord contre les Daces, nation belliqueuse, qui habitait au-delà
du Danube, et qui, sous le règne de Domitien, avait insulté avec impunité la
majesté de Rome [26] .
À la force et à l’intrépidité des Barbares, les Daces ajoutaient ce mépris de
la vie, que devait leur inspirer une persuasion intime de l’immortalité de
l’âme et de sa transmigration [27] .
Décébale, leur roi, n’était pas un rival indigne de Trajan : il ne
désespéra de sa fortune et de celle de sa nation,

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