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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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selon les lois des nations, entre les Visigoths et les Bourguignons. Ces
projets dangereux, qu’un ami n’a pu pallier qu’en avouant la vanité et
l’indiscrétion de celui qui les avait conçus, étaient susceptibles d’une
interprétation très criminelle ; et les députés se décidèrent habilement à ne
produire cette pièce terrible qu’au moment décisif ; mais le zèle de Sidonius
découvrit leur intention. Il avertit sur-le-champ le criminel de son danger, et
déplora sincèrement et sans amertume la présomption hautaine d’Arvandus, qui
rejeta l’avis salutaire de ses amis, et alla même jusqu’à s’en irriter.
Arvandus, ignorant la véritable situation, se montrait dans le Capitole en robe
de candidat, saluait d’un air de tranquillité, acceptait les offres de service,
examinait les boutiques des marchands, tantôt de l’œil indifférent d’un
spectateur, et tantôt avec l’attention d’un homme qui voulait acheter ; se
plaignant toujours des temps, du sénat, du prince, et des délais de la justice.
Il n’eut pas longtemps lieu de s’en plaindre. On annonça le jour de son
jugement, et Arvandus parut avec ses accusateurs devant la nombreuse assemblée
du sénat romain. Les vêtements de deuil dont les députés avaient eu soin de se
couvrir intéressaient les juges en leur faveur, et ils étaient scandalisés de
l’air libre et de l’habillement magnifique de leur adversaire. Lorsque le
préfet Arvandus et le premier des députés de la Gaule furent conduits à leurs
places, sur le banc des sénateurs, on remarqua dans leur maintien le même
contraste d’orgueil et de modestie. Dans ce jugement, qui offrit une vive image
des formes de l’ancienne république, les Gaulois exposèrent avec force et
liberté les griefs de la province ; et lorsque l’audience parut suffisamment
animée contre le préfet, ils firent la lecture de la fatale lettre. Arvandus
fondait sa présomption opiniâtre sur cette étrange prétention qu’on ne pouvait
pas, disait-il, convaincre de trahison un sujet qui n’avait ni conspiré contre
le souverain, ni tenté d’usurper la pourpre. A la lecture de la lettre, il la
reconnut hautement et à plusieurs reprises pour avoir été dictée par lui ; et
sa surprise égala son effroi, lorsque, d’une voix unanime les sénateurs le
déclarèrent coupable d’un crime capital. Le décret le dégrada du rang de préfet
à celui de plébéien ; et il fut ignominieusement traîné par des esclaves dans
la prison publique. Après un délai de quinze jours, le sénat s’assembla une
seconde fois pour prononcer sa sentence de mort ; mais tandis qu’il attendait
douloureusement dans l’île d’Esculape l’expiration des trente jours accordés
par une ancienne loi aux plus vils malfaiteurs [4089] , ses amis
agirent auprès de l’empereur ; Anthemius s’adoucit, et le préfet de la Gaule en
fut quitte pour l’exil et la confiscation. Les fautes d’Arvandus pouvaient
mériter quelque indulgence ; mais l’impunité de Seronatus fut la honte de la
justice romaine jusqu’au moment où les plaintes des peuples d’Auvergne le
firent condamner et exécuter. Cet indigne ministre, le Catilina de son siècle
et de son pays, était en correspondance avec les Visigoths pour trahir la
province qu’il tyrannisait. Il employait toutes les ressources de son esprit à
inventer chaque jour de nouvelles taxes et à découvrir d’anciens crimes ; et
ses vices extravagants auraient inspiré le mépris s’ils n’avaient fait naître
un sentiment de crainte et d’horreur [4090] .
    De tels coupables n’étaient pas hors de l’atteinte de la
justice mais quels que fussent les crimes de Ricimer, ce puissant Barbare pouvait
ou combattre ou traiter avec le souverain dont il avait daigné devenir le
gendre. La discorde et le malheur troublèrent bientôt le règne heureux et
paisible qu’Anthemius avait promis à l’empire d’Occident : Ricimer, incapable
de supporter un supérieur, ou peut-être craignant pour sa propre sûreté, quitta
Rome, et fixa sa résidence à Milan, dont la position avantageuse lui facilitait
les moyens d’appeler ou de repousser les Barbares qui habitaient entre les
Alpes et le Danube [4091] .
L’Italie se trouva insensiblement divisée en deux royaumes indépendants et
jaloux ; et les nobles de la Ligurie, qui prévoyaient l’approche funeste d’une
guerre civile, se jetèrent aux pieds du patrice en le conjurant

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