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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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trouvais même dans le peuple, au cours de mes pérégrinations, une
hostilité accrue et des poussées de haine, mais il en aurait fallu bien
davantage pour me faire renoncer à éradiquer la mauvaise herbe du paganisme et
répandre la bonne graine. Une seule génération de chrétiens, me disais-je, n’y
suffirait pas.
    Près du village de
Detmold, dans le nord de la Westphalie, au pied des monts du Teutoburger Wald,
j’allais trouver une revanche à la cuisante défaite de Thierry. Il s’en était
montré si affecté qu’il avait fait retraite dans une abbaye de Calabre, comme
pour prendre le plus de distance possible avec le monde.
    J’ignore si c’est la
vue de l’imposante armée dotée d’une cavalerie crépitante de métal dans le
soleil, faisant tonner l’épée contre le bouclier, ou les accents éclatants de
nos cuivres, mais, après un concert de clameurs sauvages et des provocations
inutiles, l’armée rebelle se débanda, poursuivie à travers la forêt par ma
piétaille.
    J’épargnai la mort ou le supplice aux
centaines de prisonniers que nous fîmes ce jour-là, sans perdre un homme ou un
cheval. Dois-je le dire ? je me sentais frustré. Cette dérobade m’avait
privé de la grande bataille que j’avais espérée durant des années et que
j’attendais avec une impatience accrue. J’avais en revanche la consolation
d’avoir épargné un bain de sang à mon armée, déjà lourdement éprouvée par les
embuscades et les coups de main. Mon fils Charles, qui chevauchait à mon côté,
se montra plus déçu que moi ; il attendait de cette journée la
consécration de ses qualités militaires. Il avait déjà l’étoffe d’un
guerrier ; aurait-il celle d’un roi ?
    La neige menaçant de compliquer notre retour
en Francie, je trouvai refuge avec mon armée dans le château d’Eresbourg,
ancienne résidence des légats de l’Empire romain. Je ne pouvais oublier que,
des années auparavant, j’avais fait abattre et brûler dans les parages
l’effigie du dieu ou du héros national des Saxons, l’ Irminsul .
    Je fis venir dans cette résidence ma jeune
épouse, Fastrade, et ma progéniture, y compris mes bâtards, pour recréer dans
le rude hiver saxon l’ambiance de Quierzy ou de quelque autre de mes domaines
francs. Fastrade ne m’avait donné son accord que du bout des lèvres, disant
qu’elle eût préféré que nous fussions seuls, mais je négligeai cette réserve.
    Nous nous retrouvâmes donc au milieu
d’immenses champs de neige pour cette retraite familiale qui allait durer des
semaines sans que l’ennui vînt m’effleurer. J’initiai à la chasse mes enfants
et le soir, devant la grande cheminée, je leur enseignais quelques rudiments de
la langue saxonne et leur apprenais des complaintes populaires de ce pays.
    J’avais vite compris
que Fastrade n’était pas l’épouse que j’avais souhaitée. Il lui manquait
l’affection, la mansuétude, la patience de ma chère Hildegarde. Sa beauté un
peu froide dissimulait une nature égoïste, vindicative et jalouse.
    Elle noya son venin dans l’eau lustrale du
baptême de notre premier enfant, avant la fin de l’hiver, à Eresbourg. C’était
une fille ; elle lui donna le nom détestable d’une de ses ancêtres :
Théoderade. Pour célébrer cet événement, elle fit entreprendre l’édification
d’une abbaye qu’elle dota généreusement.
    Décidé à en finir
avec cette guerre qui me fatiguait et obérait le trésor royal, j’entrai en
campagne aux premiers souffles du printemps, la neige ayant fondu.
    Je divisai mon armée en plusieurs colonnes dont
je confiai le commandement à des officiers confirmés, avec pour consigne de
faire régner la terreur, au besoin par le fer et le feu. Il fallait, leur
dis-je, que l’on ne reconnût leur sillage qu’aux dévastations qu’ils
laisseraient derrière eux.
    Au moindre signe d’hostilité, ils devaient
incendier les masures, faire table rase de tout signe ostensible de paganisme,
massacrer la population en cas de manifestations d’hostilité. Le pillage et la
capture d’hommes et de femmes consacrés à l’esclavage dans mes domaines
allaient de soi. Je leur laissai la liberté d’agir à leur guise tout en se
montrant inflexibles. La paix de l’Empire était à ce prix. Il fallait faire des
exemples pour affermir ma toute-puissance.
    Je confiai à mon fils Charles une de ces
colonnes qui, partie d’Eresbourg, devait remonter le fleuve Ems en direction

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