La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
et avait éteint la lumière. Bien qu'il ne f˚t qu'un peu plus de neuf heures, il fonctionnait encore à l'heure de Chicago et, pour lui, il était onze heures du soir.
Le sommeil, cependant, ne venait pas. Il avait appelé
le rectorat Sainte-Bernadette et avait parlé au père Wycazik, lequel l'avait mis au courant du coup de fil de Dominick Corvaisis. Brendan était stupéfait de savoir qu'il n'était pas le seul à baigner en plein mystère. Il pensa un instant appeler le Tranquility Motel, mais les autres le savaient déjà en route et quoi qu'il e˚t pu leur dire au téléphone, il le dirait encore mieux de vive voix. Il pensait au lendemain et à ce qui pourrait arriver, et cela l'empêchait de s'endormir.
Il était ainsi allongé depuis une petite heure et ses pensées étaient tout naturellement revenues vers l'étrange lueur qui avait empli sa chambre, deux jours plus tôt, quand un phénomène identique se manifesta soudain. Cette fois-ci, la lumière n'avait pas de source visible pas même une source aussi improbable que la lune de givre sur le carreau de la fenêtre. Non, la lueur se manifestait au-dessus de lui, de tous côtés, comme si les molécules de l'air s'illuminaient. Ce fut d'abord une sorte de chatoiement nacré, qui devint très rapidement beaucoup plus vif, jusqu'à ce que Brendan e˚t l'impression de se trouver en pleine nature sous les rayons pénétrants de la pleine lune.
C'était très différent de la lumière dorée qui apparaissait dans son rêve récurrent. Exactement comme deux jours plus tôt, il se sentit éprouver au même instant les émotions les plus diverses-l'horreur et le ravissement, la peur et l'excitation la plus sauvage.
Et, comme dans sa chambre au rectorat, la lueur lactée changea de couleur, s'assombrissant rapidement pour devenir écarlate. Il lui semblait être en suspension dans une immense bulle de sang.
C'est en moi, pensa-t-il en se demandant ce que cela pouvait bien vouloir dire. C'est en moi. Cette réflexion ne pouvait plus quitter son esprit. Et tout à coup, il fut glacé de peur.
Son coeur battait à tout rompre. Il était étendu sur le dos, raide comme un cadavre. Dans les paumes de ses mains, les cercles étaient revenus, anneaux de chair palpitants.
Lundi 13 janvier
quand ils se retrouvèrent le lendemain matin pour prendre le petit déjeuner dans la cuisine des Block Dom ne fut absolument pas surpris d'apprendre que la plupart d'entre eux avaient passé une nuit très difficile. Ć'est exactement ce que j'escomptais, dit-il. En nous rassemblant ici, nous exerçons une pression constante sur les blocages mnémoniques implantés en nous. Les barrières s'effondrent un peu plus chaque jour. ª
Dom, Ginger, Ernie et Ned avaient fait des cauchemars extrêmement précis et si semblables qu'il ne pouvait s'agir que de fragments de souvenirs remontant à la surface. Dans chaque cas, ils s'étaient vus mainte-nus par des sangles à un des lits du motel et surveillés par des hommes vêtus de scaphandres de décontamination. Sandy avait rêvé des choses assez agréables, bien qu'assez floues par rapport aux cauchemars de ses compagnons. Faye avait été la seule à ne rien rêver du tout.
Ned était si troublé qu'en arrivant en compagnie de Sandy il déclara qu'ils allaient abandonner provisoirement Beowave et emménager au motel. ´ Peut-être que ce colonel Falkirk décidera de nous tuer comme il en avait l'intention. Si cela doit arriver, je ne veux pas que Sandy et moi restions seuls dans la caravane. ª
Dom comprenait parfaitement l'attitude du cuisinier, pour qui ce genre de cauchemars était absolument nouveau. Il ne croyait cependant pas que Falkirk tenterait quoi que ce soit tant que Brendan Cronin, Jorja Monatella et peut-être d'autres victimes ne seraient pas au motel. Mais une fois que tout le monde serait réuni, il en irait autrement et il leur faudrait faire front.
Ned Sarver prit son petit déjeuner sans appétit tout en évoquant les images qui avaient perturbé son sommeil. Au tout début de son rêve, il était prisonnier d'hommes portant des scaphandres de décontamination, mais ceux qui l'entouraient étaient par la suite vêtus de blouses blanches ou d'uniformes militaires, signe que le danger biologique s'était éloigné. Un des hommes en uniforme était le colonel Falkirk et Ned put en faire une description détaillée: la cinquantaine, les cheveux bruns grisonnant aux tempes, des yeux gris comme des cercles d'acier
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