La Prophétie des papes
dâune clef antique dans une serrure antique et une lourde porte sâouvrit dans un grincement. Puis, des reniflements et des griffes sur le sol en mosaïque.
Le berger allemand tira sur sa laisse, les oreilles dressées, aux aguets, la queue battant lâair sous lâeffet de la concentration. Son maître, un agent de lâentreprise de sécurité Gruppo BRM, le laissa faire son travail. Il alla directement à la table la plus proche, renifla la tenture de velours qui effleurait le sol et passa sa grosse tête noire et brune en dessous.
Le chien réapparut, la queue toujours aussi dressée. Il tira sur sa laisse pour atteindre la table suivante.
Hackel fit signe à son homme, Glauser, qui paraissait ravi dâavoir une mission en civil pour le conclave, son costume noir était taillé avec suffisamment dâampleur pour cacher une mitraillette améliorée Heckler & Koch.
« Faites venir lâéquipe pour quâelle enchaîne derrière le chien. »
Glauser hocha la tête et alla chercher les détecteurs de micros.
Lorsquâils en eurent terminé avec la chapelle, les membres de la sécurité se déplacèrent en masse dans les petites pièces adjacentes, y compris la chambre des larmes â où le nouveau pape passerait un bref moment seul pour réfléchir à sa destinée â, la chambre des vêtements de cérémonie, puis dans le sous-sol, où ils finirent leur inspection.
Dans la cour derrière la chapelle, Hackel regarda les gens de Gruppo BRM ranger leur matériel et faire monter le chien dans une camionnette. Glauser lâapprocha et dit :
« à partir de maintenant, je double la garde et je maintiens le plus haut niveau de sécurité. »
Hackel pointa un doigt sur lui et gronda :
« Vous avez intérêt à vous en assurer. »
Â
Elisabetta était seule dans lâappartement. Elle y était retournée après la messe à Sainte-Marie-du-Trastevere et la journée sâétirait étrangement vide devant elle. Elle nâétait pas du tout habituée à ce que son temps ne soit pas structuré ; mais elle nâallait quand même pas allumer la télévision !
Elle commença par passer une heure sur lâordinateur de son père à faire des recherches sur Lubumbashi et la république du Congo. Comme ce pays était pauvre, se dit-elle. Ils manquaient de tout. Mais, malgré leur pauvreté, les enfants qui apparaissaient sur le site de lâordre paraissaient si gais, si ingénus. Elle en fut un peu ragaillardie.
Elle soupira et se leva. La lumière qui entrait par les fenêtres rendait visible la poussière sur les meubles. Contrairement à la femme de ménage, elle avait le droit de déplacer les livres et les papiers impunément, et de dépoussiérer et lustrer à des endroits dont on ne sâétait pas occupé depuis des années.
Elisabetta alla dans sa chambre, enleva ses chaussures puis son habit. Les tiroirs de sa vieille commode étaient gonflés par lâhumidité et il fallut forcer pour les ouvrir. Elle nâavait pas regardé ses vêtements depuis des années et, à la vue de ses anciens pantalons et pulls, elle se sentit assaillie par un flot de souvenirs. Elle attrapa un jean délavé quâelle avait acheté lors dâun voyage scolaire à New York et ses doigts frôlèrent quelque chose en dessous.
Câétait une boîte recouverte de velours.
Elle sâassit sur son lit, la poitrine frémissante, essayant de retenir ses larmes. La boîte était posée sur ses genoux nus. Elle lâouvrit. Un rayon de soleil se posa sur le pendentif de Marco et se transforma en mille éclats sur les facettes. Il était aussi beau et étincelant que le jour où elle lâavait mis pour la première fois.
Â
Il faisait chaud, ce soir-là . La fenêtre dâElisabetta était grande ouverte, mais pas un souffle dâair ne pénétrait dans la pièce.
Marco posa son index sur le pendentif en forme de cÅur et lâappuya doucement contre le haut de sa poitrine. Sa peau était luisante et elle avait le souffle court. Ils étaient baignés dans la lumière des bougies.
« Tu lâaimes toujours ? demanda-t-il.
â Bien sûr que je lâaime. Tu nâas pas
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