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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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désespéraient d’obtenir leur pardon où qui dédaignaient
de le demander, s’étaient jetés dans ce dernier asile. Les fortifications
passaient pour imprenables : un célèbre ingénieur, renfermé dans la place,
avait employé, pour la défendre, toutes les ressources de la mécanique connue aux
anciens [416] .
Enfin Byzance, pressée par la famine, ouvrit ses portes : la garnison et les
magistrats furent passés au fil de l’épée, les murailles démolies, les
privilèges supprimés ; et cette ville, qui devait être un jour la capitale
de l’Orient ne fut plus qu’une simple bourgade ouverte de tous côtés, et
soumise à la juridiction insultante de Périnthe [417] . L’historien
Dion, qui avait admiré l’état florissant de Byzance, déplora sa ruine : il
reproche à Sévère d’avoir, dans son ressentiment, privé le peuple romain du
plus fort boulevard que la nature eût élevé contre les Barbares du Pont et de
l’Asie [418] .
Cette observation ne fut que trop vérifiée dans le siècle  suivant, lorsque les
flottes  des Goths couvrirent le Pont-Euxin, et pénétrèrent sans obstacle, par le
canal du Bosphore, jusque dans le centre de la Méditerranée.
    Albinus et Niger éprouvèrent le même sort : vaincus
tous les deux, ils furent pris dans leur fuite et condamnés à perdre la vie.
Leur mort n’excita ni surprise ni compassion : ils avaient risqué leurs
personnes contre le hasard d’un empire ; ils subirent le sort qu’ils
auraient fait subir à leur rival ; et Sévère ne prétendait point à cette
supériorité arrogante qui permet à un rival de  vivre dans une condition
privée. Son caractère inexorable le portait a la vengeance : mais l’avarice le
rendit encore plus cruel, même lorsqu’il n’eut plus rien à redouter. Les plus
riches habitants des provinces, qui, sans aucune aversion pour l’heureux
candidat, avaient obéi au gouverneur, que la fortune leur avait donné, furent
punis par la mort, par l’exil et par la confiscation de leurs biens. Sévère,
après, avoir dépouillé la plupart des villes de l’Asie de leurs anciennes
dignités, en exigea quatre fois les sommes qu’elles avaient payées pour le
service de son compétiteur [419] .
    Tant que ce prince eut des ennemis à combattre, sa cruauté
fut, en quelque sorte, retenue par l’incertitude de l’évènement et par sa
vénération affectée pour les sénateurs. La tête sanglante d’Albinus, la  lettre
menaçante  dont elle était accompagnée, annoncèrent aux Romains que Sévère
avait pris la résolution de n’épargner aucun des partisans de son infortuné
rival. Persuadé qu’il n’avait jamais eu l’affection du sénat, il avait juré à
ce corps une haine éternelle ; et il faisait éclater tous les jours son
ressentiment, en prétextant la découverte récente de quelque conspiration
secrète. Il est vrai qu’il pardonna sincèrement à trente-cinq sénateurs accusés
d’avoir favorisé le parti d’Albinus ; il s’efforça même par la suite de les
convaincre qu’il avait non seulement pardonné mais oublié leur offense
présumée ; mais dans le même temps il en fit périr quarante et un autres [420] , dont l’histoire
nous a conservé les noms. Leurs femmes, leurs enfants, leurs clients, subirent
le même supplice, et les plus nobles habitants de la Gaule et de l’Espagne
furent pareillement condamnés à mort. Une justice aussi rigide, comme il
plaisait à Sévère de l’appeler, était dans son opinion le seul moyen d’assurer
la paix du peuple et la tranquillité du prince ; et il daignait déplorer
la condition d’un souverain, qui, pour être humain, devait nécessairement,
selon lui, commencer par être cruel [421] .
    En général, les véritables intérêts d’un monarque absolu
sont d’accord avec ceux de son peuple. Sa grandeur réelle, consiste uniquement
dans le nombre, l’ordre, les richesses et la sûreté de ses sujets ; et si
son cœur est sourd à la voix de la vertu, la prudence peut au moins le guider,
et lui dicter la même règle de conduite. Sévère regardait l’empire de Rome comme
son bien propre : il n’en fut pas plus tôt possesseur paisible, qu’il n’oublia
rien pour cultiver et pour améliorer une si précieuse acquisition. Des lois
salutaires exécutées avec une fermeté inflexible, corrigèrent bientôt la
plupart des abus qui depuis la mort de Marc-Aurèle, s’étaient introduits dans
toutes les parties du gouvernement.

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