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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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Marie ? Je croyais que vous étiez veuf ? Et qu’elle appelait Berthe ?
    — Veuf, oui. La Berthe, elle est partie à la Toussaint. Elle a dû monter direct le ciel, la pôvresse ! Que l’bon Dieu veille sur son repos éternel. Mais qu’voulez-vous, j’ai encore les coillons bien trempés ! J’ai trouvé une p’tite lavandière, la Marie, veuve elle aussi. Elle se cabre et hennit mieux qu’une jument. Lorsque j’la saille ! En levrette. Elle m’en apprend plus qu’la Berthe.
    « Que Dieu ait son âme ! Quelle femme, la Marie ! Elle m’tue plus à la tâche dans son lit, qu’la pâte dans l’pétrin ! »
    La robe de bure de Jules Faucheux se tendit progressivement. Quelque part, juste en dessous de la ceinture. Le clerc notaire ne portait pas de braies ce jour-là.
     
     

     
     
    Plusieurs semaines passèrent. Trois mois exactement. La décapitation du forgeron des Mirandes, à la porte de Boines, demeurait inexpliquée. Un accident fort curieux et bien étrange pour un homme averti des risques de son métier.
    Un routier avait entre-temps été saisi par le prévôt de la sénéchaussée de Sarlat. Un homme patibulaire, errant, en proie à des hallucinations. Il avait été soumis à la question dans la chambre de torture. Il avait très vite avoué l’assassinat d’un homme, à Cénac, dont il ignorait le nom et les titres.
    Le Mont-de-Domme, bastide royale, était aussi la résidence d’été des évêques de Sarlat. Jugé coupable de ce crime, monseigneur de Royard avait exigé que le routier soit exécuté en cette ville, en mémoire du chevalier de Sainte-Croix. Avant d’avoir pu expliquer en quelles circonstances il s’était saisi de ma bague.
    Les affaires criminelles, près le tribunal de Sarlat, ne traînaient point en longueur. La justice était expéditive. Question d’exemple. Peu importaient les questions subsidiaires, en ces temps de guerre. Il fut pendu le jour même où, coïncidence ou décision délibérée, l’on fêtait l’Invention de la Sainte Croix, au gibet situé au lieu-dit le Bois des Dames, point culminant de la ville. D’où il aurait pu jouir, en d’autres circonstances, d’une vue magnifique sur la vallée de la Dourdonne. L’affaire était définitivement classée.
    Le baron de Beynac, à qui les greffiers du tribunal avaient confié ma bague après l’exécution du présumé coupable, me la remit solennellement. Non sans l’avoir fait bénir par l’évêque pour y effacer le crime de sang dont mes chiens braques passant et contrepassant avaient été les témoins passifs et innocents, crut-il bon de me préciser, non sans un soupçon d’ironie. Avant d’ajouter :
    « De belles armes ! Des lys de France ! Voilà un honneur exceptionnel et royal. Encore devras-tu les mériter, Bertrand. Comme ton aïeul qui les a conquises sur le champ de bataille : il ne portait que de l’or aux meubles de sable. »
    Je glissai à mon doigt mes armes, coupé, d’argent à deux chiens braques de sable passant et contrepassant l’un sur l’autre et d’azur à trois lys d’argent. La bague en or aurait pu m’en
     
     

     
     
    conter… Mais elle restait étrangement muette.
    J’en fis resserrer l’anneau par un orfèvre de Sarlat afin de ne point l’égarer à l’avenir et jurai que dorénavant, elle ne quitterait plus mon annulaire. De mon vivant. De jour comme de nuit.
     
     

     
     
    La ville de Bergerac avait été rattachée à la couronne de France en l’an de grâce 1337, par le roi Philippe. Les Anglais entendaient bien en prendre possession pour s’assurer leurs arrières et s’ouvrir la route du Nord.
    Un corps de garde français avait renforcé la garnison du château de Montcuq, près de la rivière Dourdonne, en amont de la ville de Bergerac. Sa mission était double : surveiller l’ennemi et prévenir la ville de l’approche des Anglais.
    À huit jours des calendes d’août, le 24 juillet 1345, la garnison aperçut les bannières déployées de messires Gautier de Mauny et Franque de la Halle, maréchaux de l’ost d’Henri de Lancastre, comte de Derby, à la tête d’un nombre considérable de chevaliers anglais et d’un nombre encore plus impressionnant d’archers montés.
    À mesure que les premières lignes de l’ost anglais et gascon s’approchaient, les corps de bataille qui suivaient, au loin, n’étaient pas plus gros que des têtes d’épingle.
    L’armée anglaise déferlait sur la plaine, dans la

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